Une BD à mi chemin entre le roman graphique (par sa taille et les thèmes traités) et le truc franco-belge (dessin et couleurs notamment plus classiques), ma foi tout ceci est correct. L’histoire d’un jeune et son pote un peu dingue qui veulent braquer un fourgon, toutefois le scénario se splitte rapidement en plusieurs intrigues qui ont scotché Le Tigre. Bon point.
Il était une fois…
Recopier la présentation de l’éditeur ne mange parfois pas de pain. Et puis tous les blogueurs le font (mauvaise excuse) :
« Vincent, trentenaire un poil dépressif, estime que la société lui doit bien quelques dommages et intérêts, au titre de préjudice moral. Et comme on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même, il s’improvise braqueur de fourgon blindé. Son plan est malin, sa cause est noble, et l’amour est au bout du braco. Mais en choisissant pour complice le déconcertant Gaby Rocket, Vincent n’a-t-il pas vu trop grand ? »
Critique de Ma révérence
Je ne sais plus trop comment ce bidule est arrivé dans ma très tigresque bibliothèque, cependant je ne regrette pas que Ma révérence ait eu l’idée de squatter mes rayons. Lu en une petite heure, il se trouve que j’ai passé un agréable moment. Au fait, note à Delcourt : ont dit « braquo », et pas « braco ». Quelle bande de brankignolles (sic).
Revenons à Vinc’, le héros de la BD. Petite trentaine, le jeunot a profité de l’héritage de grand-maman pour aller au Sénégal. Il y a rencontré une fille, lui a fait (par accident je pense) un gosse et a pris peur. Depuis, il lui assure depuis Paname qu’il reviendra avec les tunes nécessaires pour élever la famille. En rencontrant à plusieurs reprises Bernard (convoyeur de fonds qui termine son arrêt maladie à cause d’un braquage) dans un troquet, Vincent a le déclic : il va se faire la camionnette qui transporte les tunes et prendre brièvement en otage le fiston de Nanard.
Si l’histoire a le mérite de l’originalité grâce à quelques flashbacks sur la vie de certains personnages (passages assez poignants), les illustrations ne sont pas ce que je préfère. Entre la ligne claire à la papa et les traits plus « underground », Rodguen n’a pas su faire de choix et s’en est tenu à un style que je qualifierais de bâtard. Le coloriste, Ohazar (ça ne s’invente pas un tel nom), a lui opté pour des couleurs ternes, mais rien de choquant.
Pour conclure, une chouette BD surtout portée par des protagonistes secondaires d’exception, à l’instar de la famille du convoyeur mais surtout le bon Gaby Rocket, grand malade s’il en est qui n’a rien à faire dans ce monde. Quelques touches d’humour en plus, du beau boulot qui ne déplace certes pas l’Himalaya, mais que demander de plus ? Autre chose qu’un happy ending ? Pas le genre de la maison.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Ce qui est essentiel dans le projet de nos héros est la manière dont ils tentent de se justifier. Car ce ne sont pas des voyous, oh que non ! Pour preuve, ils s’en prennent à des fourgons, ce n’est de l’argent qui n’appartient pas vraiment à une personne déterminée. La violence ? Des armes factices. Les employés de la société de convoyage (ce terme existe j’imagine) ? Il leur donnera un solide pécule quelques mois après le casse. Un vrai robin des bois (je ne pensais pas si bien dire, la forêt va potentiellement l’aider).
On traite souvent des préjugés dans ce titre, et Wilfrid Lupano a sorti l’artillerie lourde : racisme basique (« agricole, ai-je envie de dire) qui a ses sources très profondes ; homophobie ; soucis de l’adolescence, il appert que ces thèmes sont assez bien amenés au final.
Dernier thème, et à mon sens le plus prégnant, c’est la paternité. Déjà Vincent fait de la merde de son côté et, comme il le dit, « il a fui le ventre rond ». Comme si avoir beaucoup d’argent allait régler les choses entre la mère de son gosse et lui… Enfin, et je ne vais pas salement vous raconter la fin, néanmoins Bernard, son père, et même Gaby, tous ont des problèmes à régler du côté paternel. Il est question d’accepter ses enfants, les aimer correctement et avant tout éviter de répéter les erreurs de son daron. Casser le cercle vicieux de l’éducation en somme.
…à rapprocher de :
– Les braquages qui ne se passent pas comme prévu, j’ai des pétées d’exemples en tête : je vous donnerai juste la première nouvelle de Hammett intitulée Le sac de Couffignal. Allez, un dernier : Le Casse, avec le bien connu Parker. Grandiose.
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