« Bien le bonsoir noble félin. J’ai enfin trouvé comment envoyer ce que vous appelez un mail, et ce n’est pas au staff de meetic à qui j’ai d’abord pensé. Non, à toi. Voilà mon problème : depuis des décennies que je choppe, j’ai toute une pétée de potentielles belles-mamans qui me harcèlent. Tu n’aurais pas quelques trucs en rab pour les faire patienter ? Don J. »
Que veut la belle-mère ?
Le titre et la missive de Don Juan ne sont pas évidents à saisir, je vous l’accorde. Toutefois, c’est sûrement un des billets les plus utiles que vous vous apprêtez à lire. Combien de fois vous est-il arrivé de buguer comme un(e) con(ne) à l’approche de Noël ou de l’anniversaire de belle maman jolie ? On a envie de surprendre, de plaire, bref de ne pas passer pour un rustre de premier plan. Hélas, l’inspiration peut momentanément vous faire défaut.
Se rabattre sur un bouquin n’est pas franchement glorieux, toutefois cela peut vous sauver. A condition de faire le bon choix. C’est ainsi que les caractéristiques retenus pour un chouette cadeau à la presque ancêtre seront les suivantes : un truc long, vaguement historique, mais surtout quelque chose qui la cale dans un coin de la pièce d’où vous ne l’entendrez plus. Maman par défaut qui ne l’ouvre pas, c’est souvent le bonheur assuré.
Voici donc une douzaine de romans à offrir à sa belle doche. Non seulement vous pourriez devenir, à ses yeux, un être d’une rare finesse dont la culture n’aura d’égale que la gentillesse, mais si ça vous chante vous serez également en mesure de faire plus ou moins subtilement passer un message.
Tora ! Tora ! Tora ! (x 4)
1/ Daniel Sibony – Les sens du rire
Si la vioque sourit aussi souvent que votre inspecteur des impôts vous accorde une remise gracieuse, il peut être tentant de lui refiler un essai qui décortique ce qui nous fait marrer. Beaucoup de théorie, en fait ne vous attendez pas à l’intégrale des blagues de Toto. Attention, offrir un tel essai peut prendre une vague tournure de déclaration de guerre.
2/ Mary Higgins Clark – [n’importe quel foutu titre]
Ah, sacré Mary…une institution à elle toute seule, quelle classe ! Vous lui prenez un titre au pif, et direction la plage pour le dévorer. Faites gaffe cependant, il y a fort à parier que la vieille dame en a lu pas mal dans sa (longue) existence, personne n’est à l’abri d’une petite cure de Clark. Checkez vite fait ses chiottes, c’est souvent là que ce genre de roman termine.
3/ Susan Abulhawa – Les matins de Jénine
Mi-essai, mi-fiction, Susan a pondu un titre envoutant et à la saveur amère. Le lecteur suit deux familles, deux camps opposés dans un conflit qui est avant tout territorial. L’écrivaine penche nettement du côté palestinien, ce qui est intéressant quand on est peu au fait des problématiques vues sous cet angle. Éviter si belle-maman penche (politiquement) à droite toute.
4/ Jane Austen – Orgueil et Préjugés
Je ne sais pas pourquoi, mais sur internet il y a un paquet de dondons mouillées qui n’en peuvent plus de baver sur Jane Austen. C’est que cette histoire doit être correcte, entre personnages bien travaillés et humour tout british pour l’époque. Un classique même, qui semble être redécouvert à de nombreuses reprises. Bref, le cadeau parfait pour avoir la paix. Le Tigre en parle d’autant plus facilement qu’il n’a jamais approché à moins de six mètres de ce lourd pavé.
5/ Amin Maalouf – Les identités meurtrières
Amin, franco-libanais rompu aux conflits ethniques, est le parfait interlocuteur pour nous entretenir des tensions communautaristes qui peuplent l’Occident et le Proche-Orient. Un vrai intellectuel qui prend parti et expose la voie de la raison. Avec ça, vous êtes le tolérant/laïc (doué d’un solide bon sens) de service. Hélas ça ne pèse que 200 pages, profitez-en pour offrir l’intégrale (Le dérèglement du monde, Samarcande qui est superbe, etc.).
6/ Jonathan Litell – Les Bienveillantes
Voici le cadeau de la dernière chance. Grosse belle-mère vient squatter avec vous en vacances, et vous êtes fermement décidé de ne pas la laisser gâcher les instants coquins que vous préparez avec votre douce moitié. Avec cette monstruosité littéraire de plus de 1.000 pages, vous ne serez pas dérangés pendant au moins 10 jours. Lisez au pif un passage sur la fin, et demandez lui de vous en toucher un mot quand elle sera tombée dessus. Elle sera bien obligée d’en venir à bout.
7/ Marcel Rufo – Grands-parents, à vous de jouer !
L’ai rapidement parcouru à cause du titre, bah ce n’est pas fameux du tout. Le mecton raconte sa petite vie et demande aux vieux (de moins en moins gâteux il est vrai) d’aider à prendre la relève de l’éducation. Je ne vais pas en dire plus, le synopsis n’est pas si important. Le titre, oui. Si vous n’avez pas encore de gosses, attention à l’interprétation que peut avoir un tel présent.
Idéal pour montrer à belle-maman que la BD, ce n’est pas pour les gamins. Une sublime autobiographie dans un environnement neigeux et qui saura titiller la fibre sentimentale de tout individu normalement constitué. Fin du fin, l’environnement ultra religieux des protagonistes saura rassurer belle-maman jolie dans la mesure où il n’est question que d’amour platonique.
9/ Olivier Chaline – L’année des quatre dauphins
Olivier C., c’est le gendre parfait : éducation complète, érudition de gros connard (chez Le Tigre, c’est un compliment), et belle gueule pour ne rien gâcher. Pas étonnant qu’il réussisse à rendre un essai historique (sur un sujet chiant au premier abord) super sympa à découvrir. Le bon roi Louis XIV se fait vieux, et il sa descendance tombe comme autant de mouches. Pas trop d’humour, des faits bruts, Maman sera contente.
10/ Arto Paasilinna – La douce empoisonneuse
Ce roman est plus une petite sucrerie pour calmer le récipiendaire. D’une part, cet auteur plait à la gente féminine et il n’est pas rare de vouloir les lire tous. Après le running gag, il y a le running gift, où vous lui donner l’intégrale (5 années de repos pour vous). D’autre part, cette histoire en particulier est touchante au possible, avec une dame digne qui, sans vraiment le vouloir, se débarrasse de son petit-fils (et ses amis) junkies et indélicats. Une réjouissance.
11/ Donna Tartt – Le maître des illusions
Donna Tartt, c’est un peu du Bret Easton Ellis mais en plus complet et moins glauque. Roman d’apprentissage, protagonistes bien décrits et aux défauts bien humains, on est à mi-chemin entre Le cercle des poètes disparus et un thriller en milieu clos. Le Tigre a eu du mal à détacher ses yeux des pages, alors imaginez ce que ça peut donner avec la marâtre. 700 pages, une semaine de répit.
12/ Mario Vargas Llosa – Éloge de la marâtre
Tigre aime terminer sur une petite blague, surtout quand celle-ci a de vilains relents d’amours interdites, voire incestueuses. Dans ce fabuleux roman, l’auteur sud-américain explique, par le menu, comment un enfant d’une rare innocence va parvenir à niquer sa belle-mère. Presque un message d’amour que vous ferez passer, mais soyez prudent hein.
…mais aussi :
– Tom Wolfe s’en sort très bien, à l’image d’un Bucher des vanités ou Moi, Charlotte Simmons. Pour ce dernier, le vocabulaire faussement « djeune » de l’écrivain américain est tout indiqué.
Aïe aïe aïe, je n’ai plus d’idées. A part tous les Carlene Thompson, qui en tient une belle couche question polars-de-vieilles-mamans. Par exemple Ne ferme pas les yeux.. Et je reste peu fier de quelques trucs inscrits ci-dessus. Je reste donc preneur de bons plans.
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Salut Tigrou,
Ca manque de Barbara Cartland tout ça! Je te conseille le sulfureux Escapades en Bavière ou le très juste L’inconnu du petit bois (non je ne les ai pas lu, mais les titres sont alléchants). Il est important de faire vibrer et rêver Madame Belle-Mère!
Un bon 50 Shades of Grey pourrait également l’intriguer et égailler ses discussions à la machine à café ou au club de bridge. Le clin d’œil complice de Monsieur Beau-Papa, à la libido encore vaillante, n’est que du point bonus. Attention en revanche au phénomène « Maman de Stiffler » qui peut nuire à cette bonne relation beau-fils / belle-mère et transformer l’intéressée en félidé des Amériques.
J’ai un affreux doute sur Maus: (i) il risque d’être vulgairement traité d’ « illustré » et d’être rangé à côté des vieux albums d’Alix et de Achille Talon, (ii) il évoque plus une relation père-fils que belle-mère/beau-fils et (iii) c’est un peu pesant la Shoah pour les fêtes de fin d’année… Mais pour rester dans le roman graphique, Blankets de Craig Thompson peut-être un bon choix (amour, neige, religion. C’est parfait).
Alternatives plus exotiques à Mary Higgins Clark (si l’oeuvre complète est présente aux waters): nos amis scandinaves nous ont pondu des auteurs prolifiques: Stieg Larson, 1900p de trilogie; Arnaldur Indriðason, 3500p d’enquêtes policières; Henning Mankell, plus d’une dizaine d’ouvrages etc.
A côté le dodécatora consacré au beau-père? J’ai des stocks de SAS et de Brigades Mondaines à refourguer.
Oh non, pas Barbara (ou Harlequin) ! C’est pas des livres, juste du papier imprimé (pleure) qui peut rendre service en cas de panne de papier où je pense. Les Nuances de gris, why not. Même si j’ai lu tout et son contraire à leur sujet. Ma frangine parlait de m’offrir le T.1 …
Cher Niccke,
1. Bravo pour tes efforts en matière d’orthographe.
2. 50 shades of shits est déjà dans un DDC.
3. Les polars scandinaves feront l’objet d’un DDC adéquat.
4. Très bonne idée pour Blankets, je changerai cela ! Maus out.
5. DDC sur beau-père arrivera en temps voulu. Tes lumières seront appréciées.
6. Je ne comprends nullement la référence à Stifler. Qui est-ce?
7. Des nouveautés de comics qui sortent à Londres ?
@zigette : je ne peux qu’abonder en votre sens. Toutefois, le papier « Harlequin » se gondole vite, très difficile de se torcher proprement avec.
6 –> Voyons Cher Tigre! Ou sont donc vos références pre-pubères? La chère Maman de Stifler, couguar affamée de son état, viole le fameux Pause-Caca sur le billard lors de la fête de fin d’année de son rejeton dans American Pie si ma mémoire ne me trompe pas…
Mes références sont intactes, ne vous inquiétez pas. Ce que vous ignorez, en revanche (et c’est là que Niccke veut me faire réagir, se trompant lourdement), c’est que votre serviteur ressemble, comme deux gouttes d’eau, audit Stifler.
J’ai même, au cours du printemps 2010, signé 48 autographes à un groupe de Sud-Coréens à l’entrée d’un musée à Shanghai qui m’avaient pris pour l’acteur. Véridique.
Hum… je ne suis pas certain que cela donne un portrait flatteur du Tigre…
Aux yeux des Coréennes si
Pas mal, jeune homme ! Ne dites pas de mal de Jane Austen devant une lectrice compulsive de plus de 45 ans. C’est vrai que c’est typiquement le bouquin dont on ne peut parler qu’entre Tigresses … Les Tigres passent à côté de qqchose en ignorant -au mieux !- cette auteure. Amin Maalouf, c’est aussi très bien vu. Les Bienveillantes m’attendent dans la bibliothèque, et Maus manque à ma culture (j’ai honte, oui). Rufo … comment dire … dans son genre, c’est certainement l’un des moins pires (j’ai élevé deux enfants, donc je me suis parfois intéressée à ce qu’il pensait de tel ou tel souci). Paasilinna, oui, mille fois, c’est jouissif ! Les Sud-Américains sont des valeurs sûres pour moi, un gros faible pour Luis Sepulveda. Et le Bûcher des Vanités … mmmmmmmmmmm !
Tout cela confirme que j’ai bien l’âge d’être belle-môman. Et que vous saurez très bien conseiller la vôtre ! 😎