VO : Consider Phlebas. Premier contact avec Banks et sa sublime série de La Culture, glorieuse civilisation anarchiste et richissime. Dans cet opus, un métamorphe voue une haine infinie vis-à-vis de la Culture et va tenter, avec ses petits bras, de la détruire. Un homme luttant seul, d’excellentes idées, un passage quasiment obligé pour tout fan de SF.
Il était une fois…
Horza (son nom est plus long), l’un des derniers métamorphes de l’univers, est capable de se métamorphoser (c’est le principe d’un métamorphe certes) à sa guise, et il se sert de cette capacité comme d’une arme de guerre. Le monsieur en veut personnellement à la Culture, société galactique aux délicieuses saveurs utopistes. Hélas, que vaut le combat d’un seul homme dans le cadre de la guerre qui fait rage entre la Culture et les Idirans fanatiques avec lesquels il pense s’allier ? Une guerre anachronique dans le monde de Banks, en effet c’est une guerre de religion.
Critique d’Une forme de guerre
Ai découvert Ian M. Banks un peu au pif, je m’attendais à de la SF à la papa un peu plan-plan, en fait que tchi ! C’est du grand art, j’ai correctement dévoré ces presque 650 pages en une journée. Et me suis de suite procuré les autres, Le Tigre est de cette race. A signaler que les tomes relatifs à la Culture de l’écrivain peuvent se lire dans le désordre, tout ce qu’il faut connaître est la civilisation principale et son service des « circonstances spéciales » traitant de sujets sensibles.
Cette fois-ci, nous allons pas suivre un protagoniste de la Culture, mais un métaphore en guerre contre celle-ci. Le combat semble hélas perdu d’avance. En effet, même si Bora Horza Gobuchul (son petit nom) possède de quoi faire légèrement trembler la puissante organisation, ça prend souvent des tournures don quichottesques. De prisonnier à mercenaire, c’est un être seul et fanatique qui se démène au sein d’une société galactique plus que bordélique et inadaptée à son mode de vie.
Le gros plaisir avec cet auteur, ce sont les nombreuses bonnes idées du roman et la lutte d’Horza qui est géniale à lire. Tour à tour, il sera confronté à des indigènes cannibales, un jeu flippant de destruction psychique (cf. infra), et d’innombrables mortelles situations, et s’en sortira en partie grâce à son métabolisme magnifiquement décrit.
Quant au style, c’est dense (chapitres assez longs) et fort réussi. N’ayez pas peur du nombre de protagonistes, le seul qui vaille est suffisamment rendu vivant. Le père Banks alterne entre savantes descriptions et scènes d’action (dont certaines assez sanglantes) et a réussi à accrocher Le Tigre a son ambitieuse œuvre. Peut-être pas le meilleur pour appréhender la Culture, mais le plus abouti à mon sens.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
La lutte sans espoir. Désabusé et sans cesse en train de porter ses multiples coups d’épée dans la flotte, notre héros d’un titre a plus ou moins conscience de la vanité de ses actes et en devient presque attachant. En même temps, comment un unique individu, certes doté de fabuleux pouvoirs qui se perdent (sa race se fait rare en effet), peut dans son coin faire sauter la plus grande civilisation que l’univers ait connue ? L’écrivain, à la fin du roman, livre sa réponse grâce à une métaphore littéraire que je n’avais pas comprise avant de le trouver sur wikipedia.
Denier mot sur un jeu très bien pensé présent dans le roman, le « Jeu de Débâcle ». Le pavé comporte pas mal de pages en racontant quelques parties de ce jeu de cartes particulier. Le principe est proche d’un poker avec à la place des rois ou valets des cartes représentant une émotion (peur, joie, paranoïa, etc.). Ca défouraille de tout va émotionnellement, et la puissance du jeu est telle que les spectateurs les plus proches (des fous furieux avant tout) en profitent largement. Des humains sont même utilisés en tant qu’assets, perdre sa mise entraînant leur mort. Alors si le joueur peut prendre à tout moment leur place, imaginez le foutoir.
…à rapprocher de :
– Sur les titres de la Culture, il y a (pour ce que je connais) L’Homme des jeux, L’Usage des armes, Inversions, Excession, La Sonate Hydrogène, et tant d’autres.
– Sur la société parfaite, on peut penser, à une échelle plus petite, aux Moravecs de la saga Ilium de Dan Simmons ou aux Gardiens des Guerres Wess’har de Traviss.
– Un exemple de civilisation de l’abondance (et comment celle-ci peut foutre la merde chez des organisations « inférieures ») est le Festival du roman Crépuscule d’acier, de Charles Stross. Fin et drôle.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.
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