[VO : Evil Under the Sun. Il est certain que c’est plus parlant, même si le terme « soleil » se doit d’être nuancé en raison de son anglaise qualité]. Une enquête estivale menée, presque malgré lui, par le célèbre belgiquissime détective dans une sorte de huis clos insulaire où les identités sont autant rabattues qu’un jeu de cartes. Ça passe gentiment.
Il était une fois…
Le lieu : un hôtel à Devon, sis sur une presqu’île où il est difficile de passer inaperçu. Le temps est propice à l’étalement des corps comme sur un étal de boucher (selon les dires d’Hercule).
Les personnages : une bonne douzaine, ceci dit on peut zapper les vieux militaires radoteurs et autres intervenants secondaires. A part le héros, il y a Christine (belle mais effacée) et Patrick (un apollon) Redfern, le mari présentant des vues sur Arlena Marshall, jeune actrice et épouse de Kenneth Marshall, lequel a amené sa fille d’un premier lit, Linda, seize ans. Rajoutez à ce petit monde quelques policiers patauds, une athlète, et une couturière de renom, Rosamund.
Le fait générateur : Arlena est étranglée dans une petite crique. Alibi crédible pour tout le monde. En piste.
Critique des Vacances d’Hercules Poirot
C’est amusant, j’ai l’impression de vous avoir déjà tout dit…à part le nom du (ou des) coupable. Ce roman ne m’a pas laissé de grands souvenirs, sinon une distraction correcte à l’humour british grâce à un détective un peu plus corrosif et entreprenant que d’habitude – mis à part le fait qu’il n’est pas dans l’esprit de la chope alors que ça grouille de bikinis autour de lui, allez savoir pourquoi.
La description des pensionnaires de l’hôtel passe en partie par les discussions (voire) racontars de certains et ce que le commun des mortels peut remarquer. Patrick Redfern, par exemple, semble irrémédiablement attaché à la sublime Arlena avec qui il converse au bord de la plage, et ce sous les yeux embués de sa femme. Quant au mari d’Arlena, Kenneth, il y a comme une petite tension avec une autre femme dont on apprendra vite qu’ils étaient autrefois ensemble.
L’histoire devient intéressante lorsque Patrick part faire une balade en bateau ave Emily, athlète d’aviron. Les deux trouvent la pauvre Arlena décédée dans une zone reculée (répondant au doux nom de Pixy Cove). Par la suite, de la drogue est trouvée dans un abri près de la crique – sans compter qu’une odeur seulement portée par deux personnes flotte dans le coin. Ce sont ces genres de détails (les horaires scrupuleusement précisés, les odeurs, les déclarations bénignes des uns ou des autres) qui ont, très souvent, une importance capitale permettant de confondre les malfrats.
Toutefois, dès qu’Hercule Poiroit (lequel monte en puissance au fil des chapitres) daigne expliquer au lecteur ce qu’il en est, le félin a un peu tilté. La conduite du meurtre est certes astucieuse et complexe, mais cette histoire m’a paru un peu déconnante. Disons que pour faire ce coup, il y avait bien sans aucun doute plus simple à disposition, sans compter que l’exécution du plan paraît soumise à trop d’aléas passablement incontrôlables. A moins de copier sur un carnet toutes les informations pour savoir qui est derrière ce meurtre, le suspense reste de mise.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Ce roman est l’occasion de montrer un fort joli exemple de femme fatale. Celle vis-à-vis de laquelle on ne peut rien : rayonnante, centre des supputations, sûre d’elle, attirant les mâles malgré eux, bref un petit joyau on dirait la tigresse. Sauf que la fatale n’est pas celle que l’on croit…[note si vous voulez être divulgachés : c’est le couple Redfern qui a fait le coup, meurtriers ayant agi sous un nom d’emprunt et pour de sombres histoires de tunes…]
Nonobstant les dernières pages offrant (hélas) une fin heureuse à presque tous les niveaux, il ressort de cette œuvre une solide impression de gâchis amoureux. Les protagonistes ne paraissent pas forcément avoir choisi la bonne voie sentimentale et laissent traîner derrière eux des effluves de regrets, voire de rancœur. Le passé ressurgit à vitesse grand V pour certains d’entre eux tandis que d’autres voient leur avenir sérieusement s’assombrir – le fauve pense notamment au cas de Linda, qui n’a pas l’air bien partie dans la vie. Au milieu de tout ce fatras, Hercule P. garde une attitude neutre qui pourrait passer pour de l’indifférence.
…à rapprocher de :
– De cette écrivaine, le félin a notamment lu Le Meurtre de Roger Ackroyd (plutôt déroutant).
– En plus drôle, où il est question de repos (hum) estival y’a Les vacances de Bérurier, de San-Antonio. Un must.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.
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