VO : Emmaus. Dans l’Italie des années 70 (ou plus tard ?), quatre jeunes hommes sont confrontés à leurs premiers émois. Et les changements qu’ils subissent à cause d’une jeune femme sont tellement puissants qu’ils y perdront plus d’une plume. Balade douce-amère dans un univers contrasté (mêlant religion et dépravation), hélas je suis totalement passé à côté de ce roman.
Il était une fois…
Encore une belle flemme question rédaction, voyons ce que l’éditeur gazouille de ce roman :
« Quatre garçons, une fille : d’un côté, le narrateur, le Saint, Luca et Bobby, et, de l’autre, Andre. Elle est riche, belle, et elle distribue généreusement ses faveurs. Ils ont dix-huit ans comme elle, sont avant tout catholiques, fervents voire intégristes. Musiciens, ils forment un groupe qui anime les services à l’église et passent une partie de leur temps libre à assister les personnes âgées de l’hospice. Alors qu’elle incarne la luxure, Andre les fascine, ils en sont tous les quatre amoureux. La tentation est forte mais le prix à payer sera lui aussi considérable. »
Pas terrible il est vrai. La version tigresque : Andre les rend fou, et nos héros sont trop coincés du derche pour oser faire les premiers pas – et ils s’en mâcheront les couilles.
Critique de Emmaüs
Le Tigre a eu à mal de chacal à rédiger le présent billet. J’ai surtout la tenace impression de commettre une belle connerie en annonçant que je n’ai pas du tout accroché à ce roman, lequel a éveillé trop peu de choses en moi. Car il y a eu comme un frémissement en lisant les dernières pages, comme si à la fin d’un film vous vous dites « ah ce n’est pas si mauvais, peut-être je devrais le revisionner au cas où ».
Ainsi, deux choses ont empêché le félin de savourer la pleine puissance d’un ouvrage – qu’il n’est pas difficile de deviner éminemment personnel chez l’auteur italien. Premièrement, l’histoire ne m’a point parlé. Pas du tout même. Le héros/narrateur (dont on ignore le nom) et ses trois amis, qui sont fraîchement majeurs, ont leur esprit occupés par Andre. Une sacrée nana celle-là, participant à des orgies monstres tout en fréquentant les hospices avec sa gueule d’ange. Un mystère sur pattes qui laissera une marque indélébile chez nos protagonistes dont les destins varieront du tout au tout – suicide, prison, ou encore révélation.
Deuxièmement, le style de Baricco ne m’a guère enchanté, je ne m’attendais franchement pas à butter sur tant de paragraphes. Si l’histoire est globalement livrée dans l’ordre chronologique, il est quelques passages plus ciselés qui se concentrent sur des aspects (ou des souvenirs) à la teneur mélancolique et situés hors du temps. Des passages d’une beauté que je supputais, toutefois rien de susceptible de me scotcher à mon canapé. D’habitude, le genre triste et contemplatif (mâtiné de nombreux enseignements) me ravit, néanmoins ici ça m’a gavé.
Encore un petit échec de mon côté, je m’en veux d’autant plus qu’en moins de 200 pages je sais que j’aurais pu me sortir les doigts du fondement pour mieux me concentrer sur un titre qui s’est révélé dense et profond. Trop précis et tarabiscoté par moments, à croire que l’écrivain a voulu planquer une biographie derrière les ors de la fiction.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Déjà, il me paraît normal d’expliciter le titre, pour tout vous avouer j’ai dû sortir ma poussiéreuse Bible (celle que j’avais piquée dans un love-hotel aux Philippines) afin de savoir qui est ce fameux Emmaüs. En fait il s’agit d’un village où le Christ, fraîchement ressuscité, est accueilli par deux individus qui ne reconnaissent pas leur Dieu…jusqu’à ce que Jésus rompt le pain à son habitude. Plus généralement, le texte d’Alessandro B. est empreint de nombreuses références au catholicisme et à la difficulté, pour des individus au faîte de leur jeunesse, de croire en un Dieu mort crucifié.
Appliqué à notre récit, les quatre amis sont les hôtes de la ville qui s’aperçoivent bien tardivement être en présence de quelque chose qui ressemble au divin. Andre, mélange de Marie-Madeleine et de Malin tentateur, laisse un goût amer à tous ceux qui la croisent. Au surplus, la bande des quatre rencontre la belle à un moment charnière de leur existence, c’est-à-dire lorsqu’ils sont particulièrement fragiles. Aussi ils n’ont sans doute pas le temps d’extraire de leur rencontre avec Andre quelque chose de bien. Il y a un peu de YOLO dans Emmaüs.
…à rapprocher de :
– De Barrico, Tigre a nettemement préféré Soie. Plus léger et moins fourni certes, mais la beauté est bien là.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.
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