VO : The Satanic Bible. Classique que tout luciférien qui se respecte range en évidence dans sa bibliothèque, hélas la moitié consiste en l’art de bien organiser une séance de magie noire. Violent (et éructant) pamphlet contre la morale dominante (donc chrétienne), une pincée d’idées intéressantes, le reste étant de la bouillie à peine digérable (donc digérée).
De quoi parle la Bible satanique, et comment ?
Qui es-tu Anton Szandor LaVey ? La photo du quatrième de couverture te montrent chauve, avec un inquiétant regard sous lequel une non moins flippante barbichette te donne des airs de gourou. Touché. Né en 1930, fondateur de l’Église de Satan, LaVey a pris quelques années (il avait environ 30 piges) pour rédiger sa bible. Oui. Il en a mis du temps eu égard le résultat final.
Cet essai relativement confus se divise en deux parties de taille égale (en termes de pages…) après les introduction, préface et autre prologue. Tout d’abord, la diatribe infernale, à savoir le Livre de Satan qui fait office de gueulante assez vulgaire en mode anti-10 commandements. Puis l’Illumination, ou Le Livre de Lucifer, où Anton expose ses idées – grosso merdo, ne pas brider l’ego et ne surtout pas s’en remettre à une puissance extérieure déresponsabilisante.
La seconde partie ? Un supplice. Ne suis pas parvenu à dépasser dix pages. Et lorsque je sautais quelques chapitres, ça ne devenait pas plus intéressant. Car il s’agit de la pratique de la magie satanique, de la liturgie du diable qui est, en comparaison d’autres religions, sacrément obscure. Franchement, entre la bonne vingtaine de clés énochiennes et les incantations dans une langue inconnue (sans parler de la liste des différents démons), le félin ne savait pas vraiment ce qu’il foutait dans ce joyeux merdier.
Toutefois, cet ouvrage mérite d’être lu pour le curieux qui veut savoir ce qui se cache derrière l’adjectif de « sataniste » trop souvent utilisé. Mais l’impression demeure que le méchant LaVey a scribouillé ça comme un furieux dans son bureau avec des saladiers remplis de coke à ses côtés. Le problème est qu’on sent qu’il plein de choses intéressantes à partager, mais sa pensée manque de structure et le peu d’exemples donnés ne sont guère accompagnés d’analyses satisfaisantes. Je l’ai donc plus lu comme un divertissement qu’un essai.
Ce que Le Tigre a retenu…
Le félidé va vous décevoir : j’ai lu cette chose sur la plage, l’esprit encore embrumé des vapeurs d’alcool de la veille. Et cette lecture ne m’a pas procuré le « kick existentiel » promis par le Mage Peter H. Gilmore dans son intro. La seule chose utile avec un pavé pareil est de s’afficher avec en marchant lourdement sur le sable, le bouquin coincé par le coude et le regard mauvais. Puis s’installer pas loin d’une bande de scouts en vacances. Enlever ses lunettes. Mettre discrètement des lentilles colorées (rouge de préférence). Les regarder en riant. Puis savourer le spectacle en lisant ça à voix haute (page 155)
Profitez pleinement des sortilèges et des charmes qui fonctionnent. Si vous êtes un homme, plongez en elle votre membre en érection avec un ravissement lascif. Si vous êtes une femme, ouvrez grand votre sexe dans une attitude lubrique.
Plus sérieusement, je me suis souvent dit que le terme « sataniste » n’était pas si adéquat. Je pensais que LaVey n’en voulait qu’aux enseignements du Christ, en fait il s’en prend à l’idéologie/morale dominante, l’Amérique puritaine d’après-guerre qui ne cherche qu’à brider l’individu afin qu’il se sente dans un état de défaut perpétuel – le rendant plus docile. L’essayiste se complait à croire qu’il est un réel humaniste dans le sens où il comprend autant ses semblables qu’il veut les rendre heureux. De là, Anton L. dénonce en particulier l’hypocrisie de son époque, appelant à la rescousse (certes maladroitement et en vrac) quelques odieux faits d’armes de l’Homme – au nom de ses croyances.
D’ailleurs, pour la petite histoire que tous connaissent, le sceau de l’hypocrisie contemporaine a frappé le jeune LaVey qui, plutôt doué au piano, voyait les mêmes personnes le soir dans les bars (à se comporter comme des sagouins)…et le matin à la messe. Anecdote assez proche du génial Jerry Lee Lewis, vous ne trouvez pas ?
…à rapprocher de :
Les essais sur ce qui touche de près ou de loin à la face ne manquent pas chez cet éditeur, notamment sur le blog :
– Le Livre de la loi, d’Aleister Crowley (dont LaVey s’est inspiré). Encore plus barré.
– L’essor de Lucifer, de Baddeley. Assez long, mais les chapitres peuvent se lire indépendamment.
– Black metal satanique, de Moynihan et Soderlind qui se dévore telle une horrible histoire.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver cet essai en ligne ici.
Possédé par Lucifer, satan l’habite en quelque sorte …
Ce blog n’a pas vocation à accueillir les pires jeux de mots de la création, le taulier sévissant suffisamment sur ce point.
Un truc subtil et raffiné digne de Philippe Bouvard !
N’y a-t-il donc pas un ouvrage correct pour le curieux souhaitant « s’instruire » sur la mythologie satanique ?
A mon avis c’est un ouvrage correct puisque fondateur. Je me rencarde sur les essais instructifs, ça doit sûrement être chez le même éditeur.
Merci pour la recherche, pour préciser ma pensée, je parlais d’un ouvrage qui pourrait se voir comme une sorte de Divine Comédie moderne, enrichie des mythologies populaires comme celle de Baphomet par exemple.
Mais si j’ai bien compris, cet ouvrage est surtout un pamphlet anti-christianisme.
Ping : Gavin Baddeley – L’essor de Lucifer | Quand Le Tigre Lit
Ping : Aleister Crowley – Le livre de la loi | Quand Le Tigre Lit
Ping : Moynihan & Soderlind – Black metal satanique | Quand Le Tigre Lit