Une bande d’aventuriers (aidés par l’État, certes) dépassent la mort et livrent les secrets du paradis, de la réincarnation. Quelle insolence, ils se respectent vraiment rien. Peut-être parce qu’ils sont français madame ! Ne vous inquiétez pas, l’auteur est consensuel, et son cycle regorge de bons sentiments et de découvertes convenues mais fort bien amenées.
Il était une fois…
Ce cycle se décompose en deux romans de taille à peu près égale. Pour faire simple, le premier évoque comment les héros découvrent la possibilité d’un quelque chose après la mort. Ensuite, le protagoniste parvient à devenir un ange, et devra s’occuper d’une poignée d’humains. C’est parti :
Les Thanatonautes. Michael Pinson est un gentil docteur, et avec son pote Raoul Razorbak (sic) ils vont fouler une nouvelle terre inconnue de la population. Pour faire simple, le président français, à la suite d’un attentat foiré, a vu un magnifique tunnel pendant qu’il mourrait. Mais il a été ramené à la vie. Et le politicien met en place une unité spéciale pour savoir qu’est-ce qui se cache derrière la mort. Les thanatonautes (tsoin tsoin) sont nés.
L’Empire des anges. Michael, notre affable héros, est décédé dans un accident d’avion. Le gus aurait dû se réincarner, sauf que son ange-gardien est venu plaider sa cause. Résultat, Michael P. est devenu un Ange, et pour passer au niveau supérieur (genre, acquérir 600 points) il faut que les humains qu’on « protège » puissent voir leurs vœux exaucer – gagner des bonus fait prendre des décisions en effet surprenantes. Game is on.
Critique du Cycle des anges
Après la Trilogie des Fourmis (cf. infra), notre Nanard en chef a abordé des thèmes aussi porteurs que fondamentaux. Enfin c’était son intention, et le résultat est relativement mitigé. Sans aucun doute un ouvrage qui donnera goût à la lecture pour un ado, toutefois je ne suis guère certain que le lecteur chevrâgé (chevronné et/ou âgé) apprécie.
Le premier roman (voire le début du second) est extrêmement séduisant, il faut dire que notre Werber national a sorti l’artillerie lourde. Un univers exclusif que le lecteur découvre en même temps que les protagonistes ; la manière dont ils y sont arrivés (expériences sur des prisonniers, forcément) ; des idées finement trouvées sur la manière dont la réincarnation fonctionne ; la visite des sept « zones » du paradis ; les réactions excessives (mais attendues) des contemporains ; et surtout les chapitres « historiques » sur les expériences de différentes civilisations sur ce sujet.
Puis Bernard W. se lâche, quitte à ouvrir cette fois-ci la boîte à n’importe quoi. La gestion des trois humains par le héros updaté en chérubin est relativement ennuyeuse, franchement l’histoire du trio n’a pas été loin de me gaver : la grasse Venus qui ne maîtrise pas son statut de star (tellement éculé), le militaire russe qui évolue dans un monde sans loi, et le dernier gus (insipide), Le Tigre n’a ressenti que très peu de sympathie face à ces personnages caricaturaux. En conclusion, un Cycle un poil léger mais qui porte des enseignements – auquel on aimerait croire.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Pour une fois, jamais un diptyque n’a aussi bien porté son nom. S’il est question d’un cycle, c’est que le macchabée, suivant ses actes sur Terre, aura le droit de se réincarner dans une nouvelle vie plus ou moins enviable – le must étant d’évoluer en un ange. Lorsqu’un homme à peu près sage peut prétendre renaître en Occident dans une heureuse famille, le vilain Hitler est devenu un végétal. Et oui, il y a hiérarchie entre les « états » d’existence : minéral, végétal, animal, humain, ange, qu’y a-t-il après ? Tous ces états sont associés à des chiffres, et il convient de dire que la symbolique de ces numéros fait mouche. Presque de la philosophie.
Enfin, Le Tigre a cru déceler dans ces romans une ode au dépassement de soi, et surtout du franchissement de frontières (même morales) établies par la société. Poser le pied sur un nouveau territoire est aussi exaltant que frustrant dès que la populace ne réagit pas comme on l’imaginait. Mais ce dangereux jeu (oser se tuer pour visiter l’au-delà) se révèle payant, tout comme Colomb qui souffre comme une mule avant de trouver l’Amérique. Au surplus, en divulguant à tous la thanatonautie, l’Humanité a franchi une étape tellement importante que certains proposent que l’espèce humaine évolue, sur sa taxinomie, en homo thanatonautis. Sauf que l’Homme n’a guère changé.
…à rapprocher de :
– De Bernard Werber, le jeune Tigre s’est plus ou moins régalé. La trilogie des fourmis, évidemment. Le Cycle des Dieux, qui clôt la présente saga – c’est pire. Puis d’autres romans, comme Le Père de nos pères (mouais), L’ultime secret (bof), Le Papillon des étoiles (horreur, malheur), etc.
– Sur la réincarnation, Eric-Emmanuel Schmitt a produit le très touchant Milarepa, qui se laisse agréablement lire.
J’avais adoré le premier tome de la série des fourmis. Apprécié le second. Et je ne me souviens même plus vraiment de quoi parle le troisième.
J’ai aussi lu le Père de nos pères, sympa. Et l’Ultime secret. Ça se lit bien, mais ça ne m’a pas laissé un souvenir impérissable.
Et puis… J’ai laissé tomber Bernard Werber après avoir lu l’Empire des anges. J’ai trouvé que l’auteur prenait un ton condescendant pour s’adresser au lecteur, ce qui devient rapidement horripilant. J’ai eu la sensation en lisant ce dernier livre que Bernard Werber se sentait investi d’une espèce de mission d’éducation envers son lectorat, qu’il prenait la posture du vieux sage qui sait, limite pédant. Du coup, j’ai préféré laisser tomber plutôt que de m’énerver dans mon coin pour une activité qui est censée permettre de s’évader et de se faire plaisir.
J’ai eu votre réaction avec Le cycle des dieux, où Nanard part dans tous les sens. Au moins il m’a appris à être curieux – du moins au début.
J’ai lu la trilogie des Fourmis de Werber, les deux premiers m’ont fasciné, le dernier moins. Après j’ai décroché de Werber.
Les vacances, la plage, les belles filles qui lisent du Levy, le cerveau au ralenti, la décompression, tout est fait pour que tu prennes un Werber. Pour voir s’il peut nager.
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