Un thriller sans les flics, l’Afrique sans la chaleur, un guépard sans la savane, une passion sans confiance, c’est correct eu égard la date de publication. Une dizaine de chapitres que le lecteur trouvera plus ou moins long, pour ma part j’ai lu bien pire. Boileau & son compère Narcejac ont du faire mieux toutefois.
Il était une fois…
François est véto dans Gois, près de Noirmoutier, au sud de la Bretagne (je dis juste ça pour faire gueuler les Vendéens). Il ne se passe strictement rien dans sa vie, il soigne les bêtes des paysans du coin et son épouse Éliane l’attend chaque soir avec un petit plat. Jusqu’à…ce qu’un médecin lui demande d’aller voir une certaine Mme Huller (si ai bonne mémoire) et son guépard qui est en mauvaise santé. La belle Myriam envoûtera notre ami qui va subir mille et un tourments.
Critique de Maléfices
Extrait du dialogue avec le libraire :
– C’est quoi, Boileau-Narcejac ? – Quoi ? Tu ne connais pas ?!? Merde, c’est une référence du polar noir french-touchée ! – Bon, bah donne m’en un pas trop long et sympathoche… – Monsieur est servi… – Met-le sur mon compte. – J’ai bien peur que votre ligne de crédit ne soit épuisée…
Plaisanterie à part, je connais peu Pierre Boileau (celui qui pense le scénar’) et Thomas Narcejac (celui qui fait met en page). Le titre Maléfices annonce bien de quoi il retourne, et dans un environnement aussi froid et glauque que la côte atlantique ça rajoute une part de mystère, pour ne pas dire de glauque. Avec une femme presque sorcière qui s’en prend à l’épouse de François, j’ai hésité entre qualifier l’intrigue de vaguement occultiste plutôt que parler d’un thriller.
Pour un roman du début des années 60, le style m’a laissé une impression mitigée : d’une part, l’ensemble paraît avoir un peu vieilli : la « transformation » amoureuse du héros qui se découvre une incommensurable passion pour la jeune Myriam offre des passages presque à l’eau de rose, du moins un peu too much eu égard les sentiments exaltés du protagoniste. En outre, le roman ne serait qu’une lettre envoyée par le narrateur à un de ses amis avocats (et académicien de surcroît), ainsi lorsque ce premier s’excuse pour le manque de richesse de son vocabulaire, on n’y croit pas une seule seconde.
Car, d’autre part, le style reste bien travaillé, voire délicieux sur les quelques portraits livrés par les auteurs. En fait Narcejac, apparemment seul derrière la plume, sait la manier correctement et fait plus d’une fois péter quelques termes savamment choisis. Quant à Boileau, il a imaginé une fin que je craignais oldschool, mais qui s’est révélée assez surprenante. En conclusion, ce ne fut pas la grosse découverte, seulement la confirmation que les deux compères méritaient leur succès.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
L’amour dévorant. Prenez un vétérinaire dans sa campagne marié à une femme légèrement éteinte, mettez-le face à une jeune débarquée du continent noir avec son guépard, artiste en plus, je vous laisse vous représenter la fête du slip que c’est pendant quelques semaines. C’est trop, même, la donzelle se révèle étonnamment possessive. La question finale est de savoir si François va finir connement écrasé au bas d’une falaise comme l’ex mari de son amante (vous suivez ?)…à moins que la cible ne soit que la femme de François, et ce afin qu’il soit définitivement libre.
L’Afrique est à l’honneur, et oui ! La bonne Myriam a vécu quelque temps au Congo (ou dans ces eaux-là) et a été pleinement intégrée. Il ne faut pas long pour qu’on pressente quelque chose relevant de la magie noire chez elle, et le héros se monte correctement le bourrichon : il s’est procuré quelques essais sur ces terres et tente, tant bien que mal, à rester rationnel face aux sortilèges, guérisseurs, féticheurs et autres joyeusetés décrites dans les ouvrages. Juste pour la blague, une comptine destinée à retenir un amant volage :
Mundia mul’a Katéma
Silumé si kwta ku angula
Mundia mul’a Katéma…
…à rapprocher de :
– De Boileau-Narcejac, Tigre a en magasin Les Veufs. Pas terrible.
– Quelques maléfices, des sorciers/sorcières en France, c’est un peu la BD Silence, de Comès. A lire absolument.
Sinon, l’air de rien, l’animal de compagnie répondant au doux nom de Nyété m’a brièvement donné envie d’adopter un guépard. Mais ce serait contre-nature. Et mon chat risque de chier de trouille.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.
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Ping : Pécau & Dim. D – Paris maléfices, Tome 1 | Quand Le Tigre Lit
Sur la forme comme sur le fond, je trouve que ça ressemble a du Agatha Christie. Je n’ai pas lu celui-la spécifiquement mais d’autres me sont tombes sous la main a une époque ou j’enquillai du roman policier. De bonnes enquêtes et un style propre. Ça défrise pas les moustaches mais ça offre une atmosphère classique qui fait du bien entre deux thriller sanguinolents comme on en est submerge maintenant.
Boileau et Narcejac ont aussi écrit la série des Sans-Atouts. J’en ai lu gamin mais je pense que ça a du un peu vieillir au même titre qu’un club des 5.