VO : God Is A Bullet. Premier roman de Teran, premier lu par Le Tigre. Et bah le 4ème de couv’ ne ment pas, cette histoire marque. Et pas qu’en bien tellement c’est sombre et crédible. Histoire d’un père qui va traverser l’underground pour récupérer sa fille, satan se trouve réellement dans le désert du Nouveau-Mexique. Mais qui est Boston Teran pour écrire ça ?
Il était une fois…
Bog Hightower, flic en Californie, n’a décidément pas de chance. Femme assassinée et fille enlevée, il va devoir courir la région, jusqu’au Nouveau-Mexique, pour retrouver ce qui reste de sa famille. Ce qu’il va affronter et subir dépassera l’entendement, en un mot, le mal.
Critique de Satan dans le désert
Très dur à lire, le fond de l’histoire fait froid dans le dos. Une œuvre à la Palahniuk niveau « grand choc », mais sans l’humour de ce dernier. Autant le dire sur le champ, âmes sensibles s’abstenir, ou lire Trois femmes du même auteur. Ce qui est décrit est glauque, bien plus qu’un polar noir, c’est un plongeon dans l’horreur et l’atroce réalité des truands qui naviguent entre les EUA et le Mexique.
L’histoire est basique, et grâce à celle-ci le lecteur suivra le parcours d’un flic qui va remuer ciel et terre pour retrouver son rejeton. Aidé par une toxico qui est autrefois parvenue à s’échapper du ravisseur, le flic va passer dans des lieux et rencontrer des individus tout ce qu’il y a de peu recommandables.
Quant à la forme, rien à dire, c’est sec, précis et sans longueurs. L’auteur décrit ce qu’il faut pour mettre mal à l’aise le lecteur, et ce de manière si naturelle, si crédible qu’on est persuadé, en fermant le livre, que les pratiques que celui-ci décrit existent réellement. Chapitres assez longs, sans l’être excessivement. Pile ce qu’il faut.
Un polar troublant car extrêmement sombre, on n’est plus le même après sa lecture, disons que Le Tigre a pris conscience des limites sans cesse repoussées de la folie humaine, ici superbement racontée.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
La poursuite de l’être cher, raison unique du héros. Ce dernier, en cherchant sa fille, va se dépasser et commettre des actes auxquels rien ne le préparait. On n’est pas vraiment loin du roman d’apprentissage, avec des découvertes de plus en plus terrifiantes, celles-ci renforçant un peu plus Bog. En fait assez proche de Taken, film de Pierre Morel. Sauf que dans ce roman, une fois que le héros réussit, les dégâts sur sa fille annoncent un long travail de réhabilitation. Pas vraiment de happy end, juste tout à reconstruire.
Le mal, le vrai. Le monde souterrain que présente Teran est proprement barbare. Pire que les meurtres ou rites sataniques, c’est la folie de certains personnages et les tortures qu’ils parviennent à imaginer qui ne laissent pas indifférent (dans le mauvais sens du terme hélas). Notamment le méchant principal, Cyrus, dénué de toute morale et au mysticisme passablement pervers. Il est des scènes qu’on n’oublie pas, comme le passage de deux émigrés mexicains : Cyrus se débarrasse de l’un d’entre eux, quant au second il lui fait prendre des drogues afin qu’il souille (encore) plus une victime. Assez choquant.
L’anonymat de l’auteur. Boston Teran est un Américain, qui a passé son enfance dans le Bronx. On ne sait rien de plus, l’auteur étant ce qu’il y a de plus discret. C’est là que c’est déroutant, par ce que ce roman me fait parfois penser à un documentaire tellement c’est précis. Soit Teran a une documentation et une imagination efficaces, soit c’est un (ancien) flic qui en a vu de pas jolies dans son métier, soit (et c’est là qu’on comprendrait l’anonymat encore plus) il fait partie du milieu et se contente de coucher sur papier ce que ses « collègues » lui racontent (si ce n’est pas lui).
En attente de la révélation du personnage donc.
…à rapprocher de :
– Boston Teran a également écrit Discovery Bay, assez sombre et mystérieux.
– Si ça le fait pas, alors Trois femmes, du même auteur, est plus simple et accessible pour le lecteur lambda.
– Les exactions version « Mexique », il y a quelques exemples dans Tsunami mexicain, de Joe R. Lansdale.
– La quête de l’être cher, les horribles rencontres, tout ça en version française, c’est La part des chiens, de Marcus Malte. Sans plus, y’a mieux de cet auteur.
– Les psychopathes sévissant à la frontière mexicaine me font penser au très inquiétant Xavier Bardem dans No country for old men.
Si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.
Ping : Jérémy Fel – Les loups à leur porte | Quand Le Tigre Lit
Yo.
Je reviens vers toi, cher Tigre, parce qu’il faut bien faire du S.A.V. Bon, j’ai acheté ce roman sur la foi du « très sombre » et je dois avouer que j’ai détesté, et c’est rare. Ok, je vais pas faire mon connard mais tout de même, j’ai trouvé ça mal écrit (bon, peut-être en V.O. c’est du Mark Twain, mais ça m’étonnerait), mal pensé (si j’avais eu des couilles, j’aurais écrit ça en première, quand la vie me semblait « trop dure mec »), et surtout surtout (impardonnable) d’une prétention rare, genre « tu veux du glauque, ben voilà, je vais te faire toucher le fond », sauf que, mon pote Boston, lis tes Jim Thompson, tu verras, le mal c’est sec comme un coup de trique, c’est pas de la métaphore pourrie sur la nuit qui tombe. Bref. Dur à finir.
J’adore quand on fait son connard sur du S.A.V., merci de ton retour Bronco. Vraiment. J’avoue que le style n’est pas la qualité première de Teran, et question glauque j’avais pourtant trouvé (à l’époque certes) que ça envoyait du rêve – même si rien à voir avec du Palahniuk ou Self. Dans ce cas, je te déconseille Discovery Bay ou Trois femmes, plus contemplatifs. Donc pires. Concernant Thompson, y’a quelque chose de réjouissant (à mon sens, moins sombre) dans ses œuvres, la date de publication aidant moins à le prendre au sérieux.
En espérant ne pas avoir baissé dans ton estime ^^
Houla, t’inquiète, tu baisseras pas dans mon estime parce qu’on a pas les mêmes goûts 🙂 Sinon, on finirait tous comme des connards d’autoroute à lire les mêmes bouquins en bourrant nos panini de mayonnaise frelatée, hein ? On va pas retourner nos casquettes pour faire des bras de fer débiles comme Sly dans « Over the Top » (1987), non. Lire, c’est déjà beau en soi, on va pas mesurer nos bites, non. A part ça, je me souviens plus, « Florida Road Kill », c’est quelque part sur ton site félinesque, ou j’ai rêvé ? Parce que CA, c’était bien cool. Genre, vraiment cool.
Ping : DodécaTora, Chap.TS : 12 bouquins particulièrement déprimants | Quand Le Tigre Lit
Merci pour la piste de lecture. Je connais pas du tout le mec mais ça a été ajouté presto sur la liste mentale. Je suis arrivé sur cet article via Lansdale, dont j’ai récemment lu L’Arbre à bouteilles, que j’ai trouvé chouette sans que ce soit la révélation non plus. La dernière bonne claque chez Folio policier, si je me souviens bien, c’était Kentucky Straight de Chris Offutt, recueil de nouvelles qui sentent bon l’alcool de contrebande et la chasse au cerf, que je n’ai pas trouvé ici, et qui peut donc éventuellement fournir une piste pour Le Tigre, en guise de modeste remerciement pour son boulot.
Merci BB ! Je mets Kentucky Fried Chicken Straight dans ma PAL, ce sera pour 2014 ! J’adore l’alcool de contrebande, tu ne pouvais pas mieux conseiller.
Et de rien pour le boulot.
Ping : David Gunn – Le Faucheur | Quand Le Tigre Lit
Ping : Les Sutras du Tigre .78 : les écrivains anonymes | Quand Le Tigre Lit
Ping : Kem Nunn – Tijuana Straits | Quand le tigre lit
Ping : Boston Teran – Discovery Bay | Quand le tigre lit
Ping : Jean Teulé – Darling | Quand le tigre lit
Ping : Kem Nunn – Surf City | Quand le tigre lit