Sous-titre : L’homme plage (figurez-vous que je m’en étais légèrement douté). Après s’être fait remonter les bretelles dans un camping, un jeune homme va vivre la transformation de sa vie. Il n’est que vengeance et puissance dans un monde qui a besoin d’une lanterne. Du moins c’était son intention. Pas le grand pied de mon côté, cependant le divertissement reste total.
Il était une fois…
Vacanciers beaufs, petit chiard qui emmerde son monde sur la plage, vigile de supermarché estival, soyez prévenus : y’a Plageman qui va vous enseigner la vie à coup de tatanes dans la gueule. Sauf que notre héros, freluquet et roquet sur les bords, ne dispose d’aucun pouvoir. Et donc se mange branlées sur branlées.
Critique de Plageman
Voilà une bande dessinée sans prétention et qui se prend autant au sérieux que Cheminade à une élection présidentielle. Derrière la déconnade totale des aventures d’un anti-héros dont on ne saura jamais le nom, j’ai néanmoins réussi à dégager trois parties qui renvoient au mythe de certains personnages fantastiques. D’abord, la naissance de Plageman, à savoir l’envie d’en découdre associée à une idée de grand champion : foutre un ballon de plage sur la gueule – erreur funeste, celui-ci restera collé au visage du malheureux.
Ensuite, le temps des difficultés, à savoir les tentatives aussi répétées que foirées du personnage de faire régner sa loi. Hélas, le mois d’aout passe bien vite (malgré les gnons pris), mais la fin des vacances n’arrêtera pas notre Plageman tout à coup affublé de son comparse Pennak, clochard ventripotent qui l’a suivi depuis le bar. Mais comment survivre à l’hiver sur la plage ? Enfin, à l’approche du printemps, l’auteur s’éparpille dans un joyeux foutoir fait de chasse à la caille qui termine en soirée de la lose dans un nightclub, de rencontres avec le XV de France ou trois ados à peine matures – dans tous les cas, Plageman se prendra une solide rouste.
Au-delà d’un scénario et de gags plus que satisfaisants avec petits jeux/devinettes assez fandards (le quatrième mur est régulièrement franchi), il fut difficile pour le félin d’en dire autant côté dessins. Guillaume Bouzard a eu la main leste et n’a point cherché à faire dans la finesse : noir et blanc qui tâche, respect approximatif des proportions, personnages veules et exagérés, les postures sont ici plus importantes que le mouvement. Prenez une carte postale de vacances, et tentez d’imaginer son contraire : voilà pour les illustrations.
J’exagère un poil dans la mesure où l’auteur a surtout délivré un nombre incroyable de clins d’œil à destination des comics américains ou, plus généralement, de la culture cinématographique faite de répliques à la Godard (qui tombent à côté de la plaque) ou de péripéties plus proches des Bronzés que de Batman. Sans compter que ces aventures, publiées dès le milieu des années 90 dans la revue Jade, ne permettaient pas à Bouz’ d’avoir une vue d’ensemble sur ce que son personnage allait devenir. Bref, c’est bête mais généreux, court et frustrant, et le résultat se laisse largement découvrir.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Vous avez aussi capté, Plageman est l’exact opposé d’un héros. Du coup, Bouzard joue énormément sur cet antagonisme. En vrac : les opposants le font voltiger, la cape ne servant strictement à rien ; la malédiction de celui qui ne peut quitter son costume (ici par défaut sinon la moitié de la gueule partirait avec) ; l’ami fidèle que le mentor doit former malgré lui ; le courage qui ici confine à la stupidité du chihuahua s’attaquant à des bergers allemands, etc. Plus que tout, l’Homme Plage part en croisade contre vous et moi, à savoir le vacancier qui est tout ce qu’il y a de plus normal. Et c’est peut-être dans ce travers qu’il est un super-héros : il fait chier le commun des mortels qui ne demande qu’à vivre en paix.
En fin de compte, notre ami ne fait pas que rire, il inspire quand même la pitié. Je ne parle pas de son ridicule masque dont il ne peut se départir, mais de la marginalité (propre à tout superhéros) dont la logique est ici présentée sans fard : Plageman se les pèle en hiver, il n’a rien à becter et est malade comme un chien. Seule l’amitié sincère avec Pennak (pourquoi je pense toujours au compagnon d’Alix ??) aurait pu lui réchauffer le cœur. Néanmoins, la relation est loin d’être celle que s’imaginait le protagoniste principal, entre suspicions réciproques, rudoiements excessifs ou encore une ébauche d’homosexualité un peu refoulée – ça aurait pu devenir intéressant à ce moment, dommage que ça n’aille pas plus loin.
Un héros sans revenus où la réalité se rappelle à son bon souvenir, c’est toujours triste.
…à rapprocher de :
– Les aventures du gus m’ont plus d’une fois rappelé ce bon vieux Gotlib avec ses Rubriques à brac et autres joyeusetés.
– Y’a une suite. Je me tâte la raie pour me la procurer.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce truc en ligne ici.
Ping : Powerwolf – Out In The Fields – @radioblogueurs « Traqueur Stellaire
Ping : Powerwof – Out In The Fields – @radioblogueurs « Traqueur Stellaire