VO : idem. Roman original, déroutant et qui ne se laisse que difficilement apprivoiser. En un mot, baroque. En suivant un espion asiatique de treize ans brièvement infiltré (avec ses complices) dans des familles américaines, c’est à la fois l’excès des États-Unis et l’art du quiproquo qui sont mis en lumière. Au risque de perdre Le Tigre avec un style limite imbitable.
Il était une fois…
Pygmy, agent numéro 67 provenant d’un pays qu’on devine du style de la Corée du Nord, est un espion de première bourre aux savoirs terrifiants. Lui et quelques-un de ces camarades sont envoyés, dans le cadre d’un programme d’échange, vers le trou du cul de l’Amérique. Mais pourquoi une telle infiltration ? Seulement en vue de commettre un attentat terroriste de grande envergure sur le territoire du grand Satan. Bien évidemment rien ne se passera comme prévu.
Critique de Pygmy
Il est pour Le Tigre délicat d’aborder, en critique, ce roman. C’est la première fois que la chose suivante m’est arrivée : j’ai acheté la version française de l’œuvre, traduite par Cohen. Près de 400 pages qui annonçaient du lourd, toutefois y’a eu comme un lézard. En effet, je n’ai pu dépasser le premier quart. Chuck P. a opté pour un « petit nègre » qui oscille entre viol aggravé de la grammaire la plus élémentaire et orthographe phonétique absolument dégueulasse.
Pourtant j’ai décelé, comme souvent chez cet auteur, le génie d’une histoire désopilante. Pygmy se décompose en deux narrations. D’une part, le héros délivre, dans un style militaire, son évolution dans la famille amerloque. Les noms de code donnés sont irrévérencieux au possible (mère-poule, père-vache, sœur-chat, cochon-chien-frère, etc.) tandis que son acte de tuerie se prépare tranquillement.
D’autre part, cet individu a quelques flashbacks de son entraînement (sa formation plutôt) au pays. Prenez le pire internat catholique, ajoutez-y des bérets verts et une école de kung-fu, vous serez très loin de l’enfance de Pygmy. Une vraie arme de destruction massive, y compris vis-à-vis du lecteur obligé de lire à voix haute des passages entiers pour comprendre de quoi il retourne. Au bout de six chapitres, c’est désespérant.
Du coup, j’ai refermé la VF et me suis procuré le titre en anglais. Et là, magie ! Toutes les expressions du jeune protagoniste ont pris corps dans mon esprit, comme si le rythme de la langue de Shakespeare s’épanouissait mieux dans le cerveau tigresque qui a presque décelé de la splendeur dans les formulations variées d’un individu qui a fait ce qu’il peut avec une langue étrangère. Au final, j’ai dévoré la version américaine en une petite journée.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
L’Occident en prend joyeusement pour son grade dans cet opus. Au travers des yeux de Pygmy, l’Amérique n’est qu’un ramassis d’incultes incapables et surmédicalisés. Faut dire que la famille où il débarque en tient une épaisse couche. Quant à la notion de démocratie, il suffit de voir la simulation de l’ONU avec les élèves locaux pour deviner le triste sort que l’oncle Sam réserve à cette institution.
Ne vous inquiétez pas, l’auteur tire quelques scuds en direction d’un Orient impitoyable et intolérant. Un monde où la hiérarchie prime et tend à écraser toute initiative ou individu ne rentrant pas dans le moule idéologique de l’État. Par exemple, le pygmée se souvient d’un autre enfant-soldat (il n’est pas d’autres termes) se débrouillant particulièrement bien. Trop même, après une démo de free fight l’enfant est froidement abattu devant ses amis.
Au final, le décalage entre les cultures est trop grand, et les intentions de chaque bord ne seront jamais comprises par l’autre. Un exemple simple : le petit agent secret, pour protéger le frère d’une brute, tabasse cette dernière et en profite pour la violer. Sauf que ça ne fait que révéler l’homosexualité du lourdaud qui tombe amoureux de l’Asiate. « L’agent 67 » a beau parler de syndrome de Stockholm, rien n’y fait. Et c’est ainsi que le héros, malgré lui, sauvera des dizaines d’étudiants alors que ceux-ci devaient être au centre de l’attentat.
…à rapprocher de :
– L’auteur est avant tout connu pour Fight Club (que je me dois de résumer) et sa suite sous forme de BD (en lien) avec Cameron Steward.
– De Chuck Palahniuk, vous préférez A l’estomac, Journal intime, Choke, Berceuse ou encore Peste (narration originale également). Y’en a beaucoup sur ce blog, faites-vous plaisir.
– Le vocabulaire « enfantin » n’est pas sans rappeler La vie de ma mère !, de Thierry Jonquet.
Enfin, si votre librairies est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici (grand format, en français).
Ping : Chuck Palahniuk – Survivant | Quand Le Tigre Lit
Ping : Palahniuk & Steward – Fight Club 2 | Quand Le Tigre Lit
Ping : Chuck Palahniuk – Tell All | Quand Le Tigre Lit
Ce n’est plus du matraquage, c’est du lavage de cerveau!
Il va bien falloir que je me décide a en lire du Chuck… Donc mieux en anglais qu’en français? Pour tous?
Ah oui, une douzaine de Chuck dans ma biblio. Et encore, fin 2013 il n’y a pas encore Fight Club !
Pour la lecture, cela dépend du niveau d’anglais. Il utilise parfois un vocabulaire truculent, ce qui m’a perdu plus d’une fois. Les traductions sont correctes, essaie par exemple « Survivant » ou « Berceuse », ils sont relativement courts.
Ping : Chuck Palahniuk – À l’estomac | Quand Le Tigre Lit