Trouvé par hasard dans une vieille cave moisie à côté de deux Jéroboam de Veuve Cliquot. J’ai donc potassé par curiosité cet antique illustré, pas plus. Style lourd et laborieux, illustrations de basse extraction qui fatiguent les yeux, jeux de mots foireux à tous les étages, la satire politique n’est pas à l’honneur.
Il était une fois…
Nous sommes en 1678, et sur l’océan atlantique c’est un joli foutoir : une guère sourde a lieu à cause d’une cargaison de rhum que le capitaine Raymond Jean-Barre embarque en vue de renflouer la société V.G.E. (Very Good Enterprise). Sauf que cette cargaison attire bien des convoitises. En effet, le capitaine Marchains-deux-dents (accompagné de son second Seguiliguili et de sa maîtresse Sheila Lutte-finale) est bien décidé à taper dans les réserves du gros Babar. Et que dire de François L’Ermite-Errant qui veut sa part du gâteau, du vaisseau Pire-Nana tenu de main de fer par Simone Veille-au-grain, ou encore du jeune corsaire Chirackham qui entre dans la danse ?
Critiques de Tous les chemins mènent au rhum
Après le pseudo-succès d’une émission parodique sur la politique qui reprend les codes de la course solitaire transatlantique, Collaro a eu l’ingénieuse idée de tirer la pompe à fric et d’en faire une bande dessinée. Merdum calamitumque.
L’histoire est désolante, je n’ai absolument rien capté aux péripéties. En même temps, faire le rapprochement avec des évènements datant du milieu des seventies n’est pas aisé et les retournements de situation semblent avoir été très exagérés. Pour tout dire, ça part dans tous les sens et dès la dixième page j’ai été largué. Si vous rajoutez les nombreux calembours (cf. infra) et bons mots qui amusent au début, il appert que ça devient vite insupportable.
Insoutenable, c’est aussi la mise en images qui a été bâclée. Couleurs criardes, personnages grossiers qui trop souvent se roulent par terre pour rire (en tapant des poings sur le sol, très important ça), pas une seule phrase qui ne se termine pas par un point d’exclamation, bref c’est franchouillard-bas-de-gamme et pas fin pour un sou. Je ne sais pas qui sont derrière Match3 Studio, mais je ne leur confierai pas la charte graphique de mon blog.
Au final, une BD que je n’hésite pas à qualifier de nullisime, en même temps en faire un billet n’est pas forcément utile. Même en 1979, les éditeurs osaient sortir des trucs comiques mal dégrossis juste pour surfer sur la vague de l’actualité. Pour ma part, je n’ai pas encore vue la couleur des planches sises après la page 25.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Je ne sais pas vraiment l’intention de l’auteur, mais le macaron bleu de la BD fait état des « z’héros du feuilleton d’Europe1 ». Une émission devait avoir lieu à la fin des années 70 et qui se faisait plaisir à dénoncer le pitoyable spectacle de la politique. Tous les chemins mènent au rhum reste bien dans la lignée d’un Guy Debord et de sa « société du spectacle ». S’il faut convenir que transformer nos zéros en brigands des mers reste une excellente idée, celle-ci a été hélas sauvagement torpillée par le ratage tant au niveau des scénar’ que des illustrations.
Définitivement un thème, à vous de voir si c’est un bon point ou non, j’ai nommé les nombreux calembours. Trop, c’est trop. Florilèges : eau de javel pour Jean-Barre (du Barre-Javel, arf) ; arrête ton char, Dassault ; le mousse allemand Helmut Schmitt qui me sert (Messerschmitt) ; ce n’est qu’une histoire d’eau. Dernier exemple : à Deferre, Marchais sort un « soit pas dépité, débouche du Rhum ! », car il était député des Bouches-du-Rhône (merci à la note de bas de page, je n’aurais pas saisi sans ça).
…à rapprocher de :
– Très franchement, sur la satire politique, et dans la même époque, j’ai nettement préféré Le songe d’Atthalie, de Louis Le Mutin . Que des trucs de grands-pères en somme. Bien plus sympa qu’Executive woman, de Veyron – à éviter, ce dernier.
– Dans un esprit polar franchouillard bien déguaulasse comme il faut, il y a Olé ! San-Antonio, bande dessinée qui pique les yeux.
Ping : Martin Veyron – Executive Woman | Quand Le Tigre Lit
Ping : San-Antonio & Desclez – Olé ! San-Antonio | Quand Le Tigre Lit
Ping : Louis Le Mutin – Le songe d’Atthalie | Quand Le Tigre Lit
😉 merci, ça va aller… Au vu de la chronique, je pense qu’on peut l’éviter.
Pas très fan de collaro et de ses calembours qu’un San Antonio en petite forme n’oserait pas faire.
mais attention, il est peut être coté (on peut rêver…)
félinement vôtre
Le rapprocher de Guy Debord: un peu dur avec Debord, non?
Cela dit, je crois que ça va être coton de le trouver; sauf peut être dans une brocante. Qui sait?
Félinement vôtre
Je voulais surtout faire péter une référence au-dessus des pâquerettes, j’ai cogité toute une nuit pour ça…
Si vous voulez acquérir cette engeance dessinée, je peux vous la faire parvenir (sous réserve que celle-ci ne soit pas cotée bien évidemment).
Amitiés tigresques
Dans un genre un peu similaire (tendance jeux de mots laids ©Bobby Lapointe, mais moins nombreux et moins pompiers, encore que cela reste à prouver, les personnages s’appelant Astra Khan (secrétaire de l’ONU), Polly Esther … à la questions « à quelle distance sommes-nous de Vannes ? » la désopilante réponse « il y a six gares de là à Vannes … aussi est-il interdit de fumer » …), il y a « La Langouste ne passera pas » de Jean Yanne et Tito Topin (créateur de Navarro, mais est-ce une référence positive ?). Sorti en 1969 et assez psychédélique graphiquement parlant, douleur oculaire garantie.
Tiens, ça fait longtemps U Mulateru ! Merci pour le « plan » BD, je vais laisser mon cerveau se reposer après cette violente agression (je suis en train de m’occuper de Zep en plus, le point de rupture n’est pas loin). Amitiés félines
Le Tigre aime visiblement se faire souffrir. Les fameuses tendances masochistes du Tigre…
Vous commencez à ne me connaître que trop bien…
Attendre du « fin » de Collaro et consorts … heu … comment dire … Suis aussi catastrophée par ce que je découvre. Et j’ai pourtant vécu cette période. Mais je n’écoutais (déjà) pas Europe 1. Constante semble-t-il : le panier de crabes politique et ses magouilles. Le changement, c’est quand déjà ?
Vous parlez de quel banier de crabes ? [je n’ai pas vu la pièce de théâtre éponyme]