Les Artistes Fous s’attaquent à l’humour pipi-caca-vomi, mais avec une certaine classe. Ce premier opus des contes marron (au singulier, la couleur marron étant invariable), un peu trop court à mon sens, offre quelques beaux spécimens d’humour tendre et déjanté sur un sujet où tomber dans le graveleux aurait été facile. Bref, un titre à lire dans les WC.
Il était une fois…
Le lecteur commencera avec le court et mignon L’odeur des légendes, de Nelly Chadour : un vieillard, sous l’emprise de l’alcool, livre la vérité sur une vieille légende au sujet d’un esclave et sa femme contre un chasseur envoyé par le maître mécontent.
Ensuite, Corvis imagine, dans Monde de merde, un dieu soucieux transformant toute arme en déjections. Sauf que la tâche est plus complexe qu’initialement prévue.
Puis vient Mon ami Olfa, long texte touchant de Gallinacé Ardent. Improbable amitié entre un homme et son vomi, ce dernier étant d’une abyssale culture.
Quant à Monsieur Léonard décrit par Herr Mad Doktor dans le Ca(ca)pitalisme, (les jeux de mots sont légion avec cet auteur), son invention de Cacamobile© est belle sur le papier (cul), toutefois les autres ne semblent pas partager son enthousiasme.
Enfin, Vinze nous offre, avec Vol au-dessus d’un lit de caca, un amour d’une rare scatologie aussi bref qu’intense entre une infirmière et un soldat blessé.
Le digestif d’à peine deux pages est signé Gallinacé Ardent (encore). La Nuit est un exercice de style sur un mec qui va simplement pisser dehors. Pas mal pour clore le débat.
Critique des Contes marron
Voici ce que Le Tigre a reçu, comme dédicace, en recevant ce court recueil. En demandant quelque chose de dégueulasse, je ne pensais pas qu’ils oseraient autant conchier l’institution tigresque. Le dessin est tout simplement superbe, comment dire du mal de l’ouvrage du coup ?
Passons à la critique : sur les cinq nouvelles, la première et la troisième sont décidément mes préférées (désolé pour les autres). C’est rieur, fin et l’intrigue se révèle sacrément étonnante eu égard au nombre de pages. Dans tous les cas, on sent que les auteurs se sont creusés le ciboulot pour aborder le noble thème des expulsions corporelles avec originalité et en soignant le style. Il fallait mieux, sinon les lecteurs leurs tomberaient violemment sur le râble.
En conclusion, voilà une centaine de pages qui se lira à vitesse grand V. Le format poche est une bonne idée, toutefois je me suis senti plutôt floué de n’avoir eu qu’une demi-douzaine de textes. En annonçant « volume 1 », il faut croire que des suites sont prévues. Toutefois, pourquoi ne pas rester sur le format habituel et pondre, d’un seul coup, une vingtaine de nouvelles ? Seule explication : Les Artistes Fous devaient avoir la taupe au guichet, et n’ont pas pu attendre.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Non seulement les auteurs ont su ne pas verser dans le trash gratuit, mais certains ont su présenter les « produits » corporels peu ragoutants comme ayant une utilité certaine. L’Odeur des légendes explique comment concevoir un piège humiliant. Ailleurs, Francis a un ami-vomi Olfa, et se faire démanger permet à ce dernier d’apparaître, comme un génie, pour aider le jeune homme dans les étapes de sa vie (au prix d’une santé déclinante). Et que dire de Leonard qui conçoit un véhicule roulant grâce à de la merde ?
On retrouve ainsi l’idée, reprise dans la préface, selon laquelle il ne faut pas juger tout ce qui sort de nos orifices comme étant tabous. Mieux, ce n’est pas sale, et produire de la littérature à dans le genre des Contes marron est un modeste hommage aux 250 jours qu’un homme passe, dans sa vie, dans les WC. En outre, la merde apparaît comme un dénominateur commun assez satisfaisant qui rappelle que les hommes, chefs d’État ou esclaves, sont tous assis sur le même trône (oh, je la note cette phrase).
…à rapprocher de :
– De cet éditeur doux-dingue, vous pouvez dévorer quelques nouvelles de Fin[s] du monde, assez inégal. La suite, intitulée Sales Bêtes !, est d’une rare qualité, ça m’a profondément ravi. Puis Folie(s) est globalement correct. Quant aux Contes roses, petite déception (à la différence du premier opus des Contes Rouges). Même topo avec L’Homme de demain, mitigé.
– Quant au texte de Corvis, l’auteur rappelle que celui-ci est tiré d’une planche de Franquin dans l’indispensable album Idées noires. En poussant la logique de Franquin jusqu’au bout, on voit bien que ça cloche dans les grandes largeurs.
– Pour les « bouquins de merde », j’avais déjà évoqué ceux à lire aux chiottes ici.
Enfin, si vous souhaitez juger de la chose par vous-même, c’est disponible sur le site de l’asso (en lien). Soyez prudent si vous demandez une dédicace…
Ping : Collectif – Les contes Rouges, Vol.1 | Quand Le Tigre Lit
Ping : Collectif – L’Homme de demain | Quand Le Tigre Lit
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Ping : Collectif – Folie(s) | Quand Le Tigre Lit
Ping : Collectif – Les Contes Marron, Vol.1 | Qu...
Un livre à chier qui comblera son lecteur voilà un paradoxe de merde !
Typiquement le genre de bouquin qui m’attire, à voir de plus près.
Ps: certains lecteurs assidus passent largement plus de 250 jours dans leur vie aux WC.
Prenez contact avec eux, c’est une association à but non lucratif, juste festif. Après, pour 5€, vous serez en droit de demander une dédicace et que le trésorier de la maison vous offre un verre.
Merci Tigrou !
Pour répondre à ta question sur la longueur du bouquin…
On n’a pas fait plus long pour 3 raisons :
– le budget ! (le nerf de la guerre même en matière de caca)
– la volonté de faire une collection de mini-bouquins à petits prix
– la peur de lasser le lecteur
Vu le succès du Volume 1, on envisage d’autres volumes (j’ai personnellement un paquet d’histoires de m… en stock ! M. Léonard will be back !)
T’es le meilleur ! T’inquiète pas, mes colombins étaient plutôt courts au début, puis j’ai réussi des perfects somptueusement enroulés sur eux-mêmes. Question d’entrainement.
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