VO : D.C. Noir. Une belle poignée de textes, du noir pur jus et de la tristesse, des descriptions offrant une immersion totale dans une ville méconnue (du Tigre en tout cas), une certaine homogénéité de style (le cahier des charges devait être stricte), bref une capitale dépouillée de ses ors et scannée sous le noble angle du polar. On en redemande.
Il était une fois…
Une quinzaine (seize en comptant celui de Georgie) de nouvelles sont reproduites dans ce roman qui est subdivisé en quatre thèmes : D.C. dévoilée, rues et ruelles, flics et voleurs, la Colline [c’est à dire le Capitole, le pouvoir] et ses frontières. Tout cela sélectionné par le bon George Pelecanos, Washingtonien émérite qui, en plus d’être écrivain, aide pas mal de producteurs dans leurs séries policières (notamment The Wire, qui reste une des séries préférées du Tigre, avec Oz).
Critique de Washington noir
Pas facile de s’occuper d’un tel condensé de textes, surtout lorsque certains sont excellents et d’autres un peu mois bons (notamment le premier, celui de Georges Pelecanos en personne, qui semble avoir fait le minimum syndical). En moins de 280 pages il y a pourtant matière à parler.
Les mini œuvres proposées sont relativement courtes et c’est on ne peut plus éclectique : il y a du très bon (cf. infra) comme de l’ennuyeux (A l’est du soleil, de Howard par exemple) ; du roman d’enquête comme une tranche de vie (plus ou moins sordide) d’un simple citoyen ; des histoires se terminant de manière réjouissante (le gentil triomphe) comme d’autres qui font la nique au happy end, etc.
15 à 20 pages par scène, on peut piocher ici et là une nouvelle, puis y retourner plus tard. Si le découpage en quatre thèmes ne m’a pas paru totalement pertinent, au moins la carte de Washington fournie (dans les premières pages) permet de se faire une idée de la typologie de l’endroit et décider dans quel quartier le lecteur souhaitera découvrir une aventure.
En conclusion, un bouquin qui remplit largement son office, surtout avec quelques titres phares qui ont régalé Le Tigre : La Ruelle de Salomon (poétique et surprenante), Froid comme la glace (sur la notion d’un héros moderne, avec un dénouement final jouissif), Le pourboire (un serveur aux prises avec une infâme clientèle) et Le pigeon (immensément pessimiste et choquant).
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
On en apprend énormément sur la « faune », la populace du district fédéral. Il faut savoir que Washington est le seul État à ne pas avoir de représentant au Congrès, aussi les politiciens de cette ville ne sont souvent « que de passage » pour supporter leurs régions, et se foutent royalement de l’état de la capitale et de ses habitants. Et il y a de tout dans cette ville, que ce soit des délinquants afro-américains (du style Chicago ou Détroit) ou des flics marrons (avec leurs indics) comme on en rencontre à L.A. avec l’écrivain James Ellroy, en passant par les politiciens corrompus. Y’a même une prostituée venant d’Europe de l’Est (ce texte reste le plus violent à mon sens). Certaines zones (le Sud-est ou le Nord-ouest) ressemblent à de petites cours des miracles.
Washington, à l’image des États-Unis, est une ville par certains aspects impitoyable. La criminalité y paraît omniprésente, et gare au témoin accidentel ou au petit businessman qui n’est pas dans les petits papiers de la pègre. La plupart de ces nouvelles présentent un homme seul, face aux puissants (légitimes ou non) et tentant de modestement survivre. Et souvent le moyen de s’en tirer (et pas les deux pieds devants) est de cacher son jeu, surveiller ses arrières. Pas comme le pigeon du dernier texte éponyme qui a foncé bille en tête dans quelque chose qui le dépasse. Il finira comme l’image du rêve américain termine chez beaucoup (notamment le vieux juif rescapé des camps qui tient sa boutique). C’est-à-dire brisé.
…à rapprocher de :
– L’éditeur Asphalte s’est fait plaisir en prenant les meilleurs textes relatifs à une capitale (Paris, Londres, L.A., Marseille – présenté par Fabre –, etc.) en vue d’un noir recueil. Dès que ça sort en poche je me jette dessus.
Enfin, si votre libraire de quartier est fermé, vous pouvez trouver ce titre en ligne ici.
Ping : Collectif – Marseille Noir | Quand Le Tigre Lit
De cette série de livres, j’ai Mexico Noir (en version poche), acheté complètement par hasard (j’étais parti perdre un peu de temps à la Fnac) et qui contient aussi quelques textes excellents. Cela dit, l’une des meilleures parties de ce livre reste l’introduction, qui présente de véritables histoires sur la criminalité à Mexico, dont certaines sont absolument glaçantes.
Mais du coup, si toute la série est bonne, je vais sans doute me laisser pour les autres.
Noté. Le problème est que dans ces grands magasins il n’y a pas de gondoles « recueils de nouvelles policière ». On les trouve au petit bonheur la chance.