« C’est quoi ce bordel, un dessin qui n’a aucun rapport avec un livre ? ». Cher lecteur, un peu d’empathie : un film qui parle de deux frères tigres, je ne pouvais rester indifférent à une telle œuvre ! Et puis le gribouillage en question reste sur un sujet livresque.
Deux frères, c’est l’histoire de deux tigres (forcément kawaï) séparés à la naissance. L’un officie chez un notable local, l’autre est employé dans un cirque. Le tout se passe dans le Cambodge colonisé des années 20, avec ses paysages oniriques, notamment le temple où vivait l’heureuse tiger family avant que de vilains humains ne débarquent tout saccager. Hélas je n’ai pas pu voir le film jusqu’à la fin, malgré ces majestueux animaux j’ai baillé plus d’une fois.
Quant au dessin, celui-ci traite de la difficulté, une fois élevé dans la jungle, de retourner à ce qu’on appelle la « civilisation ». Inversion totale des rôles, l’état sauvage (en particulier chasser le livre) étant ici une délicieuse zone de liberté littéraire où les livres poussent naturellement sur de magnifiques arbres : certain sont grands et malades (un mégastore au hasard, la FNAC bientôt), d’autres sont d’apparence plus robuste et proposent une grande variété de savoureux mets.
Le but, à terme, étant bien sûr d’avoir sa propre plantation. Contrairement à la vision relativement pessimiste de cette iconographie, ne pas avoir fréquenté de librairies dans sa jeunesse (et même pendant des décennies) ne fait pas de vous un individu peu porté sur la littérature. Il est toujours possible de trouver ce qui est susceptible de nous plaire, et si vous trouvez le temps (ce blog peut vous y aider) de lire, votre liste de romans lus peut s’allonger aussi sûrement que le déficit public de la France. Le temps perdu se rattrape toujours, oserai-je dire.
A titre d’exemple personnel, je me suis botté le derrière à lire sans arrêt qu’à partir de mes vingt ans : cinq ans après j’étais considéré comme un insondable puits de références littéraires et commençais à être invité dans les plus prestigieux dîners du gotha afin de dispenser mon savoir comme Raspoutine ses coups de rein. Ou l’inverse…