Acheté sans grande conviction, en fait j’avais tort : très bon polar avec plusieurs protagonistes plus vrais que nature. Flics marrons, considérations politiciennes, le constat n’est pas tendre. Pas un chef d’œuvre certes, mais presque une étude sociologique sur le malaise de la police française (voire de la société) au début de ce siècle.
Il était une fois…
Été 2005, Panteuil, banlieue nord parisienne, c’est l’effervescence : une ambitieuse commissaire de police proche du ministre de l’intérieur ; la BAC de nuit avec à son bord quelques vilains macs ; deux jeunes flics qui débarquent dans le circuit ; une agent des RG ; quelques sauvageons ; un squat surpeuplé de familles africaines,… Si vous balancez dans l’environnement l’incendie criminel dudit squat et de menues bavures, l’explosion n’est pas loin.
Critique de Bien connu des services de police
Le Tigre a lu peu de titres de la part de Manotti, écrivaine engagée politiquement plutôt à gauche. Du coup je craignais que cet opus prenne la forme d’un brûlot gauchisant (ou du moins un long trac) qui dénonce la politique du « tout sécuritaire » de l’ère de Nicolas S. Ce dernier n’est jamais nommé bien sûr, comme d’autres (exemple de l’hebdo satirique du mercredi, dont l’article est hélas mal rendu). Mais c’est oublier les talents de conteuse de Dominique.
Indeed, le scénario est assez bien ficelé (comme je l’ai résumé) avec différents intervenants dans une ville où les intérêts immobiliers flirtent avec la grande criminalité. Le tout sous couvert d’actes de la part d’éléments proches de l’extrême-droite. L’écriture, simple avec quelques effets de style de la part de l’auteur (répétitions de mots, flashbacks ici et là), ne déplace pas des montagnes. Mais avec 240 pages ce n’est pas vraiment ce qu’attendait Le Tigre.
Alors on peut dénoncer le fait que certains individus sont des caricatures (cf. infra), notoirement racistes et au lever du coude bien rôdé. A part les deux petits jeunes, forcément naïfs et qui ont du mal à entrer dans le moule, que des myster Hyde de seconde zone. Bref, un titre qui donne envie de lire les autres titres de l’auteure (ça passe le « e » ?)
Thèmes développés (du moins selon Le Tigre)
Les égarements des brebis galeuses (dixit un proc’ dans le roman) de la police nationale. Le début du roman n’est pas sans rappeler celui du film 36, quai des orfèvres. On y voit trois individus que j’imaginais, par leurs comportements, être des maquereaux. Ça prend de la thune aux prostituées, un des gus sodomise une des filles, que de la classe. En fait non, c’est juste la brigade anti-crim’ de nuit. Sympathique. La commissaire qui laisse un incendie se déclencher, le procureur et sa langue de bois bien lissée, les gardiens de la paix qui cachent d’horribles bavures (même à l’encontre d’un des leurs), les soirées fortement alcoolisées, le tableau est impitoyable.
La même police version Sarkozy. Dominique M. profite de son roman pour taper consciencieusement sur les résultats de la politique des chiffres du ministre de l’époque. Prendre moins de plaintes qui ont peu de chance d’aboutir (avec des conséquences parfois tragiques) ou faire son petit quota d’arrestations quitte à déformer les faits, le réalisme de ces situations (exagérées ? Je ne me prononce pas) fait froid dans le dos.
…à rapprocher de :
– De Manotti, il y a Le corps noir. Même immersion, mais dans les cercles collaborationnistes en France avant la libération de Paris.
– A tout hasard, un autre auteur a voulu se la jouer « immersion dans le monde merveilleux de la police ». Sauf que Tromper la mort de Maryse Rivière est dispensable.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez ici trouver ce roman en ligne ici.
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