Sous-titre : une aventure d’Astérix le Gaulois. Quand le petit moustachu et son gros copain prennent une petite barque pour titiller la poiscaille, le vent les amène directement à New-York City (sans la City) – que des gentillets Normands s’apprêtent à accoster. A peine téléscopé. Un ouvrage parsemé de délicieuses références qui fera plaisir tant aux plus jeunes qu’aux vieux cons.
Il était une fois…
Le village se fout sur la gueule, comme d’habitude, au sujet du poisson d’Ordralphabetix. Sauf que ça peut poser problème dans la mesure où faire de la potion magique requiert du poisson frais – à se demander quel ingrédient n’entre pas dedans. Du coup, nos deux héros et demi décident de prendre le large avec un filet à pêche, mais se perdent en haute mer. Jusqu’à ce qu’ils atteignent un mystérieux continent avec des sangliers qui font glouglou et des hommes se peinturlurant la gueule…
Critique de La Grande Traversée
Voilà un Astérix comme je les aime : ça commence dans le village, voyage autour du monde, et revient dans le même lieu qui n’a pas bougé d’un poil. Aventure décomplexée par une crédibilité avoisinant le néant, nombreux gags qui ont ravi Le Tigre par leurs divers degrés de finesse, tout ceci avec un rythme exceptionnel, que demander de plus ?
En effet, les deux Gaulois et leur cabot voient du pays. Et pas n’importe lequel puisqu’ils taperont la discute avec des Amérindiens dubitatifs, lesquels seront forcément admiratifs de leurs capacités (se battre, chasser, danser, etc.) à un tel point que :
1/ Obélix est pressenti pour épousailler la grosse fille du chef
2/ une peinture sur toile est mise en place en leur honneur, et
3/ un totem est dressé en leur effigie. Quand les Français débarquent aux States, ils ne laissent guère indifférents.
Mais comment revenir au bercail ? Par un scandaleux tour de passe-passe, il se trouve qu’un bateau arborant l’étendard Viking débarque dans la zone. Nos deux amis en profitent alors pour s’y faufiler, quitte à être détenus en captivité en tant qu’autochtones. Hélas, il ne faudra pas longtemps aux fiers hommes du Nord pour découvrir que ce ne sont que d’insipides Gaulois, lesquels pourront à nouveau filer à l’anglaise (z’ont une veine de cocu) vers leur village.
Cet album présente une certaine nervosité narrative où les péripéties et saisons s’enchaînent à vitesse grand V. Les illustrations, classiques et dotées de nombreuses références (cf. infra), prennent pour une fois en compte la barrière de la langue : si le langage Viking reste imbitable pour nos héros, c’est en raison des quelques barres qui traversent les lettres (rien que les noms Zøødvinsen ou Kerøzen annoncent la couleur), difficulté qu’heureusement ne connaissent pas les chiens. Curieusement, les Indiens ne parlent pas. Voilà qui est plus simple.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Cet opus fait la part belle à l’idée selon les Vikings auraient été les premiers Européens à découvrir l’Amérique. Bon, le félin ne s’y connaît guère dans ce domaine, et il semblerait que les auteurs ont, par une subtile pichenette intellectuelle, avoué leur neutralité : premier pied posé ou pas, les Vikings n’en avaient rien à foutre de coloniser l’endroit, seules la ripaille et les bonnes batailles les intéressant. Au surplus, les deux individus qu’ils emmèneront avec eux n’ont rien d’exotique, aussi le récit du capitaine du vaisseau ne vaut pas tripette. Sans compter que la propension du peuple Viking aurait consisté à plutôt se diriger au nord du Canada actuel, ce qui ne correspond guère à la campagne verdoyante et ensoleillée où se trouve Astérix – on bascule vite de l’été à l’hiver.
Enfin, si les États-Unis ne sont jamais cités, les clins d’œil au devenir de l’Amérique sont délicieusement grossiers – Indiens qui voient les cinquante étoiles du drapeau américain ou celles de l’USAF quand ils sont sonnés ; voire (point d’orgue) Astérix grimé en statue de la Liberté. Sauf que les Gaulois ne se comportent pas comme de vulgaires colonisateurs : certes ils ne sont même pas arrivés depuis dix minutes qu’ils ont déjà bouffé deux dindons et un ours. Mais quand leur potion magique leur permet d’épater la galerie, ils n’en demeurent pas moins dépourvus de toute curiosité (putain mais ils foulent une terra incognita), pensant même avoir affaire à des Ibères. Le Gaulois, colonisé par les Romains, ne prendrait donc pas sa revanche ailleurs ?
…à rapprocher de :
– Sur le blog traînent également (par ordre de publication) : Le Devin (ça passe) ; le très frais Astérix en Corse ; le minable Astérix et Latraviata ; Le Papyrus de César (ça aurait pu être pire).
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver cette BD en ligne ici.
Ping : Goscinny & Uderzo – Le Devin | Quand Le Tigre Lit
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