Sous-titre : Les Aventures de Tintin et Milou. Un inquiétant poison qui rend fou, une fumerie d’opium qui abrite des activités encore moins reluisantes, les Japonais qui créent des incidents de toute pièce pour envahir la Chine, et surtout la fameuse rencontre avec Chang – rhââaa lovely. Pour ma modeste part, c’est loin d’être mon préféré.
Il était une fois…
Après la balade de Tintin au cours duquel il a fumé quelques cigarillos égyptiens, le héros à la houpette se repose chez un maharadja. Lors d’une démonstration avec le fakir Cipaçalouvishni (oui, j’ai la BD sur les genoux en ce moment), ce dernier conte la bonne aventure au blondinet. En fait, il le spoile comme un vieil empafé : un homme redoutable qui n’a pas été mort (Rasta…) cherche sa perte, et un jaune à lunettes lui en veut également. Tintin décide alors de partir vers Shanghai se jeter dans la gueule du loup.
Critique du Lotus bleu
Le fauve le dit de go : j’ai connu bien mieux question aventures de Tintin & Milou Inc., même si le lieu de l’action (la Chine, majestueux pays où j’ai résidé) m’a ravi, sans compter des illustrations particulièrement soignées. Les tableaux de quelques rues de Shanghaï (dès qu’on sort des concessions occidentales) sont somptueux, le niveau de détail et la patte de l’auteur en terme de calligraphie méritent d’être applaudis. Mais ça part souvent un peu dans tous les sens.
Je vais maintenant vous bâcler l’histoire comme il se doit : Tintin et son clébard (qui est ici discret) débarquent donc sur le territoire chinois, il rencontre en très peu de temps les huiles, en particulier Mitsuhirato, qui prend ses ordres d’un vilain gus qui ressemble fort à un Himmler japonisé – celui qui gueule tout le temps scronyonyo. Contre ces vilains Japs, il y a une société secrète menée par Wang JenGhié, le vieux sage dont le fils (didi) atteint par un poison veut décapiter tout ce qui bouge. Après des situations incommodantes dont Tintin se tire de façon fort scandaleuse (en plus d’y sauter à pied joint parce qu’il veut trouver l’antidote), tout ramène au fameux Lotus bleu, fumerie d’opium qui sert de repaire aux bandits.
Les actions se passent tellement vite que pas une seule fois quelques incohérences sont parvenues à mon esprit pourtant fécond. Notamment la rencontre nettement trop fortuite avec le petit Tchang, avec qui Tintin sympathise à une allure folle. Soit le journaliste parle le dialecte du jeune Chinois (il y a fort à parier que ce ne soit pas du mandarin académique), auquel cas ses compétences de sinologue sont épatantes ; soit Tchang maîtrise le français, c’est donc un agent secret. Mais rien de trop fâcheux sinon, il reste surprenant de remarquer à quel point tout ceci vieillit globalement bien.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Le conflit sino-japonais est la pierre angulaire de l’intrigue de cet opus, avec les groses chamailleries de l’Empire du Soleil Levant qui apprend vite des Occidentaux – armée moderne, création d’incidents diplomatiques de toute pièce, cynisme et petits arrangements entre nations. Écrit en même temps que le Japon éructait à tout va sur le continent asiatique, Le Lotus Bleu est un savoureux instantané d’une certaine période. Les hauts de forme, la SDN, les baïonnettes, que du bonheur.
Les idées préconçues sur les différentes « civilisations » sont légion, et l’échange de points de vues entre Tchang et Tintin à ce sujet est mignon comme tout – ça fait franche camaraderie. Sauf que les comportements d’autres protagonistes tendent à valider ces préjugés, que ce soient les fourbes Japonais ou ces salopiauds d’Anglo-Saxons dans la concession internationale de Shanghaï. En outre, il demeure quelques facilités scénaristiques et vestimentaires, à l’image de la tunique bleue du Chinois moyen – un poil facile.
Dernier petit point avant de vous laisser : vers le deuxième tiers de l’intrigue, Tintin subtilise un uniforme de la rayonnante armée nippone et subjugue une garnison entière. Il se paye même le luxe de distribuer des jours d’arrêts comme des confettis au carnaval de Tapiocapolis. Et là, Le Tigre se demande si Hergé ne s’est pas inspiré de Wilhelm Voigt, artisan qui s’est habillé en officier de la garde prussienne au début du 20ème siècle. Pendant une journée, le gars a littéralement pris possession de la ville de Köpernick (dans Berlin, maintenant) et de son administration. Il était même parvenu à foutre le maire en prison.
…à rapprocher de :
– Quelques Tintin sont à signaler sur le pétillant blog, par exemple Les Cigares du pharaon ; L’île noire, Le Sceptre d’Ottokar ; Les Sept Boules de cristal ; Le Temple du Soleil ; Tintin au pays de l’or noir ; Les Bijoux de la Castafiore. Dans l’ordre s’il vous plaît.
– Si vous avez envie de vous bidonner avec un grave humour sur Tintin, je vous rappelle l’existence de Tintin en Thaïlande (en lien, avec un pdf de la BD censurée).
Ping : Hergé – Les Cigares du pharaon | Quand Le Tigre Lit
Ping : DodécaTora, Chap.RG : 12 Tintin à sauver d’un incendie | Quand Le Tigre Lit
Ping : Bud E. Weyzer – Tintin en Thaïlande | Quand Le Tigre Lit
Ping : Hergé – Tintin au pays de l’or noir | Quand Le Tigre Lit
Ping : Hergé – Les Bijoux de la Castafiore | Quand Le Tigre Lit
Ping : Hergé – Le Temple du Soleil | Quand Le Tigre Lit
Ping : Hergé – Les Sept Boules de cristal | Quand Le Tigre Lit
Ping : Hergé – Le Sceptre d’Ottokar | Quand Le Tigre Lit
Ping : Hergé – L’Île Noire | Quand Le Tigre Lit
Tchang c’est un peu l’Enak, ou l’eunuque plutôt vu la propension d’Hergé à montrer la sexualisté, de Tintin
Oups grossière faute de frappe un peu plus haut !
Rattrapage aux branches: je viens d’inventer un nouveau concept la sexualisté ! Reste à définir ce qu’il recouvre …
Je pensais que « sexualisté » était voulu. Encore un magnifique mot nouveau qui évoque la propension d’un auteur à lister les aventures potentielles de son auteur, mais sans le faire passer à l’acte.
Adopté ! On a le nom du concept, ce qu’il recouvre, reste plus qu’à broder autours, publier dans quelques revues de psycho-littérature quantique et à nous la renommée !