VO : idem. Lorsqu’un dessinateur à l’humour corrosif et déjanté décide d’illustrer, à sa façon, les titres de grands tubes de musique, y’a moyen que ça fasse mal. Très correct dans l’ensemble, hélas le rapport nombre de pages/prix m’a paru assez faible, sans compter que j’attendais quelque chose de plus grandiose. Tigre est exigeant, que voulez-vous.
Il était une fois…
Rien que la couverture annonce la couleur (fort sombre au demeurant) :
« L’Islande est un pays glacial, triste, désolé.
À part boire et tuer des baleines, on peut aussi dessiner et écouter du rock.
Hugleikur Dagsson, lui, dessine sur le rock. Il espère que vous aimerez ses dessins.
Sans quoi, il recommencera à boire et à tuer des baleines. »
Critique de DJ Set
Second ouvrage du père Dagsson, et il faut dire que le sieur islandais parvient toujours à me faire doucement ricaner. Un artiste pur jus qui, outre la surprise du sujet traité, fait montre d’une régulière exemplarité dans l’humour noir, franchement que demander de plus ?
DJ Set, le titre, renvoie basiquement au principe suivant : prenez un titre de musique bien connu (My heart will go on ; Careless Whisper ; Oops! I did it again ; All that she wants etc.), peu importe que ce soit du rock, de la soul, de la pop guimauve ou de la dance, et joignez à ce titre une illustration terre-à-terre ou plus fine capable de créer une sorte d’hilarité malsaine. L’auteur, qui s’improvise DJ de troisième zone n’ayant guère grand chose à apporter question musicologie, se fait néanmoins plaisir (et le lecteur en prime) grâce à ses noires interprétations de grands morceaux de musique.
Pour ceux qui ne connaissent pas le Nordique, voilà comment le bouzin se présente : d’abord, il y a le titre, en VO, en toute simplicité. Y est associé un dessin, sur une page unique (voire deux pour Great balls of fire, et ça le justifie), qui tente d’illustrer ce dont peut bien parler le morceau de musique – à sa manière il est vrai. Et ces gribouillis, d’une rare simplicité, font plus d’une fois mouche. Car c’est là la force d’H.D. : ses productions consistent en des traits grossiers, basiques, franchement le félin (qui est une bite finie question dessin) pourrait faire de même avec une semaine d’entraînement. En revanche, pour ce qui est des dialogues, jamais je ne pourrais imaginer plus glauque.
Toutefois, et parce qu’il faut bien un point plus ou moins négatif, il faut savoir que ce menu ouvrage, qui affiche quand même ses cinq euros à la balance, possède moins de 70 pages. Cinq minutes de lecture à peine, je vous avoue avoir ressenti comme un picotement entre l’anus et la prostate. De la frustration surtout, rajouter quelques productions de l’auteur en sus n’auraient pas été de trop.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
La première chose qui surprend est la façon dont l’artiste se joue (voire se fout) de la musique à l’aide d’un second degré plutôt plaisant. Pour tout vous dire, il est arrivé au félin de ne pas saisir, au premier abord, la blague sous-jacente. Qu’est-ce que je me suis senti con alors…jusqu’à la relecture libératrice, et là l’éclat de rire n’est jamais loin. Par exemple, le tube de Cindy Lauper Girls just wanna have fun présente des gosses dans un jardin d’enfant. So what…? Et bah la réponse est plus subtile que prévu….
Inversement, Hugleikur (ça y est, suis parvenu à écrire son nom de tête) fait parfois montre de premier degré. Et comment il prend à la lettre les bons mots des musiciens est encore plus fandard. A partir de vingt pages de cet acabit, un terrible constat s’impose : les paroles de grands tubes anglo-saxons sont d’une connerie à toute épreuve. Lorsque quelqu’un illustre les conséquences, mot à mot, de ce que peut gazouiller tel ou tel chanteur à succès, le résultat est plus proche du foutage de gueule qu’autre chose en fait. A titre d’exemple, le fameux I believe I can fly a droit à un traitement sobre et logique : un corps écrasé au bas d’un immeuble. De là à s’imaginer que c’était l’intention première du chanteur en question.
…à rapprocher de :
– Comme je le disais, jetez un œil averti à Et ça vous fait rire ?, petite perle de mauvais goût.
– Les références culturelles malmenées sont dans le déroutant Palepoli, de Furuya Usamaru.
– Dans le style très vilain, en version française y’a Paf & Hencule (French Doctors suivi de Deux hommes en colère) d’Acnéique et Kadabra. Avec plus de classe (et néanmoins anglo-saxon), Nicholas Gurewitch et sa Perry Bible Fellowship Almanack sont à se taper sur les cuisses.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce truc en ligne ici.
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