VO : Filth. Irvine Welsh a les faveurs du Tigre, avec Une ordure le monsieur a fait très fort. Trash à souhait, politiquement incorrect et ne respectant plus grand chose, ce roman mérite le podium des titres bêtes et méchants. Mais terriblement drôle aussi. En suivant un flic tout ce qu’il y a de pire dans le Glasgow de la fin du siècle, le lecteur à l’esprit ouvert jubilera.
Il était une fois…
Bruce Robertson est une ordure. Une vrai de vrai : psychologiquement, c’est un flic véreux dont la seule ambitions est de passer de brigadier à inspecteur de police. Criminel plus que policier, drogues et viols semblent être son quotidien. Physiquement, il est rebutant : hygiène qui laisse à désirer, eczéma sur les parties intimes, bref une grosse épave puante qui cache en son sein, de surcroît, un ver solitaire. C’est ce gentleman qu’on va suivre sur 500 pages. Allumez la machine à gros mots !
Critique d’Une ordure
Irvine Welsh, auteur écossais qui n’a pas le stylo dans la poche, fait partie de la très particulière chemical generation dont les auteurs se payent de luxe de consommer lesdits produits en plus d’écrire (exemple de Will Self). Normal qu’on retrouve alors tout un tas de substances illégales dans le corps du protagoniste principal d’Une ordure.
Cette ordure, c’est Mister Robertson, flic qui se comporte comme un véritable salaud. Pas du tout un roman policier, le métier du héros n’est là que pour laisser au narrateur l’occasion de commettre des conneries de grande ampleur grâce à son statut. En outre, l’écrivain nous présente une double narration : l’abject individu mais aussi le ver solitaire à l’intérieur de ce premier, parasite au phrasé particulier (et peut-être déroutant).
Dès le début, on sait à quoi s’attendre quand Bruce décide de ne pas se fouler pour enquêter sur le meurtre d’un journaliste noir. Non, non, notre gus songe surtout à tringler la première femme qu’il croisera. Ensuite, le vocabulaire souvent déplacé de l’écrivain. Si le scénario ne semble pas avoir de ligne claire, les dégueulasseries décrites sont d’une constance édifiante (viols, drogues, noms d’oiseaux,…).
En conclusion, voilà un titre dérangeant avec un narrateur qui représente l’anti héros par excellence. Le vocabulaire outrancier ne plaira pas à tout le monde, considérant que 500 pages d’insultes, de coups bas et de complots le lecteur peut vite devenir écœurant. As far as The Tiger is concerned, ça passe bien ! Ai pas vu le temps passer (comptez quatre bonnes heures).
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Le trash. Comme vous avez du le comprendre, la narration est plutôt vilaine. On voit tout le potentiel de quelqu’un qui ne prend aucune pincette pour décrire les pérégrinations d’un individu amoral. A ce moment deux réactions sont possibles chez le lecteur : soit ce dernier trouve le tout sympathique et s’émerveille d’un tel déballage de gros mots au service d’un scénario qui tient à peu près la route ; soit l’humour « pipi caca » (car on peut se surprendre à rire dans ce titre) nous gave à l’excès.
Sauf que Welsh ne verse pas seulement dans le phrasé fleuri, mais essaie, à sa manière, de dénoncer les différentes formes d’agressions de notre société. Violence institutionnalisée d’abord, avec un policier capable de terribles exactions sans qu’il ne semble inquiété. Des gardes fous au monopole de la violence ? Si peu, même si point de happy ending pour Bruce-pas-si-tout-puissant (il fallait que je la sorte, désolé). Violence sociale, plus vicieuse, avec le narrateur parano qui paraît parfois être la victime du système. Son esprit étriqué ne trouve de réponse que dans l’agressivité, tel un commandant décidant que la meilleure défense est l’attaque.
…à rapprocher de :
– De Welsh, il faut se régaler avec Trainspotting, suivi de Porno. Glu et Recettes intimes de Grands Chefs fait aussi partie de la bibliographie.
– Le flic bien véreux qui en font de belles, les exemples ne manquent pas. Pour l’instant, Le Tigre vous renvoie amicalement vers 1275 âmes, de Jim Thompson.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman via Amazon ici.
Dans le même genre, il y aussi l’inoubliable et glaçant Lou Ford, protagoniste principal du roman de Jim Thompson « Le démon dans ma peau ».
Alors c’est sûr, y’a moins de gros mots (écrit en 1952), mais ça dépote pas mal. Du Jim Thompson, quoi (oui, je suis un inconditionnel !)
Tiens, je l’ai en stock, m’en va le résumer !
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