VO : Double Shuffle. Il doit s’agir d’un des meilleurs romans hard boiled lu par Le Tigre. Une enquête bien plantée et rondement menée, un héros d’apparence normale, un peu de sexe (à l’aune de la période d’après-guerre, hein), la maîtrise de l’écrivain anglais est à applaudir. Dernier applaudissement pour l’éditeur qui a concocté une image de couverture de première bourre.
Il était une fois…
Susan Gellert est une artiste complète : chaque soir, elle offre à la populace admirative un pestacle des plus somptueux. Imaginez, la belle est presque nue et effectue une danse lancinante en tenant un cobra entre ses quenottes. Clou du show, elle lui fait un smac sur son museau. Toutefois, il y a quelque chose de bizarre chez elle et son partenaire : ils ont contracté pas mal de polices d’assurances sur la vie de Susan. Si elle clamse, un million de dollars sera reversé. La compagnie sent l’arnaque à mille lieues à la ronde, seulement celle-ci ne sait pas comment l’assurée procédera.
Critique de Vipère au sein
Écrit au début années 50, voici encore un exemple des polars noirs (les fameux hard boiled) qui ont éclos comme de jolis champignons atomiques jusqu’aux années 60. Il fut un moment où j’en bouffais deux par mois, hélas ça m’est passé depuis.
Le scénario est, au premier abord, simple comme tout : Harmas, un agent d’assurances, se voit demander par sa boîte d’enquêter sur l’agent de Susan, celui-ci semblant plus que louche. Sauf que l’affaire s’avère un poil plus complexe que prévue, et notre héros (qui bosse avec sa bourgeoise) va pas mal se balader en Californie. Sans spoiler, il sera question d’une jumelle qui rôde dans le coin.
L’énigme, sur fond d’extorsion aux assurances donc, est très bien menée malgré une fin assez improbable (et encore, Tigre reste poli). Chose intéressante, je n’ai pas vu le temps passer : entre des chapitres plutôt courts et des péripéties qui débarquent sans crier gare, il faut reconnaître que c’est une œuvre relativement rythmée pour du hard boiled.
Un ouvrage plus que satisfaisant si on parvient à pardonner quelques incohérences (beaucoup semblent à l’épreuve des balles). A l’époque, un tel enchainement d’action devait bien faire bicher les lecteurs, sans compter le vocabulaire passablement argotique qui, aujourd’hui, a un parfum suranné involontairement comique (du moins pour Le Tigre).
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
L’angle d’attaque choisi par le bon James H. Chase est original, on n’avait pas idée à l’époque d’introduire un tel protagoniste principal. Harmas est un pauvre agent d’assurance, rien à voir avec le shérif du coin ou le détective privé ancien militaire. Accompagné de son épouse, on sent qu’il n’est pas forcément à l’aise en traînant ses guêtres dans un tel bourbier. On friserait le roman d’apprentissage si l’auteur anglais ne s’était pas tant concentré sur le strict déroulement de l’enquête.
L’enquête, parlons-en. En ce qui me concerne, j’ai souvent considéré que c’était « too much ». L’employé d’assurance met son gros doigt dans un engrenage qui n’est pas loin de le broyer. La Californie rutilante et propre sur elle, l’Ouest dévergondé et en manque de repère, en fait Chase brosse le tableau réaliste d’une région où arnaqueurs à la petite semaine frayent avec la « bonne » société. Cependant, en moins de 400 pages, on ne s’attardera pas longtemps au pays.
…à rapprocher de :
– De cet auteur, Pas d’orchidées pour Miss Blandish m’avait également plu. Décidément, les femmes savent foutre la merde dans les romans de Chase.
– Les opérations savamment préparées, mais avec le grain de sable de trop, c’est aussi Le sac de Couffignal, d’Hammett (autre auteur hard boiled).
– Concernant les arnaques à l’assurance, je vous laisse vous creuser les méninges (ne me parlez pas du film Memento hein).
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.
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