Au milieu du 16ème sévissent en France quelques troubles notoires entre Catholiques et Protestants. Et ce n’est guère un Roi dont le lait coule encore du nez qui va apaiser la situation. Encore moins Catherine de Médicis, sa mère, ou sa Cour. Style excessif et humoristique mais potentiellement ennuyeux, j’ai eu un mal de chien à en venir à bout – malgré les aérations du livre.
Il était une fois…
Voici un feignantissime copier-coller du quatrième de couv’ :
« Charles IX fut de tous nos rois de France l un des plus calamiteux.
A 22 ans, pour faire plaisir à sa mère, il ordonna le massacre de la Saint Barthélemy qui épouvanta l’Europe entière. Abasourdi par l’énormité de son crime, il sombra dans la folie. Courant le lapin et le cerf dans les salles du Louvre, fabriquant de la fausse monnaie pour remplir les caisses désespérément vides du royaume, il accumula les initiatives désastreuses.
Transpirant le sang par tous les pores de son pauvre corps décharné, Charles IX mourut à 23 ans, haï de tous.
Pourtant, il avait un bon fond. »
Critique de Charly 9
J’aime bien Jean Teulé. Celui-ci a offert au félin d’inoubliables moments de lecture, entre rires aux éclats et grincements de dents, le tout en se cultivant suffisamment pour ne pas avoir l’air du dernier abruti dans les galas parisiens. Et l’excellent début de Charly 9 augurait d’un agréable moment : un Roi de France à la ramasse à qui les proches lui conseillent de zigouiller deux-trois Protestants en pleine festivité, ces assassinats ciblés se transformant au fil des dialogues en un impitoyable massacre qui a encore sa double page dans nos livres d’histoire.
A l’instar du titre de l’œuvre qui tend à faire du protagoniste une pop star, un détachement rigolard se fait sentir dans la narration d’un personnage historique qu’on découvre au jour le jour. Et ce n’est guère reluisant : Charles IX, qui passe plus de temps à éviter ses obligations et niquer sa maîtresse qu’à prendre les rênes du pays, commence à somatiser le massacre qu’il a, par paresse, ordonné. Au point d’être en proie à de savoureuses hallucinations (l’entraînant dans de grandes parties de chasses imaginaires) et à transpirer du sang – mon ami docteur me glisse le terme « hematidrose » à l’oreille. La tragédie laisse vite la place à la comédie, qui néanmoins fait preuve de résistance.
Néanmoins, si certains paragraphes sont réjouissants à dévorer, force est de reconnaître que ça gave à la longue. C’est même parfois très confus. Comme si Jean T., point mécontent des saillies verbeuses de ses protagonistes, décide d’en remettre des couches, quitte à perdre une partie de ses lecteurs en cours de route – dont votre serviteur. Aussi, le rendu du phrasé de l’époque auquel se mêlent quelques bons mots contemporains ne fait pas souvent mouche. Teulé a de la sorte progressivement flingué son roman qui, au fil de ses nombreux chapitres aérés, devient paradoxalement plus lourd à suivre.
Quant à ce qui aurait pu sauver l’œuvre, savoir une certaine exactitude historique, à peine si j’ai pu me sentir plus cultivé en refermant le bouquin. Sans compter que, en présence des nombreux délires de l’écrivain, on ne sait pas vraiment dans quelle mesure telle ou telle anecdote retranscrit fidèlement la réalité (des préparatif d’assassinats de Coligny à l’invention du poisson d’avril, en passant par les frasques du monarque comme frapper des pièces en fer pour les distribuer au bon peuple). A lire en tant que fiction avant tout.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Je suis un poil excessif : Charly Nine permet d’avoir un chouette aperçu de la nuit du 24 août 1572 et des jours aussi sanglants qui suivirent lorsque la Seine charriait ses milliers de corps gonflés. Même si les causes peuvent paraître peu claires, le retentissement dans le Royaume (et chez les voisins) est aisé à décrire. On passe d’un pays qui est à-peu-près parvenu à apaiser les conflits religieux en une poudrière en chaleur où même le jeune suzerain, mal entouré (même sa Médicis de mère préférerait qu’un autre aille sur le trône), ne sait pas comment rattraper le bordel. Et ça gronde au niveau de la populace.
Par conséquent, il est un terme qui m’est souvent venu à l’esprit : la maladie. Maux dont est affublé Charles IX certes, le jeune homme n’assumant pas ses décisions et son esprit prenant plus d’une fois la tangente – c’est compréhensible eu égard la responsabilité qui pèse sur ses épaules. Hallucinations, sautes d’humeur, gentillettes adultères, on dirait que le bon Roi incarne en personne ce qui ne va pas dans son pays. En outre, le peuple (paysannerie ou noblesse), à quelques exceptions près fait montre de la même fièvre qui habite son potentat.
Du coup, une question se pose : Charles est-il le produit de son époque (chuchotements de palais, consanguinité des Cours d’Europe) ou le principal artisan des massacres réalisés sous son règne ? Pire, est-ce qu’à cette époque le peuple avait également les gouvernants qu’il méritait ?
…à rapprocher de :
– Jean Teulé squatte correctement le présent blog : L’œil de Pâques ; Darling (coup de cœur) ; Longues Peines ; Les Lois de la gravité ; Ô Verlaine ! ; Le Magasin des suicides (bof bof) ; Le Montespan ; Mangez-le si vous voulez (terrible).
– La malédiction des rois français me rappellent…non pas Les Rois Maudits de Druon mais L’année des quatre dauphins, d’Olivier Chaline. Bien documenté et plaisant à lire. Attention c’est un essai.
– Ce pauvre C.9 me rappelle Lady MacBeth qui passe le plus clair de son temps à se laver frénétiquement les mains qu’elle pense pleines de sang.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.
Ping : Jean Teulé – Mangez-le si vous voulez | Quand Le Tigre Lit
Ping : Jean Teulé – Le Montespan | Quand Le Tigre Lit
Ping : Jean Teulé – Ô Verlaine ! | Quand Le Tigre Lit
Ping : Jean Teulé – L’oeil de Pâques | Quand Le Tigre Lit
Ping : Olivier Chaline – L’année des quatre dauphins | Quand Le Tigre Lit
Ping : Jean Teulé – Darling | Quand Le Tigre Lit