Les biographies de Teulé sont en général très plaisantes. Hélas Ô Verlaine ! ne m’a pas transporté et trop rarement fait rire. Le Tigre n’a pas réussi à totalement rentrer dans ce roman qui m’a semblé poussif et improbable. Au moins j’ai pu me familiariser avec cet excellent poète et son entourage.
Il était une fois…
Henri-Albert Cornuty est un fan de Paul Verlaine depuis que son oncle lui a offert les Poèmes saturniens. Ainsi vers la fin de 1895 le jeune homme va prendre la route et se diriger à Paris pour rencontrer le bonhomme. Celui-ci, plus dépravé que jamais, va connaître un regain de succès sur la fin de sa vie. Ces derniers quelques mois du poète seront alors contés.
Critique d’Ô Verlaine !
Oh mon dieu, que j’ai eu du mal à terminer ce roman ! En ai lu deux autres et trois BD en parallèle, comme pour faire passer le désagréable goût. 350 pages environ, les 70 dernières ne furent pas loin du supplice. Comment en arriver là avec un auteur dont la cote atteint des sommets ?
Pourtant, l’histoire avait de quoi séduire : un tout jeune (le lait lui sort quasiment du nez) « monte » à la capitale trouver son poète préféré. Hélas ce dernier, en plein milieu de l’année 1895, est un alcoolique presque clochard qui n’a plus que six mois à vivre. Tout l’environnement du poète, jusqu’aux conséquences de son décès (l’imposante procession improvisée) seront narrées par Teulé.
Hélas, mille fois hélas, je ne suis pas parvenu à entrer dans le monde (souvent onirique) de l’auteur. D’une part, la description de la France de la fin du 19ème siècle ne m’a pas paru très convaincante. D’autre part les personnages, nombreux, ne semblent relever que de la farce. C’est jubilatoire certes, mais ennuyeux à la longue. Pourtant les chapitres sont courts (plus de 80 !), ce qui a sûrement sauvé l’œuvre qui est alors conçue pour les trajets courts.
En guise de conclusion, le débutant de la poésie « verlainaise » aura une bonne base d’étude, et la lecture de Ô Verlaine a le mérite de vouloir en savoir plus sur le personnage. En outre, quelques poèmes illuminent l’ouvrage, Le Tigre (qui connaissait très peu de Paul V.) a été comblé. Un poème, spécialement, mérite d’être ici intégralement reproduit. Verlaine, en plein délire, chambre gentiment un ami à qui il fait des avances :
Même quand tu ne ne bandes pas,
Ta queue encor fait mes délices
Qui pend, blanc d’or, entre tes cuisses,
Sur tes roustons, sombres appas,
Couilles de mon amant, sœurs fières
A la riche peau de chagrin,
D’un brun rose et purpurin,
Couilles farceuses et guerrières,
Et dont la gauche balle un peu,
Tout petit peu plus bas que l’autre
D’un air roublard et bon apôtre,
A quelles donc fins, nom de Dieu !
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Le « cas Verlaine ». Drôle d’individu, en tout cas son dernier semestre d’existence lui a donné une sulfureuse réputation. Malade comme un chien à tel point qu’un deuxième écriteau a du être nécessaire pour recenser, sur son lit d’hôpital, ses maladies. Buvant au-delà du raisonnable, violent (il a occis sa mère quand même), c’est un grand fou consumé par les excès qui sont légion. Par exemple son amour contrarié avec une fille de joie. Et lors de son hospitalisation, la jeunesse germanopratine s’entiche de lui, le soutient, déclame ses vers un peu partout. Hélas ça ne remettra pas le bonhomme vers le chemin de la rédemption. « Pauvre Verlaine », pense forcément le lecteur.
A ce titre, il a fallu (au moins) deux mentions du « Pauvre Lilian » avant de saisir le subtil anagramme du héros. A bon entendeur…
La réalité et la fiction. Teulé, comme à son habitude, mélange réalisme historique et narration assez libre. Si le lecteur en quête de littérature agréable pourra être légitimement satisfait, le « chercheur » sur le fameux poète devra se contenter de la biographie à la fin du roman. Le Tigre, plus proche de la deuxième race, a du vérifier de temps à autre quelques informations sur internet pour savoir où s’arrêtait la pure fiction.
…à rapprocher de :
– Jean Teulé squatte correctement le présent blog : L’œil de Pâques ; Darling (coup de cœur) ; Longues Peines ; Les Lois de la gravité ; Le Magasin des suicides (bof bof) ; Le Montespan ; Mangez-le si vous voulez (terrible), Charly 9 (déception).
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.
Ping : Jean Teulé – Les lois de la gravité | Quand Le Tigre Lit
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De mon point de vue, la meilleure biographie de Teulé reste « Je, François Villon », un récit très sombre qui a cet avantage de donner envie de se repencher sur La ballade des pendus…
C’est bien noté Al. Je l’ajoutes sur ma liste…