VO : Idem. Dans un futur incertain, un virus intelligent est sur le point de décimer les Hommes, pourtant un espoir réside dans une plante blanche. Histoire croisée avec un scénario se situant au début du XXème siècle, Trillium est un ovni littéraire non linéaire qui a perdu en cours de route votre serviteur. Dessins passables, différents niveaux de lecture, pour ma part ce ne fut pas le grand amour.
Il était une fois…
Comme je n’ai pas vraiment aimé cette BD, je vais laisser l’éditeur dire ce dont il est question :
« En 3797, la botaniste Nika Temsmith recherche une plante dans les confins les plus reculés de l’espace connu. En 1921, l’explorateur anglais William Pike mène une expédition pour trouver un temple Incas aux propriétés salvatrices légendaires. Isolés à des années-lumière l’un de l’autre et alors que les murs de la réalité s’effondrent autour d’eux, ces deux âmes sœurs vont se rencontrer et vivre la dernière histoire d’amour de l’humanité. »
Critique de Trillium
Désireux d’en savoir plus sur le travail de Jeff Lemire, Le Tigre a naturellement acheté son petit bijou personnel qui, chose rare, verse franchement dans la science-fiction. On a beau sentir que l’auteur/dessinateur s’est pleinement investi dans son labeur, néanmoins je n’ai guère goûté le résultat.
Le souci principal réside dans la manière dont l’histoire est délivrée. Il est question du virus de la crépine sur le point d’anéantir l’espèce humaine, et de mystérieux passages menant à des temples peuplés par des E.T. que nos deux héros (qui ont beaucoup en commun) empruntent ici et là après avoir ingéré une plante antidote composée de Trillium-A. Jusque là, pourquoi pas. Mais quand l’auteur décide de faire des planches en miroir avec des passages obligeant à retourner le bouquin, sans prévenir ni indiquer comment lire le bouzin, bah ça gave furieusement Le Tigre.
Du coup, je me suis connement emmêlé les pinceaux et ai rapidement perdu le fil de la narration. En outre, les illustrations, séduisantes par certains aspects (beaux paysages, alphabet étranger qui a de la gueule), ne sont pas le genre du félin : c’est comme si Jeff, dans un élan d’onirisme justifié par le n’importe nawak de son scénar’, avait traité par dessus sa gambette quelques aspects de ses illustrations. Les personnages, notamment, semblent taillés au couteau (il y a du Enki Bilal dans leurs traits) tandis que les couleurs sont dominées par un pastel qui fait très négligé. Mais rien de vilain par rapport à la fluidité des péripéties déjà durailles à suivre.
Tout ça pour dire que j’ai la solide impression d’être passé à coté d’un ouvrage que je sais profond, sinon novateur dans sa forme. Néanmoins, opter dans le bizarre question forme avec un tel scénario (qui passe du coq à l’âne, du futur à un rétro steampunk de bas étage, de l’amour à des centres cryo) n’est pas optimal pour fixer l’attention du lecteur à qui aucune notice n’est donnée.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
La narration en miroir, plutôt intrigante, permet de renforcer (mettre en exergue, même) la similarité entre deux époques (séparées de plusieurs siècles) portées sur le noble art de la colonisation. D’un côté, il y a la volonté de coloniser d’autres planètes qui se heurte à un terrible virus qui paraît savoir où taper. Et cela force l’Homme, acculé à une perte quasi certaine, de laisser la diplomatie de côté pour mettre la main sur une plante miraculeuse. De l’autre côté, il s’agit de l’attribution agressive (avec sa tangente temporelle qui se situe au Pérou) d’un territoire inconnu (l’Amérique du Sud) avec ce que ça comporte comme « respect » des indigènes. Deux conquêtes, deux êtres déchirés par des souvenirs communs (donc illogiques), deux personnes qui vont s’aimer malgré ce qui les sépare – oui, ça fait eau de rose, et alors ?
Le dernier thème d’importance est la triste fin du monde et la façon dont l’Humanité tente de survivre. La crépine est d’autant plus flippante que le lecteur en saura finalement peu sur celle-ci – à part quelques passagers d’un vaisseau décédés avec du sang qui sort de leurs pifs. Dans l’avenir imaginé par Jeff Lemire, le salut passe par l’expansion, à moins que ce soit une fuite plus ou moins bien préparée vers des cieux plus cléments (du moins mon niveau de lecture s’est arrêté là).
…à rapprocher de :
– De Jeff Lemire, Le Tigre a dévoré Animal Man (Tome 1 et Tome 2 sur le blog) et Green Arrow (avec Sorrentino, tome 1 ici).
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce comics en ligne ici.
Ping : Lemire & Foreman – Animal Man, Tome 2 : Contre-nature | Quand Le Tigre Lit
Ping : Lemire & Foreman – Animal Man, Tome 1 : La chasse | Quand Le Tigre Lit