VO : The Stone Monkey. Un vilain trafiquant aux yeux bridés qui cherche à faire disparaître tous les témoins gênants, lesquels se planquent à Chinatown, brrrr. Dans cette enquête menée tambour (hu hu) battant, agrémentée un suspense toujours aussi bien dosé et fin surprenante, tous les ingrédients semblent présents pour notre plus grand plaisir.
Il était une fois…
Tous aux abris ! Les Chinois débarquent à Long Island ! Un cargo arrive tranquillement vers les States, avec à son bord tout plein d’immigrants. Le passeur, voyant venir les garde-côtes, ne trouve rien de mieux à faire que saborder le navire. Avec les pauvres hères dedans. Mais quel salaud ! Sauf que quelques uns s’en tirent, et pour fuir l’immigration se réfugient dans le quartier chichi (Chinatown, que ça s’appelle). Et le passeur est aux trousses de tous ces témoins potentiels. Nos deux amoureux vont-ils retrouver cet ignoble trafiquant d’êtres humains ?
Critique de La Maison Le Singe de pierre
Il est sacrément bon le père Deaver. Faut dire qu’il a tout pour lui, de journaliste à avocat (au pénal j’imagine), en passant par chroniqueur judiciaire, y’a de quoi avoir plein d’idées derrière la tête. On sent le gars habitué à cet univers glauque avec un réalisme un peu trop éprouvé malgré deux héros un peu too much aux entournures.
En plus de retrouver nos deux compères habituels (le paraplégique Lincoln et sa belle nana Amelia Sachs, tous deux policiers à NYC), il faut ajouter quelques protagonistes mandarinisants de première bourre : John Sung (victime étonnante) et la famille Wu qui se planquent après avoir échappé au pire ; un flic chinois infiltré qui cherche à attraper le tueur, bien connu de ses services, et bien évidemment le principal antagoniste. Tout ce joli monde va rendre la lecture, déjà agréable, un peu plus exotique avec des conflits/frictions (puis rapprochement) entre flicaille U.S. et techniques asiatiques de limier.
Car il n’en faut pas moins pour espérer débusquer le méchant, individu tellement insaisissable qu’il se fait prénommer « Le Fantôme » (à juste titre en lisant le fin mot de l’histoire). Grâce à ce dernier, la narration assez vive est agrémentée de nombreux retournements (hélas présents que dans les derniers chapitres) même s’il n’est nul besoin d’être grand clerc pour avoir une idée de qui est qui. Entre la brutasse des services de l’immigration et d’innocents immigrants, l’auteur a su renverser un manichéisme plutôt prononcé.
Dans l’ensemble, c’est tout bonnard : non seulement ces 500 pages se liront avec une allure que je qualifierais de consternante, mais en plus nos deux héros sont profondément attachants – à ce titre, bien que l’auteur fasse gaffe à bien rappeler le contexte, lire les aventures d’Amelia et dans l’ordre peut être utile.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
D’une part, le roman dépeint un tableau que je pressens réaliste de ce qu’est la communauté chinoise aux États-Unis, et comment ces personnes gèrent le respect de leurs traditions (de leurs racines, oserais-je formuler) face à un mode de vie occidental souvent fantasmé. Le gars qui personnifie le mieux cet état de cul-entre-deux-grosses-chaises est Sonny Li, le flic en mode sous-marin qui associe analyse toute rationnelle (un vrai pro dans son genre) avec quelques méthodes (proches de la superstition) bien de chez lui. Et ça fonctionne !
D’autre part, le roman donne une image guère flatteuse de la façon dont sont traités les immigrés désireux de poser leurs valises chez l’Oncle Sam. Je passerai rapidement sur l’espoir entretenu par ces braves gars qui ont fui de terribles situations, on ne quitte pas son pas par gaieté de cœur. Si les réfugiés se carapatent dans le quartier chinois, il appert que c’est autant pour se cacher du tueur que d’éviter de tomber sur les services de l’immigration. Le must du must reste un blessé qui, n’étant pas si grièvement atteint, est rapidement extirpé de l’hosto pour être envoyé en prison pour entrée illégale sur le territoire américain. La grande classe.
…à rapprocher de :
– Le fauve a lu pas mal de Deaver, pour l’instant il n’y a que L’homme qui disparaît sur le gueblo.
– Sur les particularités de la communauté asiatique, ici version française et en rapport avec le Japon, Le samouraï qui pleure de Scarlese vaut le détour.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.
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