VO : Pop. 1280. Auteur classique de la littérature « hard boiled », entendez noir et datant vers les années 70, Jim Thompson a quelques belles réussites à son actif. Ici, le lecteur sera immergé dans un bourg où l’homme censé faire régner la loi est d’un laxisme total, jusqu’à ce que son pré-carré soit dangereusement entamé. Efficace, sec et sans concessions, voilà un titre qui se laisse lire.
Il était une fois…
Nick Corey va plutôt bien : shérif d’un petit patelin, fonction qui n’est pas trop prenante, logement de fonction, une jolie maîtresse,…jusqu’à ce que les élections approchent et qu’il se rend compte qu’il ne sûrement pas renouvelé. Si on ajoute quelques macs locaux qui se foutent de sa gueule, alors notre shérif est bien décidé à mettre un peu d’ordre.
Critique de 1275 âmes
Un bon Jim Thompson, rien à redire de manière générale. Violence, paresse, humour omniprésent, bienvenue chez les ploucs en quelque sorte. 250 pages seulement, il y a pire comme perte de temps. J’ai dévoré en un après-midi ce polar, vous pourrez en faire de même et après le laisser à un ami.
L’ouvrage est très efficace avec son anti-héros qui manipule toute une ville pour se débarrasser des vilains, du moins ceux qui se placent en travers de son chemin. Le tour de force de Thompson est de se mettre dans la peau d’un shérif pas très futé au premier abord mais plein de ressources. Agissant plus par réaction que du fait d’un plan finement élaboré, Nick se présente comme une victime, alors que ses actes sont scandaleux et offrent une bonne tranche de rigolade.
Le style est rapide, chapitres courts, toutefois le lecteur trouvera quelques passages pas toujours faciles à suivre, peut-être à cause de la traduction ou du style très « rétro » de Thompson. Au final, un bon moment de passé, à lire après 20 ans eu égard au vocabulaire et une fin assez sanglante.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
L’image d’Épinal du village de « ploucs ». 1275 âmes, 1280 dans la version anglaise (mais pourquoi donc ?), c’est une petite communauté de gens bien sympathiques mais guère très évolués. Tout le monde se connaît, les rumeurs enflent en moins de deux, alors quand le seul flic de la ville décide de balayer un peu et est pris dans un engrenage qu’il peine à maîtriser, la ville ressemble très vite à une poudrière. Pour le plus grand plaisir des lecteurs.
La corruption et l’amoralité. Le protagoniste principal, déjà, tient une sévère couche : mari infidèle, laxiste quand à la petite délinquance de sa bourgade, niveau de motivation proche du plancher, le shérif se décide enfin à sortir ses doigts du cul quand d’une part il n’est plus certain d’être reconduit dans ses fonctions, d’autre part parce qu’il est au pied du mur à cause d’un double meurtre qu’il commet. Quant au reste des habitants, ce n’est également guère reluisant. Bêtise ambiante, méchanceté (pas toujours) gratuite, bref le genre de lieu où une descente du FBI et d’un procureur un tant soit peu diligent pourrait faire de gros dégâts.
…à rapprocher de :
– Dans le pur hard boiled, regardons également du côté de Williams, en particulier son Fantasia chez les ploucs. Ou le grand Dashiell Hammett avec son Sac de Couffignal.
– Jim Thompson a su contenter Le Tigre, par exemple Éliminatoires ou Le démon dans la peau.
– Jean-Bernard Pouy apporte une réponse au décalage entre le titre en VF et la VO dans 1980 âmes. (cf. le commentaire en infra qui m’a aidé).
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman via Amazon ici.
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Ping : Jim Thompson – Eliminatoires | Quand Le Tigre Lit
Serait-ce possible d’avoir un jour ta critique sur Éliminatoires et Le démon dans la peau ?
J’aime beaucoup tes articles. J’espère que tu comptes continuer !
Puisque c’est si gentiment demandé, je m’en occuperai avant la rentrée. Et oui, je compte bien continuer, ça ne fait qu’un an que je m’amuse de la sorte.
oh, merci 🙂 tu réponds avec une vélocité à peine croyable.
Je suppose que tu as déjà des millions de livres à lire, mais je te recommanderais bien « Dans le secret » (ou « Aleph Zero ») de Jérôme Ferrari, et « Tous les diamants du ciel » de Claro. Ces deux auteurs contemporains sont des bombes.
Mais peut-être les connais-tu déjà 🙂
Je prends bonne note, mais ces deux auteurs sont inconnus de ma bibliothèque…pour l’instant.
Le Tigre se pose des questions.
Pourquoi 1275 âmes en France et 1280 aux États Unis ? Où sont donc passés ces 5 disparus ?
Une réponse existe dans 1280 âmes de Jean Bernard Pouy; disponible partout où on peut le trouver.
Mazette, je ne savais pas que Pouy s’était occupé du sujet (normal, je ne le cherche que dans les Folio Policier). Merci infiniment U Mulateru. Je m’étais cantonné à l’explication que le traducteur a préféré indiquer le nombre d’habitants à la fin du roman (y’en a bien 5 qui avalent leurs extraits de naissance). Je vais rectifier le tir.
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