VO : Haruka-na machi e. Jiro Taniguchi offre plus que du manga, de la BD européenne mais avec six fois plus de pages. Dans cette œuvre, une sorte de retour aux sources tout à fait salutaire. Dessin impeccable, scénario génial, immersion parfaite dans le Japon d’après-guerre, l’auteur a sorti un ouvrage d’une finesse exemplaire.
Il était une fois…
Hiroshi, la quarantaine, est mystérieusement plongé dans la peau de son alter égo 25 ans plus jeune. Dans un corps de jeune avec son esprit plus affuté, Hiroshi va pouvoir à nouveau revivre une année scolaire et développer de nouvelles relations avec ses proches. Et surtout revivre ce jour terrible au cours du quel son père s’en ira sans laisser de traces. Pourra-t-il le comprendre, voire l’empêcher, ou revivra-t-il impuissant son passé ?
Critique de Quartier lointain
Le Tigre l’annonce, ça fait un petit bout de temps que j’avais lu ce roman. Encore une fois… Oui, roman, n’ayons pas peu des mots : plus qu’un manga, on est plutôt dans un roman graphique d’une longueur assez conséquente.
L’histoire est belle, aucun autre terme ne me vient à l’esprit. Un homme qui se retrouve dans son enfance et tente de « ressouder » sa famille afin d’empêcher le départ de son père. Le texte est intelligent, en aucune manière Taniguchi fait étalage de bons sentiments ni dénouement attendu.
Le dessin mérite qu’on s’y arrête. Noir et blanc, Ligne claire, détails superbes constituant parfois de vibrantes (j’aime bien cet adjectif) fresques d’un village japonais, je dirai même que le tracé dans son ensemble fait montre d’un zen bienvenu. Du pur Taniguchi. Petit plus : les chapitres commençant par un dessin où certains protagonistes semblent poser.
Ça se dévore donc plutôt bien, disons que les presque 500 pages coulent facilement, au point de pouvoir relire l’opus un an après avec le même plaisir.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Le fameux « esprit de l’escalier ». En revenant dans le passé, notre héros a l’opportunité de se comporter différemment avec sa famille ou ses amis. Connaissant certains moments importants de sa vie, peut-on agir différemment au point de tout changer ? Le Tigre utilise le terme « esprit de l’escalier », utilisé en français dans le texte par Chuck Palahniuk : lorsqu’après une discussion délicate, vous vous apercevez « à froid » (souvent en montant les escaliers) que vous auriez du répondre ou agir différemment, mais évidemment c’est bien tard.
Les traumatismes familiaux. Le Tigre ne dévoilera point le fin mot de l’histoire, cependant ce roman peut s’analyser à la lumière d’un difficile évènement qu’à subi le narrateur. Si on rajoute d’autres péripéties, telles qu’un incendie détruisant la totalité du village, la reconstruction difficile des biens et des âmes, le père distant mais aimant, imaginez la souffrance de l’enfant. Au final, c’est l’histoire d’une famille comme les autres, avec ses zones d’ombre qui sont autant de faiblesses humaines et que le narrateur finira par comprendre.
La forme de l’ouvrage. J’en parle dans les thèmes, question d’équilibre. Il faut avouer que l’objet qu’on achète atteint des sommets de qualité : couverture cartonnée et solide, marque page en ruban rouge comme si on tenait le code pénal entre ses mains, c’est indéniablement un bel ouvrage à offrir. Mêler qualité digne de la pléiade et auteur mangaka de renom, chapeau. Hélas, difficile de trimbaler dans son petit sac la chose. Plutôt à lire au coin du feu, sur son fauteuil Louis XV.
…à rapprocher de :
– Le Journal de mon père est de la même veine. Au point de ne plus savoir différencier les deux quelques années après. Ainsi, ne vous inquiétez pas si les deux posts vous paraissent similaires.
– Taniguchi s’est également essayé au western avec Sky Hawk, et le résultat fut, à mon sens, fort décevant.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce manga en ligne ici.
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