VO :Two-Bear Mambo. Leonard Pine et Hap Collins encore sur la sellette, pour le plus grand plaisir du Tigre. L’image de couverture ne trompe point, c’est bien en territoire dominé par des individus de type Ku Klux Klan que les deux protagonistes iront foutre le bordel. Humour noir, scènes d’action réjouissantes, rien à redire.
Il était une fois…
Leonard, black homo et profondément républicain, a encore sévi : il vient de foutre le feu à la crack house de ses voisins dealers qui ont eu le malheur de vendre leurs saletés à des enfants. Hélas ce n’est pas au goût de tous, et pour que la police ferme les yeux notre héros va devoir rendre un service au représentant de la loi. Ce service, c’est aller récupérer la petite amie du flic qui a disparu au fin fond du Texas. Aidé de son ami Hap Collins (qui paraît tout le contraire de Leonard), il va aller dans un endroit surprenant où se mêlent KKK et trafic de drogues.
Critique du Mambo des deux ours
Après avoir dévoré L’arbre à bouteille (cf. infra, et sur la critique de ce titre je parle plus longuement des héros), Tigre ne pouvait laisser cet auteur américain ne pas occuper une place de choix dans sa bibliothèque. Et ce fut, encore une fois, très bon.
Dans cette histoire, Leo Pine, après avoir cramé la baraque de ses très peu recommandables voisins, doit mener une petite mission de type « search & rescue » en plein territoire occupé par de gros blancs très racistes. Si Lansdale brille surtout par son style, l’intrigue générale reste très bonne et on se surprend plus d’une fois à craindre pour la vie des deux héros. Rien à voir avec un San-Antonio en quelque sorte.
En effet, lire du Joe R. L. est un plaisir renouvelé. Malgré la difficulté que le lecteur peut avoir pour déterminer l’époque de l’histoire (qui pourtant récente), l’auteur a planté un décors certes oldschool mais terriblement sombre et crédible. Les personnages (les flics plus ou moins marrons, les gros bras notamment) sont comme toujours finement construits (ou déconstruits), sans excès et avec différentes teintes de gris. Une lecture agréable, et au risque de me répéter il n’est nul besoin de lire les premiers titres avec ces héros. On entre rapidement dans le jeu.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
L’amitié, la vraie. J’ai compris la signification du titre de manière très très personnelle : le mambo, c’est une danse d’obédience cubaine assez sensuelle où les partenaires se font généralement face. Et dansent la même chose. Les deux ours, ce sont nos deux héros qui ne s’emmerdent pas avec les bonnes manières face à des connards. Et en imaginant Hap et Leonard se trémoussant face à face, comme s’il s’agissait d’une unique personne qu’un miroir séparerait, je ne vois rien de mieux comme illustration.
Et le miroir serait sacrément déformant, transformant un blanc hétéro et démocrate en un noir conservateur et ouvertement homo. Avec les vannes que les deux se balancent (vocabulaire fleuri, comme il est d’usage chez Lansdale) et les balles que leurs flingues crachent, il s’agit plutôt d’une danse comico-macabre.
Le dernier thème est le racisme. Ce que décrit l’auteur inquiète grandement. Des personnages bêtes aux croyances arriérées, comme s’ils étaient piégés dans une sorte de faille temporelle où ségrégation (voire esclavage) a encore lieu. Ce monde ne paraît pas as si improbable dans la mesure où Joe R. ne s’est pas complu (ça fait bizarre mais c’est bien français) dans la vilaine caricature. Car les méchants ne sont pas totalement idiots, derrière leurs gras comportements il y a une logique. Logique certes discutable, mais qui au moins existe.
…à rapprocher de :
– Avec les mêmes héros, je peux vous livrer en vrac : L’arbre à bouteille, Bad Chili, Tape-cul, Vanilla Ride (ce dernier étant excellent), Tsunami mexicain (moins bon).
– Sinon, de Lansdale en « one shot », Tigre s’est notoirement régalé avec Vierge de cuir. Moins avec Les Enfants du rasoir (à oublier).
– Quant au racisme qui perdure, il peut être intéressant de lire Dans la peau d’un Noir, de Griffin.
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