VO : Of Mice and Men. Il y a, dans ce vaste monde, une impressionnante pile de petits classiques dont on nous dit qu’il faut absolument les lire. Pour ce bref texte de Steinbeck, Le Tigre appose son royal « lu et approuvé ». Puissant et triste, presque intemporel mais immersif, l’auteur a fait montre de grand art.
Il était une fois…
George Milton et Lennie Small sont deux amis qui effectuent des petits boulots de saisonniers dans la Californie pendant la Grande Dépression. Ils viennent de Weed où Lennie, le grand dadais très simplet, aurait fait quelque chose de condamnable. Aussi ils débarquent le vendredi dans un nouveau ranch pour travailler pour Curley dans les plantations d’orge. Le but ultime de nos deux amis est de s’acheter un lopin de terre, une baraque, et vivre « comme des rentiers » en élevant leurs animaux et en s’occupant de leur potager. Et la marmotte, elle met…euh non, rien.
Critique Des souris et des hommes
Cela doit être le premier Steinbeck lu par Le Tigre, et il faut convenir que pour un roman écrit à la fin des années 30 (et traduit en France au milieu des fifties) c’est excellent. En 90 minutes, la lecture est pliée. Au final, ce qui m’a fait perdre le plus de temps, ce sont les deux préfaces que vous pouvez éviter de lire, même si celle de Kessel, de l’Acâaadémie Franchaige (comprendrai jamais ce besoin de précision), reste très juste.
Revenons à nos deux compères. A mon sens, le vrai héros de ce titre, c’est Lennie, le débile léger grâce à qui les péripéties prennent une ampleur tragique. Une force de la nature qui aime caresser les choses douces, qui d’un lapin, qui d’un chiot, qui de la chevelure d’une belle femme. Sauf que le mec ne contrôle pas sa force, une sorte de roi Midas inversé : tout ce qu’il touche finit, malgré lui, par mourir. Et ça met George en colère.
Le père George, qui fait office de grand frère depuis que Tante Clara est décédée, ne peut hélas tout contrôler. Et on sent vite que les pérégrinations des deux compères à Soledad risquent d’être les dernières. Si j’ai trouvé le premier chapitre un peu longuet, Des souris et des hommes accuse une montée en puissance jusqu’au K.O. final aussi dramatique que logique (enfin c’est mon avis, un des protagonistes n’avait pas vraiment le choix).
Le style de Steinbeck est intelligent et plaisant : à chaque fois, l’auteur américain prend soin de planter le décor (en particulier dans les premières pages), puis se concentre sur l’action et les dialogues. En tout, l’œuvre est découpée en six parties qui font office de chapitres. Vu la taille du titre, je trouve qu’il y a quelques personnages de trop et je ne faisais pas bien la différence entre Carlson, Slim ou Candy. Je devrais me concentrer un peu plus, certes.
Une valeur sûre donc, d’autant plus que ça ne paraît pas vieillir d’un iota niveau vocabulaire. Contrairement à Faulkner, ai-je perfidement envie de rajouter.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Steinbeck semble être abonné aux titres mystérieux et que l’on retient aisément. D’après ce que j’ai cru comprendre (Tigre ne cite jamais ses sources, flemme et légèreté obligent), celui de la présente œuvre est tiré d’un poème (ou un truc dans ce goût là) où il est notamment dit :
Les plans les mieux conçus des souris et des hommes souvent ne se réalisent pas.
D’une part, le plan de Georges et Lenny (à savoir devenir des rentiers) est pourri à la base. Et ce n’est pas l’aide potentielle d’une tierce personne (le vieux Slim qui apporterait des fonds) qui serait susceptible de matérialiser un rêve insaisissable par essence. En outre, ce plan foireux fait écho avec les espoirs toujours déçus de la femme de Curley. Cette dernière n’a rien à foutre ici, ses espoirs d’actrice (voire épouser quelqu’un de riche) ayant été vite douchés.
Sinon, DSDH (ça passe mieux comme ça non ?) est un tableau finement dressé d’un détail important de l’Amérique des années 30 en plein marasme économique, j’ai nommé les saisonniers. Les vagabonds, en quelque sorte, qui en principe sont de grands solitaires (sauf dans notre cas) à la recherche d’un boulot pour se loger et/ou manger. Leur dénuement est palpable, n’importe quel lecteur normalement constitué comprendra le désir de « se poser », avoir un début de commencement de propriété, d’un toit à soi d’où on ne se ferait pas dégager.
…à rapprocher de :
– Paraîtrait qu’il faut lire Les raisins de la colère (surtout que ce titre est souvent repris dans les médias). Hélas, pour plus de 500 pages le roman, Tigre va attendre un peu.
– En attendant, La perle se doit d’être lue. Fable noire comme Tigre les aime.
– Le vagabondage aux États-Unis pendant la Grande Dépression, c’est également un des sujets du court roman La cabane de l’aiguilleur, de Robert Charles Wilson.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce titre via Amazon ici.
Ping : Robert Charles Wilson – La cabane de l’aiguilleur | Quand Le Tigre Lit
Je plussoie, Lennie en est bien le héros.
Outre l’Amérique des années 30, on peut y lire que l’on n’est pas maître de sa destinée. Non ?
Dommage que la « scène » finale de la VO diffère de celle de la VF.
Tout à fait pour la destinée, même si le destin est plus « logique » que leurs chimères. Comment ça, la fin est différente selon la langue ?
Oui oui, destin est plus approprié.
Sinon s la fin est identique, quelle autre fin aurait-il été possible ?
Juste la manière dont George s’y prend.
Sur la version originale, George est situé loin derrière Lennie, sur la version traduite il reste tout à côté je pense me rappeler.
Si l’envie vous prend, j’aimerai connaitre votre avis sur Seul dans Berlin de Hans Fallada.
Hans Fallada est sur le blog, vous allez à la page « bibliothèque », et il s’y trouve ^^
Ping : John Steinbeck – La perle | Quand Le Tigre Lit
Oui oui Le Tigre, si la grande dépression américaine vous intéresse, vous pouvez lire Les Raisins de la Colère sans hésiter. Même 500 pages passent très vite parfois…