VO : idem. Acheté au petit bonheur la chance, et faut avouer que le bonheur ne fut pas vraiment loin. Scénario qui met du temps à décoller, mais environnement et personnages relativement bien développés dans l’ensemble. Original et parfois marrant, ça se laisse lire, souvent en diagonale.
Il était une fois…
Le résumé au dos du bouquin est loin d’être dégueulasse, aussi rendons à César ce qui appartient à l’éditeur :
« Lily l’a su dès le début en le voyant tellement beau, envoûtant, si sûr de lui jusque dans les moments de fragilité feinte. Elle a deviné à l’instinct que cet homme était un danger pour elle et surtout pour Jamie, si vulnérable en dépit de sa façon bien à elle de calmer des salles entières de mecs chauffés à blanc. Ce type magnétique était le prédateur propre sur lui qui, une fois sa proie choisie, ne repartirait qu’après l’avoir dépecée. Au propre comme au figuré. Lily le savait. Jamie le savait. Et pourtant, il était toujours là… Cette histoire, tout le monde la connaît. Les médias en ont parlé. Il est temps aujourd’hui de raconter les choses telles qu’elles se sont vraiment passées. »
Critique de Stone Baby
Petit mot rapide sur Joolz Denby, Julianne Mumford de son vrai blaze. La demoiselle (plus si jeune, elle est de la génération baby-boom) est une artiste complète : poétesse « punk », illustratrice, écrivaine à ses heures, et surtout tatoueuse de talent. Le genre de personne à qui je ne confierais pas le design de mon blog pour une journée, au risque de me retrouver dans L’étrange noël de Mister Jack. Le résultat pour Stone Baby, automatiquement, est un bon polar tout british néopunk qui apporte du neuf littéraire.
L’histoire est raconté par la belle Lily, qui habite dans une sorte de grande baraque avec des amis / copains qui font un peu « cour des miracles ». Et le problème de la belle colloc commence par Jamie Gee qui fait la connaissance de Sean Powers, bellâtre tout en sucre qu’on devine être un psychopathe patenté. La narratrice tente alors d’éloigner (voire piéger) ce salopard, et la pression monte de manière plus que satisfaisante sur le dernier tiers de l’œuvre.
Malgré les qualités narratives de Joolz (chapitres courts et style plutôt léger), Le Tigre a toutefois eu beaucoup de mal à se représenter le profil des différents protagonistes. Notamment Jamie, grande nana que j’imaginais chevaline et à la répartie cinglante et géniale lors de ses one-woman-show dans les bars. L’univers de l’auteur, si particulier, ne favorise pas forcément l’empathie pour le lecteur peu porté sur la culture underground punk anglaise. Heureusement qu’il y a Mojo, un homosexuel à l’identité trouble et que j’ai trouvé tout en splendeur. Alors lui (ou elle), pas de soucis à s’en faire une image.
Au final, si l’intrigue m’a paru excessivement longue, Miss Denby a su rester « sobre » sur la façon dont est délivrée les péripéties : la chronologie, avec quelques flashbacks bien amenés, saura tenir en haleine tout lecteur normalement constitué. J’ai presque envie de porter le regard sur quelques uns de ses poèmes, juste par curiosité.
Thèmes abordés
Les deux thèmes dont je traiterai sont surtout intéressants pour les éclaircissements psychologiques que ceux-ci apportent. Déjà Jamie est désespérément amoureuse d’un dingue en puissance. Lily, Gabe, Mojo même, tous s’échinent à lui montrer ce qui ne va pas. Mais pour la femme peu sûre d’elle et qui n’est pas un canon de beauté, avoir quelqu’un aussi « bandant » que Sean la place illico sur un petit nuage. Love is blind, comme on dit outre-manche, et parfois les ravages que ça produit méritent un pavé de 400 pages.
Enfin, le lecteur aura sur la fin un bel exemple de ce qu’une enfance anormale peut produire comme perversions chez un individu. Le Tigre n’en dira pas plus de peur de spoiler, seulement le glauque de la situation ne m’avait point déplu. A propos de glauque, dernier mot sur le titre, pour avoir une idée de la « culture underground » de l’auteur : les Stone Baby, ou « bébé pierre », sont des fœtus décédés dans le corps de la mère qui ne fait cependant pas de fausse couche. L’enfant s’intègre alors dans le corps de cette-dernière, avec les os qui se calcifient sur ceux de la mère. Le mot savant utilisé est Lithopedion. Et ça peut passer inaperçu pendant des décennies…
…à rapprocher de :
– Cette écrivaine est aussi présente, chez le même éditeur (du format poche), avec le recueil de nouvelles Londres Noir, présenté par Cathi Unsworth. Y’a même du Ken Bruen dedans.
– Certains individus hauts en couleurs de ce roman m’ont légèrement rappelé ceux du road movie de Palahniuk, Monstres invisibles. Toujours chez ce même auteur, la narratrice qui tente de protéger une amie contre un homme dérangé (et contre elle-même), c’est Tell All (hélas pas terminé).
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman via Amazon ici.
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