VO : Warera no kyōki wo ikinobiru michi wo oshieyo. Kenzaburô Ôé doit être un grand auteur, pour avoir reçu en 1994 le prix Nobel il faut avoir un certain talent. Lire quelques nouvelles du Japonais permet de se faire sa propre idée, dont acte. Sur trois nouvelles dans cet ouvrage, une pépite. Captivant, un peu sombre, Ôé est à part et mérite d’être lu.
Il était une fois…
Trois nouvelles, traitant de sujets fort différent :
Gibier d’élevage : Un GI black est retenu prisonnier dans un petit village japonais. Sa présence, extraordinaire, va laisser une certaine impression aux habitants de ce petit bourg perdu dans les montagnes.
Dites-nous comment survivre à notre folie : un père essaie d’être le plus proche possible de son fils handicapé (certainement à cause des répercussions d’Hiroshima).
Le jour où l’empereur daignera essuyer ses larmes : Le Tigre ne sait pas de quoi parle la dernière nouvelle, n’ayant pas eu le courage de la poursuivre. D’où la catégorie « non terminé ».
Critique de Dites nous comment survivre à notre folie
Chose curieuse, et à l’inverse du roman Le faste des morts, le rythme et la qualité des nouvelles vont dans un ordre décroissant. Cet ouvrage peut être acheté rien que pour la première, voire la seconde nouvelle.
La première nouvelle, sur les répercussions de la présence d’un prisonnier GI dans un petit village japonais est tout bonnement géniale. Un jeune enfant, qui n’a jamais vu d’étrangers de sa vie, encore moins une personne de couleur noire, appréhende l’Américain comme une curiosité, et au fil des pages des liens complexes se créent entre les protagonistes.
La seconde nouvelle, où entre en jeu un fantôme, est réellement surprenante. Par rapport au titre on ne peut s’attendre à de tels développements, sans compter que la fin est émouvante comme tout.
La troisième et dernière est néanmoins incompréhensible. Sans doute Le Tigre n’a pas eu la patience d’entrer dans le jeu de l’auteur, laisser les mots constituer un impact cohérent dans mon cerveau. Quoi qu’il en soit, je me suis lâchement arrêté au tiers. Je n’exclue pas de reprendre ce récit plus tard.
Le style est pour le moins déroutant : les nombreuses métaphores côtoient des termes simples, précis voire crus (notamment quand le GI est décrit dans ses actes de toilette quotidiens). C’est comme si notre cerveau n’était pas habitué à une telle prose, et c’est diantrement séduisant. Ôé, qui a intensivement étudié les autres occidentaux, n’a pas perdu de son style original.
Chapeau à la traduction, qui est notamment parvenue à rendre un peu moins illisible que ça l’était dans la version originale la dernière nouvelle. Pas assez hélas.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Pour autant que je me souvienne de l’œuvre, un seul thème daigne se présenter ici. Je pourrai également parler de l’auteur, dont l’histoire est poignante (notamment la naissance d’un fils handicapé dans les années 60) est a beaucoup conditionné son œuvre, mais d’autres sites le font mieux que moi.
Le texte qui m’a profondément marqué est sur la présence du soldat US, qui représente pour les habitants un « niveau » d’altérité extrême. Les protagonistes gravitant autour du prisonnier passent par beaucoup de stades qu’on imaginerait lors d’une « rencontre du troisième type « (superbe film au demeurant). Peur, curiosité, amusement, communication déficiente, coopération, violence, Ôé a fait de cette histoire un texte touchant sur la notion de tolérance et sur l’absurdité de la guerre.
…à rapprocher de :
– Le faste des morts, du même auteur. Écrit dans sa toute prime jeunesse, trois nouvelles à nouveau.
– L’essai Notes de Hiroshima, passage quasi obligé pour tout lecteur « nippophile » qui se respecte. Même auteur également.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman via Amazon ici.
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