Sous-titre : Baroudeur. Dans un pays soumis à des menaces aussi diverses que terribles, il est un surhomme auquel les pouvoirs publics font automatiquement appel. Car Brit est invincible et tape avec une régularité de métronome sur qui d’un E.T., qui d’un manipulateur mental, etc. Alors, forcément, quand il semble saigner du nez, ça fout les jetons à ses employeurs qui veulent à tout prix préserver son don…
Il était une fois…
Chose assez rare pour être signalée, la présentation de l’éditeur sur ce comics est plus que passable. Voici ces termes :
« Il est le dernier recours de la nation en détresse. Quand des super-tordus menacent de recouvrir le sol américain de cadavres, on envoie Brit. Lorsque des dictateurs en mal de reconnaissance envahissent leurs pays voisins, on envoie Brit. Et si une bande d’aliens baveux font de la Lune la base avancée de leur future invasion de la Terre, on bombarde la zone, puis on envoie Brit faire le ménage. »
Critique de Baroudeur, premier tome de Brit
Premier tome d’une série qui ne devrait guère en compter plus de trois, le félin a été relativement séduit par l’état d’esprit de Kirkman et son scénario : prenez un mec assez vieux (mais jeune d’esprit) et indestructible, mettez-le face à des menaces aussi grossières que marrantes, par exemple une bête immonde venue d’une tierce dimension ou un dictateur d’une énième république bananière qui a décidé de tout foutre en l’air, et puis admirez le spectacle.
Ledit spectacle consiste en un court briefing, puis l’affrontement. Le méchant est imposant, fout un bordel monstre, Brit en prend plein la gueule, on se dit qu’il ne peut survivre à tant de violence. Et puis non, voilà le héros qui sort des décombres pour asséner une exemplaire correction à l’indélicat – humain ou non – qui se retrouve, en moins de deux pages, les quatre fers en l’air. Le tout correctement rendu grâce à des illustrations franches et précises. Le sang coule à flot, les couleurs sont vives et les personnages, au milieu de l’action, gardent des expressions détaillées. En ajoutant des textes plutôt sobres, inutile de dire que la lecture est d’une rare fluidité.
Cette fluidité est possible à condition que vous ne vous posiez pas trop de questions. Car les bastons se suivent à un rythme correct, sans analyse sur le pourquoi du comment de telles menaces ou sur le devenir de Brit…à l’exception de quelques pages surprenantes où, à la suite de divergences de vues entre notre ami et Cecil (le boss de l’agence qui emploie Brit) ce dernier est mis en danger par les siens et doit se faire la malle avec sa petite amie dans son repaire qui n’a de secret que le nom. Voici une énième péripétie au milieu de saynètes qui se suivent à vitesse grand V, aussi le lecteur en quête d’une « intellectualisation » de la condition du superhéros sera grandement déçu.
Alors, que penser de Baroudeur ? Le héros invincible, c’est du Superman (quoique…la krypnonite) et du Wolverine en boîte, du déjà vu. Sauf que Brit (le tome) parvient à échapper à la répétition. Et le principal attrait de ce tome est, justement, que le lecteur peut laisser son cerveau à côté, sur la commode. En espérant que les tomes qui suivent dégoupilleront un peu les quelques questionnements légitimes pour rendre la saga un tant soit peu complète.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
L’infaillibilité du héros. Voilà un sujet qui revient dans presque tous les comics. Cet aspect est ici traité sous le seul prisme de ses capacités physiques. Brit est indestructible, mais ça fait des décennies qu’il sauve le cul du pays. Et il n’est pas impossible que cela s’arrête un jour – le héros faisant la nique au proverbe « personne n’est immortel ». Alors, quand après une rencontre houleuse les scientifiques croient déceler une goutte du sang de Brit qui perle de son pif, la machine à égoïsme se met en route : n’est-il pas temps de disséquer la bête humaine pour espérer, plus tard, reproduire ses capacités ? Doit-on attendre confirmation de sa déchéance, au risque de perdre tout espoir de « façonner » un successeur ? Tout cela, évidemment, sans demander l’avis du principal intéressé…
Au milieu de la castagne et des grands tableaux d’hémoglobine, Robert Kirkman et Tony Moore distillent quelques chapitres plus personnels sur ce bon Brit. Notamment sa relation avec une jeune strip-teaseuse d’une vingtaine d’années, fraîche en tout point et amoureuse d’un homme surpuissant qui a l’aspect (et doit être nettement plus vieux) que son daron. Discussions sur l’avenir du couple, la première rencontre avec beau-papa / belle-maman, tout est fait pour nuancer la bourrinitude du superhéros. Il en est de même d’un de ses collègues qui s’avère être un cyborg et continuant, cahin-caha, à mener une vie de famille. Dans les deux cas, vie personnelle et vie « professionnelle » ne sont jamais longtemps cloisonnées et leur frontière s’avère être aussi perméable qu’un string d’actrice porno avant une scène de gang-bang.
…à rapprocher de :
– Du même Kirkman, il y a également la série Invincible, avec un héros peu prise de tête pour des combats rapides et un scénario sur l’origine des personnages qui tiendra sur un timbre poste des années 20.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce comics en ligne ici.