Si vous avez suivi l’histoire de Ponzisex (lire la première partie ici est recommandé), j’étais en train de me faire royalement chier à une soirée privée. Politiciens, top model, drogués, artistes, il ne sert à rien de mélanger les beaux QI. J’étais sur le point de me casser de la décadente baraque, mais un évènement particulier va me retenir.
La maison de Ponzisex, seconde partie
Je n’ai même pas le temps de choper ma veste en poils de pandas castrés qu’un énorme cri se fait entendre. Ça vient d’une chambre en haut. A peine si je distingue quelques mots, du style « nom de Zeus », « c’est pas vrai putain » et « pas moyen, dégage ». Le bruit, constant, me met plutôt mal à l’aise. J’ai l’habitude des coups de semonce dès que je fous la musique un poil trop fort chez moi, et ici je m’attends à ce qu’une armée de voisins mécontents nous demandent d’arrêter les frais sadomasochistes.
Non seulement ça ne gêne pas les invités, mais ils ont l’air d’apprécier la gueulante comme on savoure un bon millésime. Je n’ai même pas le temps de remarquer notre hôte, tout à coup rieur, qui tape alors dans ses mains tel un gamin le matin de Noël. Il se précipite vers les escaliers.
Tous le suivent vers la chambre d’où viennent les hurlements. Celle-ci paraît être fermée à clé, toutefois le maître des lieux sort de sa poche ce qui a beau l’air d’être un passe-partout. Il ricane tellement qu’il en devient fébrile. Avec son arthrose, il s’y prend au moins cinq fois avant d’enfoncer l’objet dans la serrure. Nous y voilà.
En entrant dans la pièce, je sens que quelque chose ne tourne pas rond : il fait trop sombre à mon goût ; Monsieur T. est attaché au lit avec des menottes, mais en position retournée ; et Clara semble tenir un gros godemiché couleur chair à la main.
L’ancêtre, encore essoufflé par la montée des marches, intervient et s’adresse directement au mec menotté au pieu :
« Pffuiii… Mais je vois que tout ceci est en très bonne voie ! Splendide ! Tu la voulais, alors tu vas l’avoir. Je te présente Claro, le plus beau travesti de toute l’Union européenne. Maintenant détend toi, Claro va te faire découvrir quelques douceurs de chez lui que tu ne regretteras pas ».
Je vais faire vite pour raconter la suite, c’est un peu trash et ne présente que peu d’intérêt. En outre, faut savoir que le sodomisé n’avait pas pensé à utiliser une poire à lavement, et Clara…euh Claro n’est pas du genre à vaseliner son dard.
J’ai du mal à dire Claro dans la mesure où même avec une belle queue, elle reste somptueuse, et encore à mon goût. Franchement, impossible de se douter une seule seconde qu’il/elle fait partie de la gente masculine, c’est à la fois terrifiant et magnifique – je me méfie maintenant, et la première question que je pose avant de dragouiller concerne le genre de la cible.
Bref, revenons à nos cris de mouton : y’en a eu plein les draps et tous les spectateurs se gondolaient comme des hyènes – en particulier un invité, mais je reviendrai dessus plus tard.
Apparemment, ça rendra plutôt bien sur les photos.
Et oui, Sanjay, le cuisinier, a sorti une chose monstrueuse de son tablier. Je pense que T. aurait préféré qu’il dégaine sa bite (il n’était pas à une double péné près) plutôt qu’un appareil photo d’excellente qualité. Le cuistot a dû mettre le mode rafales, car au bout de cinq minutes le cuisinier annonce que le serveur cloud sécurisé qui reçoit les images est surchargé.
Quant à l’acte à proprement (sic) parler, c’est la première fois que je vois une telle violence. La tendresse a pris des vacances pour laisser la place au piston d’un moteur de Formule 1 dont le bruyant pot d’échappement n’est rien d’autre que la gueule de Monsieur T. D’ailleurs, il n’est vraiment pas facile de déceler les tonalités et subtilités des glapissements de la victime. Une sorte de doux mélange de tourments intenses, de surprise quant à ce nouveau type de douleurs (du genre « tiens, ça fait mal par ici »), et une note d’humiliation rageuse.
Monsieur T. met quand même bien longtemps à comprendre que, plus il gueule, plus Clara est déconcentré(e) et lui défonce derechef le derche [ceci s’appelle une allitération dentale de qualité mes amis] pour arriver à ses fins. C’est donc en sanglotant et la voie éraillée que T. reçoit, dans le dos, l’amer produit de l’Italienne.
Les convives l’applaudissent alors de concert, retirent les menottes du pauvre type et filent vers les escaliers, laissant les deux amants à leurs petites morts respectives. Je sors précipitamment de la chambre qui sent sérieusement le fauve mal rasé.
Dans le salon où on attend T., le vieux me prend à part et me raconte à peu près ça : « Tu vois, Tigre, c’est ce qu’on a trouvé de mieux pour nous autres. Les crapules peuvent à la rigueur avoir peur de perdre tout ce qu’ils ont, voire de la mort. Pour notre mafia politique, il n’y a rien de plus infamant qu’une réputation déglinguée. Imaginez cet épisode qui occupe plus du tiers de votre bibliographie sur Wikipedia, ça fait réfléchir non ? »
Je me retiens de lui demander le pourquoi d’une enculade, et ne pas plutôt faire chanter la personne avec un truc pédophilo-zoophile, genre un bébé panda amoureusement accroché à son zob. Après, de la part de cette caste de gouvernants idiots, je sais qu’être de la passive jaquette, c’est comme être de gauche : un machin vaguement honteux qui fait peur dans les dîners mondains. A chacun ses peurs.
Douze minutes se passent lorsque T. descend, accompagné de Clara…merde, Claro (m’y ferai jamais) ! En fait, Claro l’aide surtout à marcher, et là le gus à l’anus dilaté ne dit pas non à une béquille. Il s’assied comme Edward Norton tente de se poser à la cantine de la prison dans un excellent film en noir et blanc.
Il nous toise, l’œil mouillé, et tend sa main vers la poche arrière de son jean. Petit instant de flottement, je me dis brièvement qu’il va sortir un surin. Il attrape en fait un mouchoir et se met à franchement rigoler. Tellement qu’il en pleure. De joie ?
J’ai dû mal à y croire, mais un mec qui vient de se faire sauvagement taper la rondelle, sous l’œil rigolard de ses futurs amis qui en plus prennent des photos, bah ça le fait rire.
Le mecton qui se fait bizuter sévère et en redemande, je comprends bien puisque j’en étais dans ma jeunesse – et cela restait soft, sauf concernant les boissons. Un autre qui développe un syndrome de Stockholm et sympathise avec ses vilains geôliers jusqu’à leur donner des conseils en matière de sécurité, pourquoi pas.
Mais les deux en même temps, c’est du jamais vu. Faut que je trouve un mot pour ça. Réaction Stockizutée ? Un complexe de Bizutholm ? Trop dur à prononcer.
Voilà, j’ai été témoin de l’intronisation d’un jeune loup dans leur cercle trop privé de puissants.
A ce prix, je préfère rester derrière mon écran à bloguer sur des livres et à boire du Canada Dry. Dont acte.
ÉPILOGUE
Pour la petite histoire, je suis revenu un mois après à une autre de ses pinces-fesses (trous-culs plutôt). L’aristocrate sur le déclin m’avait proposé une deuxième soirée puisqu’un vieux général venait d’avaler son bulletin de naissance. Le Cercle a donc décidé d’établir dans la place un autre couillon dont la dentition raye notoirement le marbre.
Ce couillon, ce n’était pas moi. Je n’avais rien demandé de toute façon. Du moins c’est que m’avait assuré le vieil aristo en me donnant le nom du gus : je vous le donne en mille, c’était le très gazouillant Monsieur []. Vérité vraie. Quel veinard. Si ça peut vous aider à comprendre sa démarche coincée et son attitude « droit dans les bottes »…
Ça s’est déroulé exactement comme la dernière fois. Enfin presque. Bien avant que Claro n’intervienne, un autre invité s’était un peu égaré. Disons qu’il avait un peu trop abusé sur les boissons à base de taurine et la petite pilule bleue : ce sombre imbécile voulait faire ce qu’il nommait un « Yathzee », à savoir enfourner les cinq bisexuelles soudanaises en chantant l’hymne du Commonwealth.
Pendant qu’il remettait, pour la troisième fois, le couvert à l’étage supérieur, il s’est chopé une tachycardie aigue et a perdu l’équilibre. Autant par réflexe que par connerie, ses mains sont restées accrochées aux reins de Miss Baomi, 120 kg à la dernière pesée. Et, très logiquement, Baomi lui est tombée dessus.
Le résultat, une fracture du zob (et du frein en prime), est assez marrant à voir. J’ai appris que c’est comme une fracture ouverte, plus impressionnant que douloureux. Hélas, ne pas souffrir nécessite d’absolument rien toucher. Ni bouger non plus, donc ni bander. Sauf qu’avec le kilo de pilules avalés, le boulet n’a point débandé jusqu’à la réception de la facture des urgences. On a cru bon lui faire fumer un peu de méthamphétamine afin qu’il oublie sa douleur, il s’en est accommodé. Cependant il est resté éveillé 28h d’affilée.
Sinon, la soirée s’est exactement passée de la même manière. On sent bien le respect des procédures chez ces gens-là, rien n’est tout à fait laissé au hasard. Derrière l’aspect grand guignolesque et faussement improvisé de ces soirées, il y a comme un strict emploi du temps à respecter. Si Louis XIV avait son timesheet réglé à la minute près, celui du maître de maison est plus insidieux, une espèce de calendrier soft powerisé où tout n’est qu’aimables invitations et suggestions.
Monsieur [], sensible au charme de Carla, l’a accompagné à l’étage. Classique. Claro s’est occupé de lui. On a tous ri. Évidemment. Une demie heure après, le violé aussi. Le propriétaire des lieux, malgré mes nombreuses relances, a refusé de m’avouer depuis combien de temps cette coutume existe. Étant donné qu’il répète souvent être déjà passé par là, l’individu qui l’a « introduit » devait être né au dix-neuvième siècle.
Je n’ai pas poussé plus loin mes recherches sur ce Cercle, si ça se trouve le premier enculé à avoir mis en place ce système n’était rien d’autre que Gilles de Rais.
Conclusion ponzisexée
Vous voulez la morale de ce que j’ai retenu de cette histoire? Il y a trois volets en fait.
Premièrement, j’ai remarqué que, pendant que Claro était au turbin, une personne semblait particulièrement apprécier le spectacle. Mieux, cet individu aidait le transsexuel (en retenant un peu plus []) et lui demandait d’y aller plus fort. Cette personne, c’était Monsieur T., celui-là même qui avait pris cher à la précédente soirée.
Cela m’a rappelé la démonstration d’un théoricien dont j’ai oublié le nom, et qui parlait du « dernier liant culturel ». Comme quoi, les études de philo me servent, au moins une fois, à quelque chose.
Grosso merdo, cette théorie énonce que pour perpétuer toute coutume incompréhensible au sein d’un groupe, celui-ci compte moins sur ses membres les plus anciens que les jeunes initiés. Ces derniers, s’ils ont été suffisamment marqués par l’expérience (par la joie certes, mais la douleur et la mortification fonctionnent mieux), en seront les plus ardents défenseurs.
Par conséquent, quand on te destroye la gueule (ou autre chose) sans que tu ne saches pourquoi, et que la réponse reste « on est tous passés par là », alors tente de repérer celui qui te pourrit et se réjouit le plus : c’est lui qui a douillé en dernier. Soit tu tentes de briser le cercle vicieux et fait appel à ses bons sentiments pour casser la boucle ; soit tu sais que cela ne servira à rien, et tu le regardes bien dans les yeux pour avoir une idée de ce quoi tu auras l’air bientôt.
Deuxièmement, la reproduction sociale, ça marche. Y’a rien de mieux que l’esprit de corps : il n’y a presque pas de différence entre un « Toi aussi Claro t’a enculé ? Ouais, bienvenue au club de l’élite » et un « Tu étais dans quelle promotion à l’école d’administration ? ».
Troisièmement, ne faites pas de politique. Du moins pas dans mon pays.
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