Sur-titre : Les tuniques bleues. Dans le froid vigoureux des États-Unis en guerre civile, nos deux soldats préférés vont devoir composer avec divers problèmes : une partie de la famille qui se retrouve du côté ennemi, un commandant à la moralité douteuse et des Sudistes qui soudain désirent aider les Nordistes à réparer un chemin de fer. Un peu frisquet niveau dessins, néanmoins peu de choses sont à déplorer.
Il était une fois…
Le sergent Chesterfield l’a salement mauvaise : il vient d’apprendre que ses deux cousins se sont finalement enrôlés dans l’armée…sudiste. Les cons. Comme si les bonnes nouvelles n’arrivaient jamais seules, le voilà contraint de surveiller la réparation d’une voie de chemin de fer partiellement pétée par les vilains Confédérés. En plein hiver [la couverture le suggère, mais sait-on jamais]. Ce passage ferroviaire est en effet vital pour acheminer des armes à Grant. Sur place, trois soldats ennemis se tiennent en embuscade pour empêcher le bon déroulement des opérations. Comme par hasard, les deux membres de la famille de Chesterfield s’occupent de la pièce d’artillerie.
Critique des Cousins d’en face
Vingt-troisième tome des aventures du rigide Chesterfield et du nonchalant Butch, en piste ! Le félin a repris avec un contentement rare une bande dessinée que, gosse, il connaissait par cœur. L’unité de temps est certes restreinte (une journée tout au plus), celle de lieu également (au milieu de nulle part en pleine glaciation), et celle d’action relativement limitée (restaurer une centaine de mètres de voie), mais tout ceci est rondement mené.
Trois péripéties dans cet opus. D’abord, la mission à achever, aidé d’une bande de Chinois et d’un Écossais (dont on ne sait s’il porte une culotte ou non sous ton kilt). Ensuite, la révélation de la présence des fameux cousins, avec ce que ça comporte comme moments gênants. En effet, comment faire en sorte que ça ne se sache pas ? Enfin, le petit twist pour la galerie : ces couillons de Sudistes ont aussi besoin de la ligne de chemin de fer en état d’utilisation. Des scènes surréalistes se mettent alors en place : quelques Confédérés font exprès de se faire capturer pour prêter main forte à leurs ennemis.
L’histoire présente un intérêt supplémentaire en la personne du Major Ransack (punaise, rien que ce nom de fils de catin), individu choisi pour cette mission car éloignée (plus il est loin, mieux c’est), et qui semble autant personnifier les lois de la guerre ce que Kim Jong Un incarne la démocratie. Sinon, les illustrations offrent un sentiment général de froideur et de tristesse (le blanc et le gris-bleu sont naturellement omniprésents), à peine agrémentée de quelques touches de chaleur qui font rappeler qu’il n’y a rien de mieux que son foyer – maisons douillettes, wagon confortable et chaude atmosphère à l’aide un petit feu/braséro bienvenu.
Parce qu’il faut donner un avis final, Les Cousins d’en face aurait pu être parfait s’il n’y avait pas la scène finale, certes réjouissante puisque deux locomotives prodiguent un correct gang bang au wagon de Ransack, mais hautement illogique. En effet, les Sudistes devaient se douter que des fournitures allaient rapidement être acheminées via le chemin de fer. Alors pourquoi lancer une locomotive à eux qui, comme par hasard, fonce à tout berzingue vers le wagon du Major ? Personne ne songe à s’arrêter alors qu’en face débarque une autre loco ? Merde, ça se voit à des dizaines de mètres qu’une collision est en route… Au moins ça permet une belle image d’ensemble, et des réactions furieuses (mais légitimes) de la part du haut commandement.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Z’avez noté la majuscule du mot « Cousins » ? Les cousins, ce n’est pas que la famille au sens stricte, c’est la famille humaine qui se bat avec des raisons qui ne sont pas suffisamment appréhendées par les protagonistes. Le début de la BD traite, assez finement, de la manière dont un quidam peut mettre sa vie au service du « mauvais côté ». A moins que la guerre civile sert d’illustration aux conflits familiaux que nous connaissons tous – les dialogues entre Chesterfied, Elmer et Fred illustrent ces menues tensions.
Et il n’y a pas que les troufions qui ne savent pas pour quoi (et pourquoi) ils se battent ! Il est également question des civils employés pour réaliser des tâches qui, si elles n’ont rien de guerrières, ne participent pas moins directement à l’effort de guerre. Le félin pense en particulier à ces pauvres Asiatiques dont le boulot a tout de celui d’esclaves – tiens, j’ai oublié pourquoi l’Union était en guerre. Ou à ce brave ingénieur écossais venu tout droit d’Europe et qui doit se demander dans quel asile il est tombé. Qu’il ne s’inquiète pas, son continent rattrapera (et dépassera) la maladie mentale étatique à la première moitié du siècle qui arrive.
Et oui, la logistique, autre nerf des conflits d’envergure qui savent se faire respecter. Toute main d’œuvre est bonne à prendre, peu importe d’où elle vient, dans quelles conditions elle est utilisée et ses compétences – du moins à cette époque.
…à rapprocher de :
– Dans cette série, vous trouverez également (dans l’ordre) sur le blog Black Face (un bon cru) et Des Bleus et des dentelles (transgressif, l’air de rien).
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver cette BD en ligne ici.
Ping : Lambil & Cauvin – Black Face | Quand Le Tigre Lit
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