Roman partiellement épistolaire entre deux lovers que rien ne semble pouvoir séparer, lutte d’une femme contre les catastrophes naturelles dans le tiers-monde, héros le cul entre deux chaises amoureuses : l’auteur a sorti l’artillerie lourde. S’il y a un petit (tout petit hein) saut qualitatif dans ce deuxième roman de Levy, hélas ce n’est pas encore le pied littéraire.
Il était une fois…
A la fin des années 70, Susan et Philip se sont jurés un amour éternel en apparence parfait – première erreur. A leurs majorités, les deux tourtereaux ont chacun suivi leur petit bout de chemin : Suz’ bosse dans une ONG en Amérique du Sud tandis que Phil’ préfère rester près de New-York pour faire ses études de graphique – tiens, comme l’auteur… Chaque année, ils se retrouvent à l’aéroport de Newark pour une ou deux heures. Philip, qui aurait aimé que Susan, vient à lui promettre de tout faire pour elle – seconde erreur. Il ne sait pas la portée de son geste.
Critique de Où es-tu ?
Après un premier ouvrage applaudi de toute part malgré des qualités intrinsèques insuffisantes, l’écrivain français a récidivé avec un roman qui, il faut bien l’avouer, se laisse facilement lire. Trop parfois, comme à la page 212 avec la « monotonie des jours qui raccourcissent, quand les rouges de l’automne ne compensent plus la grisaille d’un ciel qui ne s’éclaircira que de la promesse d’un été à revenir » (lisez ça à voie haute dans le métro, j’irai vous apporter des oranges au commissariat).
Où es-tu ? est taillé en deux parties assez différentes question narration. Premièrement, il y a les premières années des protagonistes qui se retrouvent, régulièrement, dans le même bar dans un aéroport. Philip s’intègre tranquillement dans son univers de graphisme et fréquente la discrète Mary, tandis que sa petite amie par correspondance se découvre une âme d’humanitaire. Sauf que, plus le temps passe, plus Susan se prend pour Antigone et se montre toujours plus chiante vis-à-vis de son chéri.
Deuxièmement, nous plongeons quelques années en avant pour découvrir que Philly a bien épousé Mary, et lui a même fait un gosse (Thomas). Or, comme si Susan n’était plus à un cadeau empoisonné près, elle disparaîtra et couchera dans son testament sa volonté que son ancien amoureux adopte sa jeune fille de neuf ans, Lisa. Nous avons donc une gamine presque ado, traumatisée par les ouragans (la météorologie occupe une grande place dans ce titre) et pas évidente à « apprivoiser ». Imaginez surtout la gueule de la pauvre Mary, contrainte d’élever la fille de la grande rivale de son cher époux – et elle le fera, grande dame qu’elle est.
Sinon, le « problème » de l’auteur reste le même, mais ici dans une moindre mesure : Marc Levy ne laisse que peu de jeu au lecteur qui se laisse aller dans la lecture comme dans la rivière enchantée. Le chemin littéraire est balisé, l’histoire est prémâchée avec des péripéties, à des rares exceptions, attendues.
En conclusion, on peut encore regretter que M. Levy n’aille pas assez loin dans une fiction pourtant riche en rebondissement (du moins un, dans les derniers chapitres). Par exemple, avec la petite Lisa qui débarque, il était légitime de s’attendre à ce que Philip finisse, une douzaine d’années plus tard, à l’épouser. Un truc marrant et potentiellement incestueux à la Woody Allen, quelque chose qui aurait fait de cette œuvre fadasse une vraie tragédie comme on les aime.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
L’amour du prochain est central et prend deux formes. D’une part, il y a l’activité dans une ONG en plein Honduras exercée par l’héroïne. Le dévouement de Susan est cependant excessif, disons qu’elle a l’impression de se débattre seule face aux calamités naturelles contre lesquelles (contrairement aux guerres) on ne peut pas grand-chose. D’autre part, le quatrième de couv’ parle d’un saut vers l’inconnu : il s’agit de laisser de côté ses émotions (jalousie, peur) afin de s’occuper d’une enfant déjà mature. C’est le souhait d’une mère qui veut donner le maximum à sa fille qui s’en sortirait mieux en Occident.
A toutes fins utiles, Marc Levy nous donne une leçon plutôt salutaire : il ne faut jamais faire de promesses de jeunesse à la con qu’on ne saurait, à l’avenir, tenir. Surtout lorsque le serment est donné à un individu sans-gêne à l’égo un poil démesuré. Le résultat est que Philip se retrouve, tel un idiot, avec une fille sous les bras – plus âgée que son fils au surplus. Sachant qu’elle est de la femme qu’il a toujours aimée, franchement une telle situation imposée connait un dénouement trop heureux pour être un tant soit peu crédible.
…à rapprocher de :
– Le Tigre est un animal curieux, et a lu quelques Marc Levy pour savoir ce qu’il en est. Du moins j’ai tenté : Et si c’était vrai…, Sept jours pour une éternité, Mes Amis mes Amours (pas pu le terminer), etc.
– A tout hasard, j’ai essayé d’imaginer à quoi pourraient ressembler ses prochains romans (en lien ici).
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce truc en ligne ici.
Marc Levy, c’est du Mc Donald’s: un produit indigeste, mauvais pour la santé, consommé par des millions de gens. Et tout cela, sciemment, pour se faire le plus de pognon possible! Intrigué par le succès, j’ai testé… J’ai eu la pire indigestion de ma vie de lecteur. Je ne me ferai plus avoir !
Exemple de l’arnaque dans son 2e roman « Où es-tu », p. 197 (Ed. Robert Laffond), je cite:
« Thomas arriva le dernier à la table du petit déjeuner. Lisa n’avait rien voulu manger et Mary dut ranger la cuisine en toute hâte. Les tartes emballées dans leur papier cellophane étaient posées bien à plat dans le coffre. Philip lançait de brefs coups de klaxon pour que tout le monde le rejoigne dans la voiture. Le moteur ronronnait déjà quand la dernière ceinture fut bouclée. Il fallait à peine dix minutes pour arriver à l’école et Mary ne voyait pas la raison d’une telle impatience. Sur la route, il lançait des regards dans le rétroviseur. »
et p. 245, je cite:
« Thomas arriva le dernier à la table du petit déjeuner. Lisa avait fini de manger ses pancakes et Mary dut ranger la cuisine en toute hâte. Philip lançait de brefs coups de klaxon pour que tout le monde le rejoigne dans la voiture. Le moteur ronronnait déjà quand la dernière ceinture fut bouclée. Il fallait à peine dix minutes pour arriver au lycée et Mary ne voyait pas la raison d’une telle impatience. Sur la route, il jetait des regards dans le rétroviseur que Lisa lui retournait aussitôt. »
Et ce n’est pas le seul copier-coller (comparez les. p.17-18 avec les p. 254-255) !!! Là, c’est sur une trentaine de lignes !!!
Ca se passe de tout autre commentaire.
Punaise, je lis ça tellement en mode automatique que je n’ai même pas fait gaffe à ce fieffé copy-paste ! Bien repéré, sinon on reste d’accord sur la junkfoodisation de cette « littérature ». Je me dis que c’est moins pire que ne rien lire et que ça peut donner envie à certains de passer à de vrais romans…sans doute me trompé-je.
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Marc Levy tourne à la monomanie chez le Tigre, ça sent le nervous breakdown voire le burn out ! Bientôt du Romain Sardou ou du Paul Loup Sulitzer ?
Déjà fait du Sardou !
Le tigre qui se fait presque du mal pour nous en lisant Levy, mais merci quand même pour tout ce que tu fais!
A ton service. Je les ai trouvés chez des amis, mon porte-monnaie n’a point souffert. Et je me lavais les yeux à l’eau de javel régulièrement.