Sur-titre : Lucky Luke. Une prime de dingue pour faire un exemple, un cheval à la noix pépère en liberté, une guerre contre les violents Indiens prête à exploser, l’Homme blanc sur le point de triompher grâce à sa mauvaise foi, voilà ce à quoi le lecteur aurait eu droit. Sauf que Lucky Luke est un vrai peine à jouir et a empêché toutes ces réjouissances de survenir. Déception tigresque.
Il était une fois…
Soyons bref les amis : Elliot Belt est un chasseur de primes, profession peu appréciée au Far West. A côté, il y a le gentil Lucky Luke qui « ne mange pas de ce pain-là ». Lorsqu’on demande à notre héros de retrouver un canasson appartenant à un gros richard à la chevaline allure, il ne sait pas qu’il va devoir affronter un problème de taille : Bronco (le propriétaire) est persuadé que Tea Spoon (un Indien) a volé le précieux animal. Et le mec offre 100 000 american dollars (au 19ème siècle, cette somme permettait de racheter un arrondissement de Paris) à celui qui ramènera Tea Spoon en vue de le prendre. Elliot Belt est bien évidemment dans le coup.
Critique de Chasseur de primes
Je crois bien avoir tout dit dans la partie précédente sur ce cinquante-huitième opus de L.L. Un amateur de pouliches (et à qui il donne d’improbables noms) voit son plus beau spécimen disparaître, et il accuse immédiatement un ancien employé de couleur. Le chasseur de primes entre alors en scène et fout un dawa monstre : en voulant à tout prix toucher la prime, Belt parvient à mitonner tout ce qu’il faut pour une tuerie avec les Indiens vivant alors paisiblement dans leur réserve.
Sans tout vous spoiler, l’intrigue se fonde sur la jalousie d’une femme (naturellement, ai-je envie de rajouter) qui a planqué l’étalon de son mari. Et même après le fin mot de l’histoire révélé, Bronco ne semble pas avoir décidé de changer (la lune de miel qui réserve à sa poule a l’air très horse-oriented). Quant aux illustrations, rien à signaler si ce n’est que le méchant principal a les traits de Lee Van Cleef, l’incontournable acteur de westerns.
Tigre, autant pour justifier de l’impression négative attribuée à cette BD que prouver qu’il la tient bien entre les mains, termine sur deux aspects particulièrement traumatisants de sa jeunesse :
1/ Premièrement, le début du tome présente l’enfance d’Elliott Belt, personnage futé qui n’a pas attendu d’être majeur pour soutirer quelques tunes ici et là. Quelques pages plus loin (page 28 dans mon édition), un des chasseurs de prime recruté par Belt ressemble à ce dernier étant jeune. Du coup, le jeune Tigre s’était connement dit qu’il y avait anguille sous roche et que ce personnage (qui n’est pas sans rapeller Jim Carrey dans Dumb & Dumber) était en fait le vrai chasseur de primes. Que dalle, me suis fait tout seul des nœuds au cerveau.
2/ Enfin, la dernière case est une invitation à relire l’ouvrage – comme si ça ne suffisait pas. En effet, Jolly Jumper fait remarquer que son maître a utilisé toutes les balles de son six-coups, et ça donne envie de vérifier. Cependant, cela signifie que le cow-boy ne recharge jamais ? Oh l’imprudent con. Il a beau tirer plus vite que son ombre (et recharger aussi vite comme on le voit dans d’autres aventures), mais à un moment faut arrêter de se trimbaler avec des douilles vides dans son flingue non ?
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
J’ai trouvé que le père Morris n’est point tendre avec le métier de chasseur de primes. Il s’agit d’individus peu recommandables certes (dont le cheval d’Elliot, qui se comporte comme son propriétaire), mais qui font la même chose que Lucky Luke – sans le pro bono. Il ne s’agit ni plus ni moins que de « fluidifier » le système judiciaire américain en permettant à d’honnêtes travailleurs de faire un travail ingrat mais nécessaire. Et là, je vous le demande : faut-il préférer un unique cow-boy solitaire qui, au gré de ses aventures, capturera un vilain par album ? Ou faut-il plutôt s’appuyer sur une horde d’entrepreneurs talentueux (le métier n’autorise pas les mauvais à rester en vie) sans qui il faudrait recruter des milliers de shérifs payés par nos impôts (charges comprises) ?
Le chasseur de primes, c’est l’indépendance et l’efficacité du secteur privé, connu pour sa haute considération de l’éthique. Et Lucky Luke, par sa gratuité, casse un marché pourtant porteur. Hélas, le scénario de départ pipe les dés en imaginant une situation rarissime : un particulier est à l’origine de la prime alors que normalement ce sont les autorités qui placardent les fameux « Wanted ». Pour utiliser des gros mots, le système devrait être un PPP (partenariat public-privé), alors que le présent ouvrage ne s’intéresse qu’à la pire situation : une affaire totalement privée
Le dernier thème concerne les Indiens qui ne sont pas si terribles que ça. Le début de l’album les présente comme un groupe apaisé prêt à refourguer de pâles imitations de tapis contre quelques dollars. Toutefois, les peaux-rouges ont gardé de beaux guerriers réflexes. Plus Elliot Belt fait de la merde, plus la tension monte, jusqu’à des monuments de suspense qui mériteraient d’être reproduits au ciné – par exemple, l’arrivée des autochtones dans un saloon, au milieu de la blanche populace terrorisée, vaut son petit pesant de cahuettes.
…à rapprocher de :
– Sur ce blog, avec Lucky Loooke, vous trouverez Le Grand Duc ; Les Dalton à la noce ou L’Amnésie des Dalton. Pour l’instant…
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver cette BD en ligne ici.
Ping : Morris & Fauche & Léturgie – L’Amnésie des Dalton | Quand Le Tigre Lit
Un gars qui tire plus vite que son ombre, un autre dont l’étalon disparait, c’est un véritable porno gay cet album: Le secret de Bareback mountain (oui à l’époque les capotes en boyau de mouton devaient pas avoir la cote).
Et « Tea Spoon », je suis sûr que c’est une position sexuelle si on cherche bien.
Ping : Morris & Fauche & Léturgie – Les Dalton à la noce | Quand Le Tigre Lit
Ping : Morris & Goscinny – Le Grand Duc | Quand Le Tigre Lit