VO : The Dewey Decimal System. Un ville dévastée, un homme dont le passé lui échappe, un projet d’assassinat (plutôt simple) qui part en sucette, bienvenue dans un monde post-apocalyptique et passablement pourri. Rapide à lire, sans grande envergure, Le système D remplit tranquillement son office. Auteur à suivre.
Il était une fois…
Après une série d’attentats et une méga grippe qui ferait passer celle de 1918 pour de la pisse de nouveau-né, la ville de New-York est carrément à la ramasse. Les fonds promis mettent du temps à arriver (lorsqu’ils ne sont pas détournés), et une loi de la jungle plus ou moins gérée par le gouvernement est mise en place. Au milieu de ce foutoir sans nom, il y a Dewey Decimal, black amnésique qui vit dans une bibliothèque. Bien introduit parmi les huiles de la ville, Dewey est plus ou moins contrait d’accomplir une mission banale : tuer quelqu’un. Oui mais…
Critique du Système D
Nathan Larson, chose amusante, est classé dans l’esprit fécond du Tigre comme étant un musicien accompli (il sait chanter et jouer du piano, le saligaud !). Et là, j’apprends que le gus écrit également. Voici son premier romain C’est donc du haut de la jalousie la plus complète que cette critique est écrite.
Le héros, Dewey Decimal (nous reviendrons à son nom plus tard), est un individu atypique car intellectuellement barré et dont on ignore tout du passé (lui aussi d’ailleurs). Débrouillard, polyglotte, maniant les armes, on sent l’ancien soldat qui souffre de troubles post traumatiques. Et lorsque le proc’ de NYC, Rosenblatt (et accessoirement son fournisseur en came) lui demande de supprimer un certain Ukrainien répondant au nom de Yakiv Shapsko, les ennuis peuvent commencer.
En effet, très rapidement, toute une ribambelle d’intervenants vont venir obscurcir la situation de Dewey : Iveta Shapsko, la femme du mec à trucider, est le personnage secondaire (le pivot, ai-je envie de dire) de l’œuvre autour duquel pas mal d’intervenants que plus d’une fois j’ai confondus : deux gus du FBI dont on se demande d’où ils sortent, Brian Petrovic, Branko, et consorts (y’a des criminels de guerre serbes là-dedans, ne me demandez pas qui, j’ai déjà oublié). Bref, tout ce petit monde se tire dans les pattes, sans forcément savoir pourquoi, et Dewey a plus souvent le cul bordé de nouilles (entendez, il a de la chance) qu’à son tour.
Quant au style, ça reste plutôt fluide, les chapitres très courts y étant pour quelque chose. Les scènes d’action, avec une petite pincée d’humour; s’accumulent plutôt vite, toutefois le vocabulaire n’a pas ce petit truc, cette folie littéraire permettant d’entrer en plein dans le titre. En outre, le dernier quart du roman, peut-être en voulant faire trop vite, m’a paru presque ennuyeux – l’intrigue se révèle être une banale histoire d’amour doublée de la recherche d’une relique orthodoxe, c’est dire.
Pour finir, un roman qui se laisse lire, mais sans le plus qui aurait pu exploser le cerveau du Tigre. Comme toujours, l’éditeur livre dans la tranche du livre une playlist de titres à écouter en même temps que la lecture, et faut dire que l’association fait mouche – Wu Tang Clan, BO de Sin City, etc. Dernière pensée Patricia Barbe-Girault, la traductrice, qui est parvenue à rendre compte – j’ai la faiblesse de le croire – ce qui se passe dans un cerveau, à bien des égards, malade.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
L’intérêt premier que devait présenter cet ouvrage est la description d’une dystopie qui s’avère être finalement une uchronie – l’année 2011 est passée. Hélas, le lecteur sera laissé pas mal de temps dans le brouillard, les éléments de la catastrophe du mois de février 2011 sont livrés avec parcimonie : une pétée d’attentats qui met à genou l’Amérique, une grippe qui décime des millions d’Américains, une reconstruction qui tarde en raison d’une corruption endémique, etc. Du coup, j’ai eu une certaine difficulté à appréhender l’univers dans lequel évolue le héros, trop de questions sans réponse me taraudant – à l’instar de Dewey, qui restera un mystère.
Le titre renvoie à la classification décimale dite « Dewey » des livres dans leur ensemble, et correspond à un esprit plutôt bien cadré qui respecte les procédures. Notre ami, Decimal, est pire que cela. C’est un énorme monomaniaque qui respecte son « Système », paradigme d’habitudes assez inquiétantes : toujours tourner à droite dans les avenues de la ville pour prendre son chemin (puis à gauche à partir d’une certaine heure) ; se laver mille fois les mains avec du Purrex (gel nettoyant) ; prise régulière de cachetons, et j’en passe. Cependant, ses manies ne m’ont semblé qu’être une touche esthétique qui apporte peu au scénario, sinon avoir un narrateur (à la première personne) assez original.
…à rapprocher de :
– Tout le bordel ambiant dans ce qui fut la capitale économique des States n’est pas sans rappeler les comics DMZ, de Brian Wood.
– Quitte à chercher très très loin la comparaison, le héros amnésique qui en a pas mal sous la caboche me rappelle Le Monde des Ā, de Van Vogt. Sauf que je n’ai jamais su terminer cette saga.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce titre via le site de l’éditeur.