VO : Deadshot. Publié sous Deadshot 1#4, Legends of the Dark Knight #214 et Secret Six #15. Focus sur un quasi vilain peu connu en la personne de Floyd Lawton, tireur d’élite de première bourre dont la personnalité est très poussée. Malgré les illustrations loin d’être au rendez-vous (trop lisse et old school), ce comics s’est révélé plus que correct.
Il était une fois…
Avant de devenir le redoutable Deadshot, Floyd Lawton se voulait justicier. Mais Batman est passé par là [ça, ce sont les derniers chapitres]. Progressivement, Floyd est devenu un tueur à gages les plus talentueux de la planète, et rien ne peut arrêter ses missions qu’il se fait un honneur de remplir. Harnaché tout de métal, Deadshot cache une terrible tragédie familiale dont se dépêtrer semble impossible.
Critique de La cible de deadshot
J’avoue avoir eu extrêmement peur en lisant les premières pages. En présence d’une sorte d’homme au pistolet d’or (mais sans la classe), j’ai cru devoir subir une énième aventure où le justicier de Gotham, absent, n’aurait pas été en mesure de rattraper un scénario malheureux. Que nenni, Deadshot s’avère être de la race des grands personnages qui, chez DC comics, ont une certaine autonomie.
L’histoire de Floyd semble assez complexe au premier abord, et la fluidité des péripéties ne m’a pas paru optimale. On apprend vite qu’il a opéré au sein du tristement célèbre Suicide Quad, et qu’ensuite il a enfilé un costume hélas assez ridicule. Tout s’accélère lorsqu’Eddy, le fils de Lawton, est capturé par des individus exigeant de régler un contrat vieux de 20 ans. Mais quel est ce contrat ? Plus prosaïquement, Le Tigre a été ravi (surpris même) du nombre de décès provoqué par notre ami à cause de ce kidnapping. Une vraie tuerie, à la limite de la gratuite hécatombe et relativement représentatif de la violence exacerbée des années quatre-vingt.
Parallèlement, le lecteur aura l’occasion de suivre les pérégrinations de Marnie Herrs, psychologue qui suit Floyd Lawton – inutile de dévoiler qu’elle en pense pour lui, c’est trivial. Celle-ci déroule tranquillou le passé de Deadshot, jusqu’à un final assez surprenant qui apporte une profondeur appréciable à l’ensemble de l’univers imaginé par John Ostrander et sa femme Kimberly Yale. Toutefois, les illustrations ne sont point le genre du Tigre : trop kitsh, trop clair (ça jure avec le tempo), texte trop ciselé (entendre : fin), le dessin m’a plus fait mal aux yeux qu’autre chose.
Quant aux deux chapitres, nettement plus récents, ceux-ci s’inscrivent pleinement dans le monde de Gotham avec un Deadshot (dont la problématique est rappelée) un tantinet moins impitoyable qu’auparavant. Celui-ci devient encore plus sympathique, et derrière un prétendu vilain se dessine un homme touchant et bourré d’éthique. Rien que la fin de la BD originelle et les nouvelles parutions valent le coup de se procurer La Cible de Deadshot.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Il est tout bonnement impossible de bien évoquer le personnage de Deadshot sans spoiler comme un furibond. A la rigueur, pour une BD des années 80, Le Tigre a moins de scrupules.
Déjà, la première question qui doit vous brûler les lèvres est « quelle est cette putain de cible ? ». Heureux que vous la posiez. Car il ne s’agit pas du menu fretin que Floyd L. supprime moyennant quelques biffetons, mais d’un ennemi plus intime. Pour tout dire, notre anti héros a de quoi l’avoir mauvaise et être prêt du point de rupture (cf. le dernier chapitre du comics). Il est question d’une glauquerie familiale sans nom et plutôt bien pensée : la mère de Floyd a « engagé » ses deux fils (16 ans d’âge à peine) pour éliminer l’insupportable pater familias. Sauf que notre jeune héros, en souhaitant protéger le papa honni, a tué accidentellement son frère.
On entre à ce moment dans une situation psychologique aussi tendue que bizarre : la mère Lawton, qui est à l’origine de la menace de révélation de ce qui s’est réellement passé (le père étant de surcroît paraplégique), est la cible inconsciente du sujet du comics. Lorsqu’un Œdipe parricide rencontre une Electre masculine, forcément l’équilibre mental de Deadshot n’est pas au beau fixe.
L’aspect le plus intéressant est, par ricochet, le rapport entre le sujet principal et le petit Batman. Aux termes d’une analyse originale, il apparaît que le Chevalier Noir est une sorte de frère de substitution du tueur à gages. Un troisième Eddy qui explique pourquoi, comme par un fait exprès, Deadshot se rate dès qu’il veut tuer le Batman. Voici donc une autre théorie intéressante qui répond à une interrogation légitime : pourquoi est-il impossible de supprimer Bruce Wayne ? Si l’ennemi intime de Batou (à savoir le Joker) ne voit pas l’intérêt à commettre un tel acte, Floyd voit le justicier comme un frère modèle qu’il aurait voulu être. Tout ne serait qu’affaire de famille en fin de compte.
…à rapprocher de :
– Le film L’homme au pistolet d’or, avec Christopher Lee et Roger Moore, tant qu’à trouver un quelconque rapprochement. Notamment la manière dont le méchant considère 007, tel un égal avec qui le combat doit être autant loyal que total. Bond le remet vite à sa place, ne vous inquiétez pas.
– Le bitchage contre le dessin doit être relativisé, à l’instar d’Un deuil dans la famille, de Starlin et Aparo.
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