[le titre de ce premier tome est le même au fait] Un jeune homme reçoit comme « cadeau » un robot mignon mais surpuissant. Lequel va chambouler sa vie en plus de révéler ses défauts et qualités (à l’humain hein). Dessin qui ne déplace pas des montagnes d’admiration quoique séduisant, histoire linéaire faite de strips plus ou moins humoristiques, le résultat est loin d’être mauvais. Bref, plus fin qu’il n’y paraît.
Il était une fois…
Un petit-copier du quatrième couverture de l’éditeur ne fait jamais de mal (ce n’est pas le félin qui a commencé) :
« Hugo est un jeune homme de son temps, accro à Internet et aux jeux vidéo, entre deux petits boulots. Il voit sa vie soudainement bouleversée le jour où il trouve dans son salon un robot doté d’une intelligence artificielle.
Baptisé Roger, celui-ci a pour principale caractéristique une incapacité totale à mentir, en plus d’une curiosité aiguisée pour le mode de vie si curieux des étranges créatures qui partagent désormais sa vie. »
Critique du premier tome de Roger et ses humains
Votre serviteur était relativement circonspect en déballant le paquet cadeau. Il jaugeait d’un œil torve un ouvrage publié par un illustre inconnu (me suis rencardé depuis) et illustré par un certain Paka dont il ignorait tout – me suis également renseigné, honteux de ma vaste ignorance. Et bah, même en ne connaissant aucun des auteurs et de leur pedigrees respectifs, Le Tigre a grandement apprécié l’ouvrage. Véridique.
D’abord, l’histoire. Hugo déballe ce qu’il pense être un cadeau, il en sort un robot à l’I.A. extrêmement développée et aux capacités presque infinies – qu’est-ce que Roger n’est pas en mesure de faire, à part mentir ? La chose bleue va bouleverser les habitudes de son hôte, sa copine Flo et leur chat, et découvrir l’univers des humains. Habitudes d’un jeune couple, école primaire, balades dans le parc, visite des parents, jusqu’à ce que l’intrigue principale resurgit : Roger est, à la base, un robot de combat. Et une agence gouvernementale désire ardemment le récupérer. C’est incohérent et pas crédible pour un sou, mais qu’importe puisque le but est de placer les protagonistes dans une multitude de situations cocasses.
Ce qu’il y a de remarquable est le mélange des genres qu’a réussi à opérer Cyprien Iov, à savoir un scénario relativement cohérent et linéaire composé de strips de trois à neuf cases maximum. Même en passant d’un développement à un autre, les auteurs parviennent à insérer quelques petits gags qui, à mon grand regret, m’ont de temps à autre fait sourire. Quant au dessin même, bah Paka verse dans la ligne claire toute minimaliste. Décor simplifié, couleurs peu immersives (sauf si vous habitez dans un jeu vidéo), personnages à la limite du manga (sont dépourvus d’yeux en plus), ce n’est pas ce que je préfère. Mais rien qui pique les yeux félins qui a vu pire.
En guise de conclusion, voilà un titre qui ratisse large et parviendra à séduire les très jeunes comme les moins verts – en revanche, pas sûr qu’au delà de 40 piges ça vous amuse. Pas de références sexuelles, problématiques graves (maladie, guerre, drogue dure, etc.) à peine effleurées – sinon pas du tout -, bref c’est amusant et safe sur tous les bords. Enfin, 88 pages, ce n’est pas le genre de BD fourre-tout qui s’achève péniblement après 50 planches. Y’a de la matière.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Roger et ses humains. Oui, le titre appelle une première réflexion sur la technologie qui possède l’Homme. Notamment le web sous toutes ses formes qui l’aliène et le rend dépendant. Mais Hugo représente une version soft des potentiels dégâts d’une utilisation excessive du trop vaste internet : trolling sur les réseaux sociaux, pornographie, jeux vidéos (seul ou en ligne), surveillance généralisée, etc. Et, en présence d’un robot qui ne sait mentir, la formulation de certaines vérités peut provoquer quelques dégâts. Heureusement, et comme le dit Rog’, le véritable maître de la maisonnée, c’est le chat. On est sauvés.
Plus généralement, Cyprien décrit une jeunesse qui est la sienne et que certains appellent la génération Y. « Y » pour why, à savoir pourquoi rentrer dans un modèle parental (mère au foyer vs. Flo la seule à bosser), se conformer à la routine du métro (aucun voyage à plus de 300 mètres apparemment) et du boulot salarié qui brise la créativité et nous fait prendre des décisions à l’encontre de sa morale intime – cf. la situation du père d’Hugo, employé de génie qui lutte pour avoir des augmentations et participe, malgré lui, à la création d’une arme terrible. La chaleur dont manquent parfois ces personnages est exacerbée par la froide logique de la machine qui va du point A au point B en traçant une ligne bien droite et acérée.
Sauf que…cette génération, dont Cyprien se moque gentiment, se révèle d’une haute intégrité et sincérité. Profiter des menus avantages d’un robot certes, mais rien d’illicite – ou alors si peu. Flo et Hug’ tentent même d’éduquer Robert en lui enseignant ce qu’il convient de faire s’il veut se faire passer en tant qu’humain. Au surplus, Hugo représente ce que cette jeunesse sait faire de mieux : travailler pour créer dans un domaine de prédilection. En l’espèce, il s’agit d’un jeu vidéo qu’il développe secrètement, attendant que celui-ci soit suffisamment achevé pour en parler autour de lui. La modestie et la conscience dans le travail, voilà qui devrait plaire aux parents.
…à rapprocher de :
– Qui dit tome 1, dit tome 2. Peut-être un jour…malgré l’annonce de ce sur quoi portera le deuxième opus, un peu putassière sur les bords.
– Hem…pour l’instant le félin a peu de titres se rapprochant, de près ou de loin, à pareil ovni illustré – un peu de Pinocchio à la rigueur ?
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver cette BD en ligne ici.