Regardez comme il est fier notre Nicolas sur la couverture. Celle-ci annonce clairement le tempo, entre gentil foutage de gueule et acide documentaire sur les premiers faits d’armes du personnage. Toutefois ce premier opus (cinq quand même) a touché une oreille du Tigre sans faire bouger l’autre, sans doute à cause d’une lecture un peu tardive.
Il était une fois…
Allez, copions-collons sans vergogne le quatrième de couv’ de ce vieux titre qui, de toute façon, ne sera sûrement au programme des terminales littéraires en 2027 :
« Même parvenu. Notre Précieux Souverain ne trouva point la paix en lui-même, tant il restait secoué en continu par des nervosités. Il ne bougeait que par ressorts. Si vous le retardiez dans sa course, vous démontiez la machine. Il marchait des épaules avec une façon personnelle de se dévisser le cou, remuant par courtes saccades. Cette chronique raconte les premiers mois de notre nouveau souverain et de sa Cour, avec, pour respecter la tradition d’insolence de notre pays, un ton que j’ai voulu moqueur et distant. »
Critique de Chronique du règne de Nicolas 1er
« Moqueur et distant », tout est dit. Moqueur. Style pamphlétaire et non dénué de malice, il faut avouer à Patrick Rambaud (son réel nom ?) d’avoir pondu quelque chose de presque original. Qui interpelle du moins. Mais sur ces premiers mois de notre gracieuse majesté Sarko Premier, Le Tigre n’a que trop rarement souri. Humour certes omniprésent servi de termes savoureux, hélas rien d’assez subtil pour me faire ricaner de feulements.
Sur la distance, permettez que je toussote courtoisement. Si tout est abordé avec un certain vocable du spectateur ironique mais omniprésent, l’orientation politique de Rambo n’est pas si dure à déceler. Nulle raison pour que cela pose un quelconque problème, toutefois les traits (grossis mais qui fait mouche) sous lesquels sont dépeints l’omniprésidence de Naboléon (dixit Le Canard) m’ont donné plus d’une fois l’impression que Patrick R. tirait allègrement sur l’ambulance.
Quant à l’histoire, tous la connaissent bien. Et là l’auteur a effectué un double travail de qualité : la documentation, avec les péripéties de Nicolas S. au jour le jour, entre petites polémiques et grandes postures. Au risque d’ennuyer par sa linéarité. Ensuite, la présentation de tous les individus gravitant autour de sa Majesté comme autant de groupies autour du chanteur d’un groupe de rock (cf. second thème).
Sur le style, je vous invite à lire le prochain paragraphe. Tout bien pesé, il appert cependant que le gros défaut d’un tel titre, c’est qu’il doit se lire dans le feu de l’action. Et pas au milieu du quinquennat du Président de la France forte, parce que les anecdotes de la période décrite, éphémères dans l’esprit du Tigre, n’ont plus le même goût ainsi refroidies.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Le pastiche version 19ème siècle. J’ai souvenir que mister Rambaud a une plume agréable à parcourir en puisant dans les canons littéraires de la Belle Époque. Ce qui est à la fois bienvenu et dommage puisqu’il ne tente pas de sortir de ce style. Toutes ces personnes impliquées dans la grande aventure ont des noms, parfois changés, qui fleurent bon le sang bleu vieillissant : qui un duc, une marquise, un dauphin (pas dur à deviner celui-là), presque un bestiaire où Rastignac en personne se serait senti à l’aise. L’erreur est sans doute de lire ce roman d’une traite, le risque d’être gavé étant conséquent.
La critique sous-jacente du pouvoir en place. Rien qu’en se plaçant dans le registre de la noblesse, l’auteur sous-entend une clique de ce coquins tendant vers la consanguinité dans leurs relations politiques, d’affaires ou artistiques. Le portrait du « héros », qu’on ne peut renier et qui peut faire travailler les zygomatiques, est plaisamment corrosif avec certes quelques attaques gratuites (complexe d’infériorité, taille, etc.). Mais que serait ce genre de pamphlet sans quelques grincements de dents fort légitimes ?
…à rapprocher de :
– Le monsieur a continué ses chroniques, que Le Tigre n’a point juger bon de se procurer (si l’éditeur veut y remédier, je suis preneur).
– Sur des chroniques bien plus hilarantes, en BD, il y a celles du Quai d’Orsay, de Blain et Lanzac. Tome 1 et tome 2, un vrai plaisir.
– Ou alors cette vieille bande dessinée, qui s’attaque au mitterrandisme des premières heures.
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