Non mais matez moi cette couverture ! Tout y est ! L’action, la technologie cyberpunkée, le beau gosse avec le flingue, la mystérieuse donzelle dont le lecteur soupçonne qu’elle passera à la casserole, l’ambiance futuriste néobrumeuse, etc. Intense et court, l’auteur a balancé dans le roman tellement de thèmes que ça en devient hélas excessif.
Il était une fois…
Je déteste spoiler un roman. Aussi je vais laisser l’éditeur le faire à ma place :
« Lorsque l’inspecteur David Caine doit reprendre du service, il ne s’attend pas à plonger dans une affaire qui le dépasse. Vince Homme, prisonnier envoyé dans le passé, se fait assassiner par un être invisible.
Qui est-il et d’où vient-il ? Pourquoi ce meurtre ? Existe-t-il un rapport avec l’agence Dream & House spécialisée dans les maisons « dématérialisées » et cette récente et incroyable découverte de la NASA ?
Quelle est cette étrange femme qui vient visiter l’inspecteur ? A-t-on sans le vouloir, ouvert une porte vers un autre monde ? Notre avenir est-il menacé ?
Autant de mystères que David aidé de ses acolytes, devra résoudre au risque d’y laisser sa vie. Et il ne sera pas au bout de ses peines… »
Critique d’Incursion
Avant de sortir l’artillerie féline, il faut savoir que je me suis procuré ce roman lors d’un petit raout où était présent ce bon Pierre – le salon du livre, ou un truc insignifiant de ce style. Il m’a dédicacé son ouvrage, et en lisant en diagonale la description du héros s’est imposée cette remarque : Pierre B. a donné ses traits à David Caine, ha ha !
Soyons sérieux deux secondes : un thriller de science-fiction en 200 pages à peine et près de 30 chapitres méchamment aérés, y’a de l’exploit. L’histoire commence par un curieux meurtre dans le passé, un acte tellement incompréhensible que la police est obligée d’annuler les congés de David (qui espérait bien finir d’écrire un roman). Le même David qui est la cible d’un homme invisible tandis qu’Aurora, un autre spectre, cherche à communiquer avec lui. Puis le lien se fait avec une entreprise de domotique qui a acheté un système de téléportation inventé par la NASA.
Ouais, j’ai la même impression que vous. D’une part, l’auteur en a trop fait. Les thèmes s’empilent et le lecteur n’a pas le temps de souffler. Si j’ai adoré la première moitié avec des problématiques intéressantes qui annonçaient de beaux dénouements, la suite, plus orientée vers l’action, m’a paru presque bâclée malgré une histoire d’amour naissante entre le héros et une certaine Shane – laquelle débarque de nulle part. D’autre part, si le manque de descriptions ne m’a point empêché d’être correctement immergé dans l’histoire, les cinquante dernières pages ont pris une tournure de série Z. qui ont achevé de tendre la crédibilité de l’histoire vers zéro.
Bref, l’écrivain a pris un scénario complet, a ôté toute description superflue tout en laissant des tournures de style parfois inutiles, et a compressé le tout. Et j’en suis venu à me demander à quel point le père Brulhet a voulu s’éclater et étaler sur la table littéraire l’étendue de ses idées. Car il y a matière à développer trois romans dans celui-ci, ou tout du moins à en faire un qui dépasse les cinq cent pages.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
La fameuse incursion, ce sont évidemment les morts qui tentent tranquillement de faire un retour dans notre monde, et ça passe. Sans vous gâcher le plaisir de le découvrir par vous-même, il y a un rapport entre la téléportation et la manière de régler la machine pour faire des utilisateurs de dociles consommateurs – ne ricanez pas putain, c’est raconté avec un aplomb qui fait qu’on y croit. Ceci dit, l’antagonisme entre l’univers des trépassés et le nôtre n’est pas total, j’irai même jusqu’à dire que les derniers chapitres laissent entrevoir une suite à fort potentiel.
A tout hasard, il faut rappeler que l’auteur ne s’embarrasse d’aucunes descriptions de la géopolitique du futur qu’il a imaginé, et encore moins d’explications scientifiques quant à toutes ces merveilles technologiques. En outre, l’utilisation qu’en font les protagonistes m’a paru complètement à côté de la plaque, à la limite de la blague. Le voyage dans le temps ? Allez zou, envoyons des prisonniers dans le précambrien. Aucune autre idée digne d’un film à petit budget ? La téléportation ? Oui, faisons des maisons de luxe avec des pièces dans chaque continent. Heu…rien de plus utile pour l’Humanité sinon ? Sans doute grâce à cela l’histoire est aussi originale qu’improbable.
…à rapprocher de :
– Dans le genre techno-thriller mais à la sauce anglaise, Richard Morgan reste ma coquette référence : la trilogie de Takeshi Kovacs est une tuerie : Carbone modifié, puis Anges déchus et enfin Furies déchaînées. Quant à Black Man, grosse claque également.
– Sur l’histoire des morts qui souhaitent revenir foutre un énorme daroi dans notre univers, je vous propose sans hésitation L’Aube de la nuit, de Peter F. Hamilton. Du très très grand art.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman sur le site de l’éditeur ici.
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