VO : Mount Dragon [faudra qu’on m’explique cette traduction de merde, franchement aguicheuse]. Démarrage en fanfare en mode thriller technologico-scientifique avec la construction complexe d’un vaccin, hélas dégonflage en cours de route à cause d’une multitude de sujets et gadgets traités. Voici l’archétype d’un roman qui ne sait pas vieillir.
Il était une fois…
Guy Carson est un biologiste pas trop con-con qui s’ennuie dans une structure modeste de GeneDyne (belle boîte de génétique pourtant), de surcroît il se trouve sous les ordres d’un petit chef. Très rapidement, Brent Scopes en personne, le boss de l’entrepris, lui propose d’aller exercer ses talents dans un labo de pointe au Nouveau-Mexique. Son boulot consistera à recombiner le virus de la grippe dans le génome humain afin de rendre la population totalement immunisée contre toutes les souches à venir de la maladie – la compréhension du Tigre s’arrête là. Hélas, le but de GeneDyne est-il si noble ?
Critique de Cauchemar génétique
J’ai beau garder à l’esprit qu’il s’agit d’un des premiers titres issu de l’alliance du scientifique Douglas Preston et de l’auteur de thriller Lincoln Child, je n’arrive pas à me départir de cette impression d’incomplétude. Déjà, la structure en trois gros chapitres (sans autre coupure qu’un saut de ligne, et encore) n’aide vraiment pas. Ensuite, plus le lecteur avance, moins il aura envie de continuer.
L’histoire commence plutôt bien, avec le héros (de souche amérindienne, aspect inutilement développé) qui se retrouve dans un laboratoire P5 au beau milieu d’un désert, environnement qu’affectionne particulièrement Carson. Dans la « vraie » vie, il me semble que les plus sécurisés sont P4, passons. Avec son assistance De Vaca, dont on sait qu’il finira par baiser avec, le biologiste mène ses expériences tant bien que mal. A côté de ces recherches, d’autres passages concernent Charles Levine, prof à Harvard et ex ami de Scopes / ex enseignant de Carson. Levine, dont les vues divergent de son ancien pote, essaye de mettre de nombreux bâtons dans les roues de GeneDyne – grâce au Mime, informaticien de génie.
A partir de quel moment ça devient chiant ? A mon humble avis, vers le milieu l’intrigue a basculé vers quelque chose de plutôt classique : Carson avait remplacé un biologiste qui a pété un câble, avant cela il avait mis au point une formule de sang artificiel, le PureBlood (dingue, un rapport avec le cycle True Blood ?). Et les effets secondaires sont à même de mettre en danger le labo. Ensuite, dès que les hostilités sont ouvertes, le dernier tiers ressemble à un mauvais roman d’aventure que j’ai lu en diagonale. Il est question d’une fuite à dos de canassons dans le désert, avec une course poursuite peu compréhensible à la clef.
Du coup, le plaisir est immensément gâché, et pour 600 pages il aurait mieux valu faire deux romans mieux foutu – ou un seul, moitié moins gros. Car les sauts de narration entre les deux histoires sont erratiques et souvent malvenus. En conclusion, Le Tigre soupçonne l’éditeur, face au succès des deux auteurs, d’avoir ressorti de son chapeau vieillissant un de leurs anciens titres. Sans s’apercevoir que celui-ci a mal vieilli. Il y a mieux.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
La science et l’éthique sont les grandes dames de ce roman, et les antagonismes sont vifs entre Scopes, le grand méchant qui veut faire des tunes, et Levine, chercheur pur jus qui a encore un semblant de conscience – sauf pour parvenir à ses moyens. Jusqu’où peut-on changer le génome humain sans faire de l’eugénisme version nazie ? Les auteurs pointent également une problématique bien connue des grands laboratoires, à savoir un brevet vache-à-lait qui est sur le point d’expirer, d’où le besoin d’avoir une nouvelle trouvaille capable d’engranger des milliards – quitte à vendre un virus à l’armée. A la fin, bien sûr que les deux ennemis intimes se rabibochent gentiment, faut dire qu’ils n’ont guère le choix.
Le huis clos est également à l’honneur, avec la pression des scientifiques dans des baraquements et contraints à une obligation de résultat. Cet aspect est renforcé par la paranoïa exacerbée qui habite certaines personnes atteintes par [pas de spoil]. Et le patron de la big company vit également comme un ermite, sa liberté étant assurée par de nombreux programmes informatiques qu’il a conçus.
C’est là que c’est du grand n’importe nawak : pour un ouvrage qui date des années 90, Scopes évolue dans un univers artificiel qui est un mélange de Second Live et un GTA-Like. Les descriptions de ce programme sont certes séduisantes, mais ça fait tellement vieux jeu. Lorsque Levine cherche à foutre la merde, la connexion dans cette sphère numérique est l’occasion pour Douglas Preston et Child de sortir une artillerie à bullshit narrative pseudo transhumaniste et ésotérique qui fera rire n’importe qui. Voilà le revers d’une médaille science-fictionnesque qui s’invite dans un thriller.
Brent Scopes, voilà un individu intéressant mais too much, impossible de le trouver un tant soit peu crédible.
…à rapprocher de :
– De Preston & Child, Le Tigre vous recommande plutôt la série avec Pendergast, par exemple La chambre des curiosités, Le Violon du diable, Danse de mort ou Le Livre des trépassés.
– Je dis des bêtises : il y a aussi Ice Limit, en one shot, tient sacrément bien la route.
– Dans la catégorie « super labo où une correcte saloperie est imaginée », vous pourrez vous reposer avec La proie, de Crichton. Aussi mal vieilli.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.
Ping : Preston & Child – La chambre des curiosités | Quand Le Tigre Lit
Cher Tigre, j’avoue qu’en matière d’anticipation génétique ou de « biopunk », la plupart des romans me semblent se répéter. Il y a peu d’ouvrages originaux, hélas.
Heureusement qu’il y a la franchise « Resident Evil », en particulier les films.
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