VO : Hostage [en toute simplicité]. Sur fond de prise d’otages qui démarre classiquement, un flic se retrouve au beau milieu d’un inextricable bordel dont lui et sa famille ne sortiront potentiellement pas indemne. Agréable montée en puissance pour un final plus que correct, encore demi millier de pages qui semble bien plus court à dévorer.
Il était une fois…
Dennis, son frangin Kevin et le taciturne Mars ne trouvent rien de mieux à foutre que braquer une station-service. Le vendeur coréen ne l’entend pas de cette manière et se défend. Un mort. Les trois compères fuient et se réfugient dans une maison où ils prennent les occupants en otage : un père et ses deux gosses (le très jeune Thomas et la mignonne Jennifer). Pour le chef des flics de la calme bourgade, Jeff Talley, c’est le début d’un scénario qui a tout de son ancien job en tant que négociateur au SWAT (qu’il a quitté car sa dernière affaire a salement capoté). Et ça risque d’être plus retors que prévu…
Critique d’Otages de la peur
Encore du Robert Crais pur jus, mais sans les héros qu’il invoque habituellement (au premier rang desquels le détective privé Elvis Cole). Un roman one shot donc, avec un protagoniste compétent et au lourd passif en tant qu’ex négociateur lors de prise d’otages. Narration différente, surtout, par le tour de force réalisé par l’écrivain américain : le lecteur sera dans la tête de divers personnages, une même scène pourra être appréhendée par différents points de vue, certains étant réjouissants à découvrir – notamment un chef de la mafia aussi amoral et logique que drôle dans sa manière de penser.
La première partie (La plantation d’avocatiers) place la situation assez classique de malfrats de bas étage retranchés dans une baraque en apparence normale. Normale ? On sent déjà qu’ils ne se trouvent pas dans n’importe quelle maison, le premier réflexe du maître des lieux étant de demander « qui vous envoie ? ». Ensuite, la partie intitulée La mouche voit les intrigues se chevaucher tandis que les personnages sont dorénavant bien campés. Les médias ? Aux anges. Le père (comptable pour la criminalité organisée) est dans les vapes, Dennis est de plus en plus nerveux, et Talley doit composer avec l’arrivée de son ex femme et fille et celle du F.B.I., agence personnifiée par la coriace Martin.
La troisième partie, intitulée La tête (opposée aux tentacules de la pieuvre), ajoute une dimension tragique. La mafia, aux abois (pensez, une maison pleine de documents compromettants et assiégée par la flicaille au courant de rien), enlève la famille de Talley pour faire pression – genre récupérer deux disquettes dans la baraque. Et dépêche une équipe de choc sur place pour observer le déroulement des opérations (voire intervenir) Dans la maison, l’ambiance est de plus en plus électrique : des centaines de milliers de dollars en petite coupure sont trouvés, et s’échapper à la barbe des flics apparaît comme impossible. Enfin, L’assaut. Mené par les « faux » agents envoyés par la mafia pour récupérer les fichiers informatiques (des trucs ZIP, la traduction est loin d’être parfaite) tandis que Talley se doute que, quoiqu’il arrive, on cherchera à le tuer.
Le dénouement de l’histoire, accéléré en raison de la découverte que Mars Krupchek est un taré fini, a l’avantage d’être bref avec une ou deux surprises du chef (mais rien d’excessivement improbable). Écriture fluide malgré un démarrage assez longuet, léger manque de crédibilité dès qu’il s’agit des interventions du jeune Thomas (que j’aurais volontiers claqué) ou le culot de Talley (qui mérite, à sa façon, le solde de claques), il n’en demeure pas moins que Otages de la peur constitue un agréable divertissement sans prise de tête. Et instructif à certains égards.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
L’air de rien, on découvre quelques techniques utilisées par les flics lorsqu’il s’agit de gérer au mieux une prise d’otages. Déjà, ne jamais laisser croire que les ravisseurs pourront s’échapper avec un hélico/avion/voiture. Établir un premier dialogue avec les ravisseurs est indispensable, et cela passe à faire montre d’empathie – faire de fausses concessions peut être aussi bienvenu. Le rapport de confiance doit ensuite se mettre à leur place, entre réaffirmation de l’autorité et bonhommie pour faire comprendre que le délinquant peut encore éviter la casse (en l’espèce, faire accuser quelqu’un d’autre). Puis les empêcher de se reposer en appelant régulièrement pour « savoir » si tout se passe bien. Enfin, les cueillir comme de vilains fruits trop mûrs.
Le titre ne fait pas référence à la peur par hasard, celle-ci est omniprésente. Angoisse extrême du héros qui, non content de voir sa famille impliquée, doit composer avec le douloureux souvenir de sa malheureuse expérience. Le trouillomètre tend en outre vers zéro côté preneurs d’otages, avec la fratrie Rootney dont les boulons sautent les uns après les autres – se la coller à la vodka n’aide pas à garder la tête froide. Peur de la part de Sonny Benza, pourtant boss de la côte Ouest de la mafia. En effet, le crime organisé à NYC est colère de la tournure prise par les évènements, aussi Sonny songe progressivement à filer à l’anglaise – jusqu’à un départ plus que précipité. La morale de ce roman ? Tous sont otages à leur manière. Et, dans toute situation critique, si u paniques, tu meurs.
…à rapprocher de :
– Ce roman a fait l’objet d’une adaptation cinématographique. Pas encore vu, j’ai surtout peu d’être violemment déçu – surtout que Bruce Willis est au casting.
– De Crais, il faut surtout saluer les romans mettant en scène les éternels Elvis Cole et Joe Pike. Dans l’ordre de parution, ça donne : Indigo Blues ; L.A. Requiem ; Le Dernier Détective ; L’homme sans passé (mouais) ; Mortelle Protection (très réussi) ; A l’ombre du mal ; Règle numéro un ; etc.
– En one-shot de cet auteur, à signaler le dispensable Deux minutes chrono.
– Dans le thème de la prise d’otage, Les Enfants d’Abraham de Littell (père) est à conseiller.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.
Ping : Robert Crais – Mortelle protection | Quand Le Tigre Lit
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