Sous-titre : Comment trois ados hyperconnectés et leur mère (qui dormait avec son smartphone) ont survécu à six mois sans le moindre média électronique [ouf]. VO : The winter of our disconnect (mieux en anglais non ?). Cela promettait d’être intéressant, hélas Tigre a failli abandonner en route. Style insupportable et apport culturel limité, rien d’autre à dire.
De quoi parle Pause, et comment ?
Nom de Zeus. Cela faisait longtemps que Tigre n’a pas autant louvoyé le bouclage d’une telle lecture. Les 50 dernières pages ont été finies en mode « lecture rapide » d’ailleurs. La fameuse pause, c’est l’idée de l’essayiste de supprimer tout média électronique pendant 6 mois chez elle (dès janvier, soit le début de l’été en Australie). Avec ses trois adolescents. Ça commence par un appetizer de deux semaines sans électricité, puis tous en selle ! Bien sûr ils peuvent bosser sur ordi ou fesseboucquer ailleurs, ce n’est pas un Amish Paradise.
C’est parti pour la chasse aux mauvais points. D’emblée, Maushart (cœur de souris, en effet) n’arrête pas de LOLer et pondre d’autres interjections de jeunes qui n’ont rien à faire dans un tel bouquin (« la hoooooonte », « come on » et même quelques smileys m’ont fait pleurer du sang tigresque). Aucun humour. Ensuite, il y a beaucoup trop de remarques personnelles. Je comprends que c’est une sorte d’autobiographie familiale, mais lui faut-il rappeler quatre fois qu’elle est ménopausée ? Apparemment cette femme ne savait plus quoi écrire à certains moments, si ce n’est l’équivalent de billets ou de tweets. Par compensation ?
Enfin, une pétée d’études sont invoquées et franchement celles-ci sont d’une désolante trivialité. Sans compter que Susan fait parfois dire à ces sondages (pas très scientifiques souvent) n’importe quoi. Ce fut mon impression, dire qu’elle est docteur en sociologie des médias… Discrédit sur toute la ligne en fin de compte, hélas élevé à la puissance mille sur les dernières pages : tous ont hâte de se reconnecter, l’écrivaine (ce mot ne lui sied guère) parle même de sortir des ténèbres. Et quelques jours avant la fin fait une orgie de trucs inutiles : gros canapés, indécents abonnements TV, réseau mobile et internet illimités, la bonne société de consommation responsable en somme. Alors, c’est comme cela qu’ils ont vécu l’Expérience (un grand « E », vous ne rêvez pas) ? Come on…
En conclusion, la question éternelle : mais pourquoi Tigre s’est procuré cette chose ? Je l’ai emprunté à grand-papa-tigre. Les libraires sont parfois pires que les vendeurs de fenêtres à double vitrage en France.
Ce que Le Tigre a retenu
Il me fut difficile de séparer le bon grain de l’ivraie, ce qui est dommage. En effet, de temps à autre, caché dans la forêt d’insipides remarques, il est quelques espèces de champignons que j’ai jugé édifiants :
La notion d’ennui est souvent abordée dans Pause. Et le développement selon lequel l’excès de possibilités de loisirs empêche les individus de vaincre l’ennui est séduisant. Trop de sollicitations habituelles sous diverses formes, dès qu’une fout le camp un certain laps de temps il n’est pas aisé de se reporter sur les autres plaisirs du quotidien. Ces derniers peuvent sembler bien fades.
Il en résulte, selon Susie (tu permets Susan ?), un certain « amorphisme » de la part de la nouvelle génération (qu’elle nomme la « génération M », cf. paragraphe suivant). Ils sont mous, grignotent sans arrêt, et surtout leurs rythmes de sommeil ne ressemblent plus à rien. Couchés tard à être sur FB, réveillés en pleine nuit par un sms ou un tweet, le portrait est saisissant et le changement des gosses de la mère / essayiste est naturellement logique (Anna, Bill et l’autre dont j’ai déjà oublié le blaze s’endorment vite notamment).
Un dernier point, plus intéressant, est ce que le « multitâche » fait sur nos cerveaux. Il arrive au Tigre de bloguer en mangeant et regardant la TV. Mais je ne suis pas vingt conversations en même temps sur MSN (c’est impossible maintenant anyway). Ou lire plusieurs romans à la fois (exemple en lien). Et faire de tout à la fois modifie profondément à terme nos connexions neurales. Nous apprenons moins par cœur, en revanche la « génération digitale » sait trouver une information en moins de deux ou jongler avec plusieurs activités. Hélas ces dernières sont plus susceptibles d’être traitées superficiellement.
…à rapprocher de :
– Susan M. aime à poindre un lien (et citer même) vers Walden et la vie dans les bois, récit publié au milieu du 19ème siècle par Henry David Thoreau. Le gus a passé plus de deux piges dans une forêt sans les conforts de la civilisation occidentale. A la rigueur ça peut être intéressant de se l’offrir.
– Sinon, le style un peu « borderline » (à moins que ce soit la traduction) m’a rappelé un essai australien encore, cette fois-ci d’une illustre actrice porno. Et oui, il s’agit bien de Monica Mayhem et ses Confessions intimes d’une porn star.
Pour finir, si votre librairie est fermée et que vous tenez absolument à vous le procurer, vous pouvez le trouver sur Amazon ici. Mais je vous le déconseille vivement.
Quant au titre de Walden, il est ici.
Avez-vous lu TV lobotomie de Michel Desmurget?
Non ! Mais c’est dûment noté. J’imagine que la TV en prend légèrement pour son grade ? Susan M. en parle un peu, surtout par rapport à l’amorphisme à cause du choix du bouquet.