Un éminent professeur a conseillé au Tigre de lire cet ouvrage sur les songes. Ça change du Gaiman vous entends-je railler. Il n’empêche que sur 250 pages Tobie Nathan a constitué un petit bijou de savoir, et le lecteur averti en sortira renforcé, d’un point de vue tant personnel que vis-à-vis d’autrui. A bon entendeur…
De quoi parle La nouvelle interprétation des rêves, et comment ?
Tobie Nathan nous convie à un voyage sur le rêve : voyage vertical, grâce aux éléments qui composent le rêve ; voyage horizontal, le rêve étudié sous tous ses paradigmes et au travers les cultures, les âges.
C’est plus que complet, et en seulement 250 pages ! Superbe effort de synthèse effectué par Nathan, à tel point qu’à partir de chaque chapitre on pourrait tirer une thèse. Côté face, le lecteur distrait peut trouver l’essai un peu âpre à la lecture, malgré quelques exemples fort intéressants : interprétations concrètes de rêves données (avec des ancêtres, la famille,. la mort..) notamment.
Bref, grandiose et fort instructif. Au lieu de donner pour chaque item qui daigne apparaître dans un rêve sa signification, Tobie nous donne la clef : charge ensuite à nous de faire l’effort de savoir pourquoi tel ou tel songe.
Ce que Le Tigre a retenu
Tellement de choses à dire sur cet ouvrage, essayons de résumer brièvement :
Tout d’abord, le rêve est éminemment personnel, et celui qui sait le rêve de l’autre détient un pouvoir énorme. Donc ne racontez pas vos rêves à n’importe qui ! Il appert également que le rêve est avant tout basé sur l’avenir, en analysant inconsciemment les dangers rencontrés dans la journée. Rêver peut alors nous préparer à faire face au lendemain qui vient, en se rendant mieux compte des dangers, plus ou moins visibles, du passé (ce sont souvent les mêmes).
Les Grecs, ensuite, qui semblent avoir énormément compris des rêves. Beaucoup de leurs interprétations ont été reprises par les chrétiens et musulmans à leur sauce… A ce titre les 30 secondes culturelles du Tigre : le complexe d’œdipe, qu’on peut retrouver dans un rêve, ne serait rien que l’envie du retour à la patrie.
Freud aussi, grâce à qui les dieux et autres évènements sont écartés, se concentrant sur l’Homme. Hélas ce dernier considérait l’esprit humain avec le même paradigme (tous pareils quoi) sans tenir compte de son individualité, rendant la psychanalyse un peu pauvre au final. Mais celle-ci reste quand même dans le coup : en général, les cultures ont saisi le potentiel auto-réalisateur du rêve. En cherchant à comprendre celui-ci on se conditionne potentiellement à agir, plus tard, dans ce sens.
Le principe fondamental retenu est que le rêve sert entre autres à retrouver sa singularité, lorsque autour de nous on est considéré comme des « quiconques ». A ce titre le sommeil paradoxal permet de réinitialiser chez certaines espèces leur arrangement (d’origine génétique) des cellules du cerveau. Bref dormir beaucoup fait de moi quelqu’un de toujours aussi singulier, voire spécial. Les conséquences sont révélatrices : que dire alors des hommes qui dorment peu, destinés à devenir des animaux sociaux en puissance ?
Imaginez que la plupart des hommes politiques ne dorment que quatre à cinq heures par nuit, peut être est-ce une réaction inamovible guidée par la soif de pouvoir. Soif réalisée quand on est dans l’air de l’Histoire et des pensées des hommes.
Et tant d’autres leçons… Comme le principe « fa » du Bénin, avec ses 256 combinaisons d’interprétations des rêves, qui ne serait pas sans rappeler le Yi King, et son livre des interprétations.
…à rapprocher de :
– Quelques ouvrages de Freud, bien sûr.
– Tobie Nathan a écrit un roman, prouvant qu’on peut être un grand savant et un fabuleux conteur.
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Fa 2exp8 = 256. 8 coquillages pour possibilités.
Merci de la correction, la calculette tigresque a fourché !